1918.11.14.De Worms et Cie Port-Saïd.02

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Worms & Co.
Branches in Egypt: Cairo, Alexandria, Port Tewfik (Suez)

Port Said (Eypt), le 14 novembre 1918
Messieurs Worms & Cie - Paris

Messieurs,
Beyrouth. Nous venons vous rendre compte du voyage de M. Roussel à Beyrouth.
Dès la réception de votre télégramme du 19 octobre, la question d'envoyer un de nos employés à Beyrouth pour y ouvrir une succursale nous a paru impossible à réaliser. Seuls, MM. Golubzow et Buchanan avaient l'envergure pour remplir convenablement une mission de ce genre, mais les services dont ces employés sont chargés à Port-Saïd ont une telle importance qu'une absence prolongée de l'un ou de l'autre de ces Messieurs aurait considérablement entravé nos affaires ici, vu l'impossibilité de les remplacer au pied levé. D'un autre côté, nous avions l'intuition que dans un pays qui s'ouvre à l'influence française il fallait un Français à la tête d'une maison française, et nous pressentions toutes sortes de difficultés aussi bien pour obtenir l'autorisation de départ de Port-Saïd dans un délai très court que pour les négociations et démarches à engager à Beyrouth. Aussi M. Roussel a-t-il pris la décision de partir lui-même, en emmenant avec lui un de nos compatriotes, M. Michelet, reformé pour blessures, que nous avions pris à notre service comme magasinier aux marchandises depuis avril 1918 et qui nous a donné entière satisfaction dans cet emploi. Il avait d'ailleurs l'avantage de connaître Beyrouth, où il était employé avant la guerre. En même temps il nous paraissait utile de prendre avec nous tout le matériel nécessaire au déchargement des 1.516 tonnes de charbon embarquées sur l'"Océanien" - couloirs, couffes en rotins, pelles, couffins, et planchons - ainsi qu'une quarantaine de nos ouvriers déchargeurs.
Dès que nous pûmes joindre le délégué et le commandant supérieur de la Marine, le lundi matin, 21 octobre, nous leur exposâmes nos idées qu'ils approuvèrent en tous points, et qui furent d'ailleurs plus tard sanctionnées par l'amiral Varney à qui elles avaient été soumises par radio.
Nos craintes au sujet de la difficulté d'obtention du permis de départ étaient assez fondées puisque les démarches que nous avions faites le 21 dans l'avant-midi n'ont abouti que le 22 dans l'après-midi, après intervention du délégué de la Marine et de notre consul, ce dernier ayant bien voulu porter sur les passeports de Michelet et de M. Roussel comme objet du voyage : "en mission du gouvernement français". Dans l'intervalle, nous avions embarqué sur l'"Océanien" (sans autorisation, nous ne l'aurions jamais eue à temps} - 60 couffes en rotin - 6 couloirs à déchargement - 3.700 couffins - 16 planchons - 60 pelles - ainsi que le cordage, les crochets et poulies nécessaires.
C'est dire que les autorisations nécessaires furent données juste à temps pour permettre à M. Roussel et à nos hommes de s'embarquer le 22 au soir sur l'"Océanien", qui prit la mer le lendemain matin. Les équipes de déchargement se composaient de 38 journaliers, 3 rais et un chef d'équipe, ce dernier neveu d'un de nos sheikhs embarqueurs et étudiant à l'Université de Beyrouth avant la guerre, très au courant de nos opérations de charbon et de transbordement.
Opérations de l'"Océanien" à Beyrouth. A la suite de l'accident que l'"Océanien" a eu en Méditerranée en juillet, ses machines ne peuvent travailler qu'en compound, et ce navire ne donne plus que 8 1/2 nœuds au lieu de 14. La traversée de Port-Saïd à Beyrouth a donc pris 28 heures.
