1922.04.05.Note sur le charbon de la Sarre

Double de courrier

NB : La copie image de ce document, de mauvaise qualité, n'a pas été conservée.

Charbons de la Sarre

Nous avons reçu, vendredi dernier, une lettre de l'agence de Paris de l'administration des mines domaniales de la Sarre nous demandant d'envoyer quelqu'un pour avoir un entretien, lundi 3 courant, avec M. Saillard qui était de passage à Paris.
M. Saillard a tout d'abord dit, lundi dernier, à notre représentant qu'il regrettait que M. Bottom, empêché, n'ait pu être présent audit entretien et qu'il désirerait beaucoup que la conversation soit poursuivie en sa présence, c'est-à-dire le lendemain.
Néanmoins, au cours de ce premier entretien, M. Saillard nous a dit que les modifications qui venaient d'être apportées aux tarifs spéciaux P.V. 7 et P.V. 107, ceci à la suite de la demande expresse qu'il avait adressée au ministère des Travaux publics, allait lui permettre de tenter un gros effort pour la vente du charbon de soutes dans la région de Marseille et qu'il était disposé à faire l'impossible pour enlever, avec son combustible, une partie de la clientèle s'alimentant actuellement en charbons anglais.
La réorganisation apportée, paraît-il, dans l'exploitation des mines de la Sarre lui permet, maintenant, de vendre indifféremment des gros, des tout venants ou des charbons calibrés. L'extraction atteint un million de tonnes par mois malgré les gros marchés qu'ont les mines de la Sarre avec les usines à gaz, l'alimentation d'une partie des besoins du foyer domestique à Paris, etc., ces mines ont un surcroît de production pour lequel elles cherchent des clients.
Les mines de la Sarre toujours d'après M. Saillard n'ont pas un prix de vente fixe, mais sont disposées, même si elles devaient aller au-dessous de leur prix de revient, à faire un prix, rendu à Marseille, qui leur permette d'être au-dessous des prix actuellement cotés pour les tout venant anglais, même si elles doivent au début, fournir des gros charbons pour avoir la priorité.
Les gros charbons de la Sarre font, paraît-il, de 5 à 8 % de cendres maximum, leur pouvoir calorifique est de 7200/7400/7600.
Comme ce sont des mines d'État, M. Saillard, suivant en ceci les directives du ministre des Travaux publics, veut s'attaquer spécialement au combustible anglais et ne veut pas entrer en concurrence avec les charbons français.
II nous propose de travailler la question avec lui et nous disait être disposé à faire des expéditions par train complet sur Marseille, au cas où nous aurions de grosses affaires de charbon de soutes à exécuter.
M. Botton n'étant pas présent à l'entretien, nous avons laissé M. Saillard parler pour savoir s'il avait réellement une affaire spéciale en vue. Nous craignions, en effet, qu'il ait eu vent de l'affaire des services contractuels des Messageries et nous nous proposions de le sonder le lendemain à ce sujet.
Le mardi, M. Botton qui était présent nous a dit avoir eu l'occasion de causer avec M. Delteil, à différentes reprises, de la question des charbons de la Sarre et nous avons vu, tout de suite, que l'agent à Lyon des mines de la Sarre était très documenté sur la question des fournitures pour les soutes.
Il nous a dit que, si ses renseignements étaient exacts, on pouvait tabler, à l'heure actuelle, pour le combustible anglais, sur le prix moyen de F 103,- la tonne fob et arrimée en soutes qu'à ces conditions, son administration pouvait nous fournir, non pas du tout venant, mais des gros qui laissent encore une marge de bénéfice assez importante.
M. Saillard préconisait l'expédition par voie ferrée. M. Botton lui a dit que l'affaire était absolument impraticable, étant donné qu'il y aurait de nombreuses difficultés matérielles et presque des impossibilités d'exécution et que, d'après lui, et l'étude à laquelle il s'était livré, la seule combinaison possible à envisager était l'expédition par eau, les charbons étant transbordés à Lyon, expédiés de Lyon, via Port-Saint-Louis-du-Rhône, à Marseille, les péniches pouvant être amenées à votre poste du quai aux Anglais.
Nous avons pu ainsi apprendre que l'H.P.L.M., qui avait été interrogée par l'administration des mines domaniales de la Sarre, faisait un prix, depuis départ de la mine, jusque sur péniche Marseille, de F 42,- par tonne par péniche de 250 à 280 tonnes et qu'elle était disposée à examiner spécialement une proposition à faire pour une affaire importante et suivie.
Il faut tabler, pour la durée du transport depuis la mine jusqu'à Marseille, sur une durée de 6 semaines à 2 mois.
M, Botton pense que l'H.P.L.M. pourrait fournir suffisamment de péniches pour permettre la constitution à quai d'un stock assez important ; il croit même que, dans certains cas, le stockage pourrait être évité et que le transbordement pourrait avoir lieu directement ex péniche sur vapeur.
D'autre part, M. Saillard, à qui nous posions la question, est tout disposé à nous garantir l'exclusivité des fournitures et des prix spéciaux pour les clients que nous aurons pu amener à prendre des charbons de la Sarre.
Plusieurs maisons de Marseille se sont, paraît-il, adressées au ministère pour demander l'agence de ces mines et de travailler l'affaire comme on nous la propose, mais M. Saillard nous a dit (est-ce exact ?) que, connaissant le renom de notre Maison et sa puissance, c'était avec nous qu'il voulait essayer la tentative.
M. Saillard doit aller à Lyon vers le 20 ou 22 ct ; il voudrait, au cas où l'affaire nous intéresserait, voir M. Delteil et mettre sur pied, avec lui, la combinaison à envisager pour mener à bien cet essai.
Les mines de la Sarre sont toutes disposées à nous donner les quantités nécessaires pour ce qu'ils appellent "échantillonner la clientèle", c'est-à-dire qu'ils nous fourniraient des prix spéciaux pour faire des fournitures d'essai à certains gros armateurs.
D'un autre coté, M. Botton, qui doit être à Marseille au début de la semaine prochaine, doit téléphoner à M. Delteil pour lui demander ce que nous avons décidé au sujet de cette affaire.
A la question précise que nous posions à M. Saillard, à savoir si éventuellement il voudrait nous garantir l'analyse de ses charbons, il nous a répondu par l'affirmative en nous disant qu'il se portait garant que pour un tonnage déterminé, le pourcentage en cendres serait certainement inférieur à 8% et qu'il était même certain que cela ne dépasserait pas pratiquement 6% pour des tout gros charbons.
En ce qui concerne le tout-venant, naturellement il n'a pu nous donner aucune précision, car cela dépend absolument de la quantité de menus entrant dans la composition du combustible.

Paris, le 5 avril 1922

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