On nous a signalé deux sous-marins par le travers de Chypre, mais le voyage a été exempt de toute alerte. Arrivé sur rade à 11 heures du matin, le 23 octobre, l'"Océanien" a accosté le mole de la jetée Nord à 2 h, c'est-à-dire trop tard pour commencer les opérations de déchargement le jour même. Nous reconnaissons l'emplacement réservé à la Marine sur le mole pour l'entreposage des 1.516 tonnes de charbon et nous rendons compte qu'il ne sera guère possible d'y loger plus de 900 tonnes, vu son exiguïté. D'autre part le quai est encombré de ferraille, godets de drague, poutrelles, cornières, etc., laissés là par un vapeur de la Rickmers Line en 1914, et qu'on ne peut songer à faire escalader par les journaliers qui mettent le charbon à terre. Les équipes de mise à terre ont été engagées sur place par la Marine elle-même, aussi bien pour le charbon que pour les 600 tonnes de vivres apportées par l'"Océanien".
25 octobre, aucun travail, l'"Océanien" ayant été déplacé dès le matin et mouillé en rade pour laisser accoster un navire hôpital anglais. "Océanien" accosté à nouveau à 5 h, soir.
26 octobre, orage et pluie torrentielle depuis le 25 à 10 h pm, rendant tout travail impossible. Éclaircie vers 2 h pm. On commence à décharger les vivres. Déblaiement d'une partie du quai par nos hommes.
27 octobre, retourné en rade à 5 h am pour laisser accoster un autre navire hôpital. Revenu au môle à 4 h soir, trop tard pour travailler.
28 octobre, déchargement des vivres et du charbon. Main-d'œuvre locale plus que médiocre, journaliers débiles et indolents, arrivent difficilement à porter à quelques mètres un petit couffin à moitié rempli et avec quelle lenteur !
Nos hommes charbonnent le destroyer "Hova" à contre-bord (80 tonnes).
29 octobre, continué le déchargement des vivres et du charbon. Mauvaise journée, main d'œuvre franchement mauvaise, journaliers de terre exténués. Charbonné le "D'Iberville" à contre-bord (30 tonnes).
30 octobre "Océanien" bouge à 6 h et va mouiller en rade pour laisser accoster un navire hôpital. Pas de travail. Retour à quai 5 h 30 pm. Nous vous ferons grâce de la suite du détail de nos notes journalières, qui sont à l'avenant, et nous contenterons de dire qu'après une nouvelle interruption de travail du 3 ct à 3 heures am au 4 à 5 h pm ; toujours pour laisser accoster un navire hôpital venant embarquer des malades, le déchargement de la cargaison totale de l'"Océanien", 600 tonnes vivres et 1.516 tonnes charbon s'est enfin terminé le 5 et à 7 h du soir.
Laissant de côté les vivres de ravitaillement qui ont été également extraits des cales par nos équipes, les équipes locales de mise à terre ont employé 8 jours pleins pour mettre en tas 930 tonnes de charbon, soit une moyenne de 116 tonnes par jour avec 100 hommes environ, ou à peine un peu plus d'une tonne par homme et par jour.
Encore avions-nous mis quelques-uns de nos hommes à faire les murailles et à diriger le montage méthodique du tas. Les contre-maitres locaux se contentaient de regarder placidement.
Au cours du déchargement, nos hommes ont charbonné à contrebord de l'"Océanien" les unités suivantes : "Hova", "D'Iberville", "Carabinier", "Aspirant-Herber", "Coutelas", "Hache", "Voltigeur", "Torpilleur 250", "Arbalete", "Vulcain", "Pavot" - qui ont pris en tout environ 536 tonnes. Ils ont également transporté en soutes de l'"Océanien" 50 tonnes des cales. Bien que travaillant des deux bords, nos journaliers devaient constamment marquer un temps d'arrêt très prononcé entre chaque palanquée déchargée sur le quai, par suite de la lenteur des ouvriers locaux. On a dû d'ailleurs abandonner dès le second jour le déchargement par couloirs, l'espace très restreint où se déversait le charbon étant encombré en rien de temps.
Le déchargement des vivres a été de même fort lent, la Marine, qui avait bien voulu s'en charger pour compte du Haut-Commissariat, n'ayant eu que deux camions automobiles par jour pour leur enlèvement.
C'est ainsi que quelques centaines de sacs de farine sont restés sur le quai trois jours pleins, alors que tant de malheureux mouraient de faim.
Le temps étant pluvieux, l'"Océanien", sur notre demande, avait fait recouvrir ces sacs de prèlarts et le tout a ainsi été préservé. Il y avait bien sur le quai, précisément en face de l'"Océanien" un hangar à moitié vide, mais il était à la disposition de la base militaire française et par suite "tabou".
Les journées des 6 et 7, l'"Océanien" a chargé comme lest 150 tonnes de la ferraille qui se trouvait sur le quai, sur ordre de la Marine, parmi lesquelles 80 godets de drague appartenant à la Compagnie du Canal. Ce travail a été arrêté le 7 à midi, pour laisser accoster un transport anglais devant débarquer entre autres choses 1.500 tonnes de charbon dans un emplacement plus exigu encore que celui de la Marine française.
Mouillé en rade la 7 à 3 h pm, l'"Océanien" a repris la mer le 9 au matin pour arriver sans encombre à Port-Saïd le 10 à midi. Ajoutons en passant que nous avons aperçu les épaves de trois gros vapeurs torpillés dans le chenal de sécurité de Port-Saïd le 3 et au matin.
Nous pouvons nous féliciter d'avoir eu l'idée d'emmener notre matériel et notre équipe de déchargement. Sans cette dernière, l'"Océanien" serait encore à Beyrouth, et il aurait été impossible de se procurer à Beyrouth des choses aussi simples que des pelles et des couffins, 800 de ces derniers ont d'ailleurs manqué à l'appel lors du recensement final, ainsi que quelques pelles, et nous croyons savoir que les unités que nous avons charbonnées et qui en manquaient se sont servies.
Le commandant et le second de l'"Océanien" nous ont fait à plusieurs reprises l'éloge de nos hommes tant au point de vue du travail que de la conduite et de la discipline.
Terrain d'entreposage et bureaux. Le jour même de son arrivée à Beyrouth, M. Roussel s'est mis en rapport avec l'amiral Varney et son chef d'état-major en vue d'obtenir immédiatement un terrain en bordure du quai. L'amiral Varney nous avait promis d'insister pour que nous ayons immédiatement le terrain C, en face de l'"Ariane", sur le plan que nous joignons à ce rapport, mais lorsque nous vîmes un peu plus tard le colonel de Piépape, qui remplissait alors les fonctions de gouverneur militaire de Beyrouth, la question prit un tout autre aspect.
Il fallait attendre qu'une commission mixte de répartition des terrains et locaux fût nommée et délibérât. Cette commission mixte, composée du Senior Naval Officer, du Divisional Naval Transport Officer, du commandant de la base française et d'un délégué de notre Marine, fut nommée le 26 et se réunit le 27 après-midi. Nous nous joignîmes à elle, et après une longue discussion (le DNTO prétendait que nous n'avions pas besoin d'un parc à charbons, attendu que l'Angleterre ne pourrait pas nous allouer de tonnage pour Beyrouth) et sur l'insistance très énergique du délégué de notre Marine, la commission nous alloua le terrain marqué D sur le plan. Ce terrain, qui a environ 2.000 m2 de superficie, monte vers la ville en pente assez prononcée, mais il est facilement accessible du quai, dont il est séparé par une route de 20 mètres de large, et les allèges chargées trouveront toujours assez d'eau pour accoster, profondeur à un mètre du quai : 3 mètres. La discussion engagée autour de ce terrain ayant été assez orageuse, nous crûmes prudent d'attendre la signature du procès-verbal par tous les membres de la commission avant de commencer les travaux de nivellement et de clôture. Nous eûmes la confirmation le 29 au soir, et dès le 30 au matin nous commencions la mise en état du terrain, de forme trapézoïdale, suivant croquis annexé donnant une idée beaucoup plus exacte de sa configuration que l'indication au plan, dont les détails imprimés sont loin d'être exacts.
Nous avons fait niveler et damer le terrain, qui a été enclos par des pieux de bois de 2 m 50 de hauteur réliés entre eux par trois rangs de fil de fer barbelé. Nous y avons fait construire une guérite pour le gardien et un hangar en bois avec toiture en tuiles pour y loger le matériel, couffes, couffins, pelles etc. Nous avons eu la satisfaction de voir tous ces travaux complètement terminés le 8 au matin, avec enseigne peinte au-dessus de la porte d'entrée du hangar :
"Worms & Cie, négociants en charbons, manutentionnaires de la Marine et de l'Armée"
Le devis total de ces travaux s'est élevé à la modique somme de 3.300 francs.
Nous avons eu quelque mal à trouver un local convenable à destination de bureau, tout ce qu'il y avait de mieux étant pris par les services des armées britannique et française. Nous voulions quelque chose près du quai, avec vue sur le port et les premiers locaux que nous visitâmes étaient peu commodes ou convenables, et les prétentions des propriétaires excessives. Finalement, nous finîmes par fixer notre choix sur le 3ème étage d'un immeuble en bordure du quai, près de la Banque ottomane, comme indiqué sur le plan, et d'où la vue embrasse tout le port. Ce local comprend neuf pièces, avec entrées sur le quai et sur une rue parallèle derrière. Le 4ème étage comprenait un appartement de 5 pièces, avec cuisine et dépendances pouvant servir au logement de l'agent et nous avons loué le tout pour un an, payant 6 mois d'avance, à raison de 2.000 francs par an. Il a fallu quelque temps pour mettre en état et nettoyer ces deux étages, ou poussière et plâtras s'étaient accumulés pendant ces quatre années de guerre, et ce n'est que le 7 que nous avons pu emménager sommairement, après acquisition de quelques tables, bureaux, chaises armoires, un coffre-fort Fichet, etc., soit l'indispensable pour commencer les opérations. Nous avions pris la précaution d'emporter avec nous une plaque gravée "Worms & Cie", qui a été fixée bien en évidence, à l'entrée des bureaux.
Organisation. Bien entendu nous avons été assaillis de demandes d'emploi et d'offres de services d'entreprises de déchargement. En ce qui concerne les opérations de charbon, l'expérience faite avec les entreprises de mise à terre qui se sont succédé pour le déchargement de l'"Océanien" a suffi à éclairer notre religion, et nous avons décidé de laisser à Beyrouth, avec tout le matériel que nous avions amené, notre contremaître Abdul Hamid Attalah, neveu d'un de nos sheikhs embarqueurs, qui connaît parfaitement la ville et ses ressources en main d'œuvre, et qui en plus d'être très au courant de nos opérations de Port-Saïd, parle et écrit couramment le français et l'anglais. Ce contremaître recrutera lui-même des journaliers vigoureux et les dressera. Il est entendu que nous ferons les opérations de charbon en régie, les hommes étant payés à la journée et recevant intégralement la paie convenue, qui sera probablement de 3 F 50 par jour. Nous pourrons ainsi nous rendre compte très exactement du rendement de la main d'œuvre et l'améliorer progressivement, tout en mettant fin à l'exploitation honteuse dont nous avons été témoins au cours des opérations de l'"Océanien" : les journaliers que la Marine payait 5 francs à l'entrepreneur, ne recevaient en tout et pour tout de l'entrepreneur que la valeur de 1 F 50 à 2 francs en papier turc.
Nous avons engagé un gardien de jour et un de nuit pour le parc à charbons et nous sommes d'accord pour que toutes les communications de service émanant de la Marine ou de la base soient remises à l'un des gardiens, qui les transmettra immédiatement au bureau, afin d'assurer une liaison rapide entre ces services et le bureau.
Les conditions de travail sont sensiblement les mêmes que celles que nous avons expérimentées autrefois à Zanzibar et nous avons décidé d'employer les mêmes méthodes : pesage du charbon, un couffin sur dix, mise sur mahonne du charbon en couffins, avec note d'avis, pour chaque mahonne expédiée aux navires, du nombre de couffins chargés et du poids total. Nous avons d'ailleurs pu nous procurer à Beyrouth une bascule en bon état, pesant jusqu'à une tonne.
Vu la faiblesse physique actuelle des journaliers et leur peu d'aptitude mêlé de répugnance à transporter du charbon à dos, nous avons prévu l'acquisition de 6 charrettes à bras, fermées des quatre côtés, qui feront le va-et-vient entre le parc et les allèges, avec des couffins remplis. On arrivera ainsi à accélérer la mise à terre et l'embarquement sur allèges.
Nous basant sur les conditions actuelles et en tenant compte de nos frais généraux, nous avons soumis à la Marine, avant notre départ, des tarifs de manutention dont nous vous parlerons plus loin.
En ce qui concerne les manutentions de marchandises, nous avons fait un contrat d'un mois, à l'essai, avec une entreprise Chrairo, qui faisait autrefois les déchargements des Messageries maritimes. Ceci nous donnera le temps de nous retourner et d'étudier sur le vif la façon dont on comprend ces opérations à Beyrouth.
Nous avons laissé à Beyrouth M. Michelet, qui s'occupera plus spécialement des opérations de manutention de marchandises, qu'il connaît bien. Il est d'ailleurs entendu que nos deux contremaîtres se prêteront mutuellement aide et assistance, en cas de besoin. Bien qu'ayant toute confiance en ces deux contremaîtres, nous ne pouvions songer à laisser l'un d'eux à la tête de l'agence, ni l'un ni l'autre n'ayant de notions comptables. Le Haut-Commissariat nous ayant chaudement recommandé un M. Emile Saida, Syrien, dont un frère est drogman au Haut-Commissariat, nous l'avons, après examen favorable, engagé comme caissier-comptable, aux appointements de début de £.E.10 par mois.
Tout ce qui précède n'est toutefois qu'un embryon d'organisation, et en attendant l'arrivée de M. de Fleurac, dont la démobilisation rapide sera sans doute facilitée par la signature de l'armistice, il importe que nous ayons un employé de confiance pour gérer la succursale de Beyrouth jusqu'à l'arrivée du titulaire. Nous avons déjà fait les démarches nécessaires pour que M. Golubzow puisse partir à bref délai, après avoir pris la précaution de nous faire donner par l'amiral Varney une lettre attestant que sa présence est nécessaire à Beyrouth pour les besoins de la Marine. Nous espérons qu'il pourra partir d'ici quelques jours et que son intérimat sera de courte durée. M. Golubzow pourra régler toutes les questions pendantes, entre autres, celle d'un contrat définitif avec une entreprise de déchargement, contrat qui de toutes façons ne couvrira qu'une période de trois mois, avec clause de renouvellement pour une période identique après accord entre les parties contractantes. Il aura aussi à régler la question du gabarage et pour le charbon et pour les marchandises, dont la solution est assez ardue.
Gabarage à Beyrouth. Nous nous sommes préoccupés de cette question dès notre arrivée. Il existe à Beyrouth une centaine de mahonnes en bois, qui sont restées à terre pendant ces quatre années de guerre, et dont probablement un bon tiers n'est pas réparable. La capacité de ces mahonnes varie entre 12 et 50 tonnes, la moyenne étant de 20 à 25 tonnes.
Le tonnage disponible après réparations serait donc d'environ 1.500 tonnes, mais le pays est absolument dépourvu de matériaux de calfatage, étoupe, brai et goudron, et les ouvriers calfats ont presque entièrement disparu.
L'Amirauté britannique a mis la main sur ce qu'il y avait de meilleur et a entrepris elle-même les réparations, tout en interdisant aux propriétaires de mahonnes de disposer de leurs embarcations soit par vente soit par location, sans son autorisation.
L'accord avec la Marine, nous avons fait marquer à son nom 8 mahonnes de l'entreprise Chrairo, dont 4 d'une capacité totale de 72 tonnes sont à flot et quatre autres de même tonnage sont en réparations.
Ces 8 allèges ont pu ainsi être soustraites à la réquisition britannique, mais elles sont insuffisantes, et quand nous voulûmes débattre avec d'autres propriétaires les conditions d'achat ou de location, nous nous sommes heurtés au règlement de l'Amirauté britannique. Ayant fait appel à l'amiral Varney, celui-ci a immédiatement écrit au colonel de Pièpape, administrateur en Chef des territoires occupés de la zone Nord, pour nous faire donner satisfaction, mais au moment de notre départ, c'est-à-dire quatre jours après l'envoi de sa lettre, l'amiral Varney attendait toujours une réponse. Nous pensons que notre Haut-Commissariat en Syrie, M. Picot, arrivé à Beyrouth le 6, et reparti pour Jérusalem le 7 au matin, aura discuté cette question, parmi tant d'antres, avec le général Allemby, de qui le colonel de Pièpape tient ses pouvoirs d'administrateur en chef.
Il importe avant tout de fournir au propriétaires de mahonnes les moyens de remettre leurs allèges en état, et nous nous employons à expédier à notre succursale de Beyrouth quelques barils de goudron et de l'étoupe en quantité suffisante, dans ce but.
Finance. La question monétaire nous a causé de sérieuses difficultés pendant notre séjour à Beyrouth. On nous avait dit avant notre départ (renseignement du Trésor et Postes) que le papier français avait cours en Syrie, et nous nous étions munis de quelques milliers de francs en billets de banque français pour parer au plus pressé. Un de nos bons amis, le sous-intendant Copin, secrétaire général de l'administrateur en chef, que nous avions sondé à ce sujet, nous avait dit le jour de notre arrivée à Beyrouth, qu'on avait en effet décidé de décréter le cours forcé des papiers égyptien, français et anglais, mais qu'en haut lieu on n'était pas encore tombé d'accord sur l'équivalence à appliquer au papier turc, dont les billets d'une livre ne valaient plus alors qu'environ 4 F 50.
L'Armée et la Marine tenaient à imposer le cours du billet de banque français, ce qui était fort naturel, et c'est alors que nous avions demandé à Port-Saïd de nous faire ouvrir un crédit de F 25.000 auprès de la Banque ottomane, qui continuait à fonctionner, mais qui, nous ne le sûmes que plus tard, n'avait pas de fonds à sa disposition. Port-Saïd ne voyant pas la possibilité de nous faire tenir des fonds par la Banque ottomane, acheta un mandat de F 25.000 payable par le Trésor et Postes à Beyrouth, mais dans l'intervalle nous avions demandé à l'amiral Varney de télégraphier à Port-Saïd de nous faire tenir £.E.1000 par pli confié à un torpilleur ou chalutier, et l'amiral nous ayant confirmé le désir de voir le papier français affluer sur place, nous avons été amenés à modifier notre télégramme et à demander à Port-Saïd des billets de banque français au lieu de billets égyptiens. Toujours est-il que Port-Saïd a crû que nous voulions deux fois vingt-cinq mille francs, et que nous avons ainsi reçu à Beyrouth 50.000 francs en billets français. Mais, dans l'intervalle, le colonel de Pièpape avait fait paraître dans le journal de Beyrouth du 4 ct, ci-inclus, un arrêté relatif aux monnaies ayant cours dans les territoires occupés de la zone Nord, dont la teneur équivaut à l'imposition du seul papier égyptien dans lesdits territoires. Le lendemain de cet arrêté, à la consternation de tous les milieux français, notre billet de banque subissait en ville une dépréciation de 30%, et le papier turc tombait à zéro. Nous avons donc dû câbler à nouveau à Port-Saïd pour demander l'envoi de £.E.1000 en petites coupures, et ce groupe a été reçu par notre succursale de Beyrouth depuis notre départ. Nous n'avions d'ailleurs laissé à Beyrouth que 10.000 francs en papier français, M. Roussel ayant ramené le solde.
Cette question du cours du papier français devait être l'objet des préoccupations immédiates de M. Picot, et nous espérons que notre Haut-Commissaire aura pu la solutionner à l'avantage des intérêts français.
Il est à souhaiter d'autre part qu'un de nos grands établissements de banque, Comptoir d'escompte ou Crédit lyonnais ouvre au plus tôt une succursale à Beyrouth, opinion que nous formulions dans le télégramme que nous vous avons adressé de Beyrouth le 26 octobre.
M. de Fleurac. Toutes les personnalités que nous avons vues à Beyrouth à l'exception du colonel de Pièpape, pensent avec nous qu'il est indispensable que ce soit un Français qui dirige l'agence de Beyrouth.
Le colonel de Pièpape a traité cette question assez cavalièrement ; d'après lui, nous n'avions qu'à prendre quelqu'un dans le pays même et il s'est refusé à appuyer la demande de démobilisation de M. de Fleurac, allant jusqu'à nous demander si nous nous attendions à ce qu'il nous donnât un de ses officiers. Nous n'avons pas insisté.
Du côté de l'amiral Varney, on nous a fait comprendre à demi mot que la Marine n'aimait guère intervenir auprès de la Guerre, et que du train dont marchaient les événements, la démobilisation de notre employé serait accordée sans difficultés. Ayant ainsi tâté le terrain, nous ne pouvions guère demander à l'amiral d'appuyer notre demande, et nous espérons que la mise en sursis que vous avez demandée sera favorablement accueillie, malgré l'absence de tout appui des autorités de Beyrouth.
M. de Fleurac au cours de sa déjà longue carrière chez nous, a fait plusieurs intérims d'agent, notamment à Zanzibar et à Alexandrie, et nous sommes certains qu'il fera parfaitement l'affaire à Beyrouth.
Possibilités de Beyrouth. Il est bien entendu que tant que le blocus ne sera pas levé, il ne saurait être question de faire des opérations pour notre compte à Beyrouth. Notre activité doit donc pour l'instant se borner aux seules manutentions de charbons et de vivres de la Marine et de l'Armée. Beyrouth n'a jamais été un port de charbonnage et nous ne pensons pas qu'elle le devienne jamais, car les lignes faisant les Echelles du Levant toucheront nécessairement à Alexandrie ou à Port-Saïd, où elles charbonneront à meilleur compte et dans de bien meilleures conditions de rapidité.
De l'enquête que nous avons menée sur place, nous pouvons conclure que les perspectives de vendre du charbon sur place ou dans l'intérieur sont peu engageantes. La Société des tramways électriques de Beyrouth consommait avant la guerre de 30 à 40 tonnes d'anthracite par mois et à peu près la même quantité de coke pour l'alimentation de ses moteurs à gaz pauvre. Depuis la guerre, elle se sert de charbon de bois de pin, mais va faire un essai avec les charbons Yorkshire et d'Écosse ex-"Océanien", la municipalité de Beyrouth à qui la Marine fait une cession d'environ 400 tonnes de ces charbons lui en ayant promis 40 tonnes.
Cette Société recevait d'ailleurs son charbon directement d'Angleterre et il en était de même de la Compagnie du gaz, et de la Compagnie des tramways libanais (à vapeur) et du chemin de fer, dont nous n'avons pu connaître les consommations respectives. Dans l'intérieur, on se sert à peu près uniquement de charbon de bois pour les usages domestiques et industriels.
Nous croyons que le port de Beyrouth est susceptible de développement. Il suffirait de construire une autre jetée partant de la pointe de la Quarantaine pour en faire un port suffisamment vaste, et ceci a déjà retenu l'attention de l'amiral Varney. Tel qu'il est actuellement, le port de Beyrouth est vraiment trop exigu et ne répond probablement pas aux possibilités économiques de la contrée.
Asiatic Petroleum Co. Au cours de notre séjour à Beyrouth, nous n'avons pas perdu de vue la question de réserver pour nos amis de Londres un terrain suffisamment vaste à destination d'installation de pétrole.
Malheureusement, il n'y a aucun terrain disponible dans le périmètre des quais, que longent partout des constructions, et nous ne voyons pas la possibilité pour l'instant de trouver un site susceptible d'être relié avec le port actuel et pouvant convenir à l'érection d'une installation d'une certaine importance. Toutefois, si l'on décide par la suite d'agrandir le port jusqu'à la pointe de la Quarantaine, il n'y aura alors que l'embarras du choix.
Il nous revient que les Anglais qui, avec leur esprit pratique, songent avant tout à la mise en valeur du pays au point de vue économique, ont décidé de faire un grand port entre la pointe du Carmel et Saint-Jean d'Acre.
Ce port, dont les travaux seraient déjà en voie d'exécution, engloberait les rades foraines de Caiffa et de Saint-Jean d'Acre. Il est possible que ce soit là le port où l'Asiatic pourrait avoir son installation principale pour rayonner sur la Palestine et la Syrie.
Manutentions de charbon de la Marine. Nous vous remettons sous ce pli copie de notre lettre au chef d'état-major de la division navale de Syrie lui soumettant nos tarifs de manutentions de charbon. Nous n'avions pas sa réponse officielle au moment de notre départ de Beyrouth, mais le chef d'état-major nous a dit verbalement que la chose était en régie.
Manutention de l'Armée. Vous trouverez sous ce pli les doubles de nos lettres au commandant de la base française et au chef d'état-major de la division navale de Syrie. Il était entendu que nous soumettrions nos prix au commandant de la base, chargé des approvisionnements du DFPS, mais au dernier moment cet officier supérieur nous a dit que la Marine se chargeait de toutes ces opérations pour compte de l'Armée, et c'est ainsi que le comprenait le général Hamelin dans une lettre qu'il écrivait à l'amiral Varney. Nous fûmes alors voir ce dernier, qui nous assura qu'il y avait malentendu et qu'aucun arrangement de la sorte n'avait été fait entre l'Armée et la Marine. Chacune des parties intéressées paraissant vouloir rester sur ses positions et la question n'ayant pas été tranchée la veille de notre départ, nous nous sommes décidés à écrire aux deux services.
Situation politique. Nous nous sommes trouvés à Beyrouth en pleine période d'organisation militaire, sous le commandement suprême du général Allemby, avec le colonel de Pièpape comme administrateur en chef des territoires occupés de la zone Nord soumis à l'influence française, un chef de bataillon comme gouverneur militaire du vilayet de Beyrouth, un autre chef de bataillon comme gouverneur militaire de la ville de Beyrouth, divers capitaines ou lieutenants comme gouverneurs des vilayets du Liban, de Tyr, Sidon, Tripoli, Latakié, etc. Tous ces officiers sont certes remplis de bonne volonté, mais peu préparés à exercer à l'improviste des fonctions de ce genre, et vous pouvez aisément vous imaginer la fantaisie et l'incohérence qui régnent dans l'administration militaire du pays. D'autre part, il y a des tiraillements continuels, de profondes divergences de vues entre l'administration militaire française, le Haut-Commissariat, la Marine française et les services britanniques, et bien des problèmes urgents restent ainsi insolutionnés, faute d'entente ou de décision.
La ville de Beyrouth a matériellement peu souffert de la guerre, mais la population se trouve aujourd'hui réduite d'un bon tiers. Les classes pauvres ont particulièrement souffert, on peut même dire sans exagération qu'elles ont été les seules à souffrir de la faim. En revanche, les Syriens de classe aisée ou moyenne ne paraissent jamais avoir manqué de rien et sont encore approvisionnés pour de longs mois, et on leur reproche avec raison de n'avoir absolument rien fait pour venir en aide aux gens moins fortunés, qui sont morts par milliers, de faim et de privations. Il mourait encore deux ou trois cents personnes par jour à Beyrouth quand nous y sommes arrivés, et beaucoup de ces malheureux, de véritables squelettes ambulants, ont atteint un tel degré de misère physiologique que la nourriture qu'on peut leur donner ne fait que précipiter le terme fatal de leurs souffrances sans nom. Le docteur Pierre de l'"Ariane" et le père de Martinprey, f.fons [sic] de commissaire à bord du yacht amiral, ont organisé avec le plus grand dévouement des soupes populaires et des secours de toutes sortes, mais l'administration militaire proprement dite paraît se désintéresser complètement du sort des malheureux. Ainsi, un envoi urgent de vivres, qui devait être embarqué sur le "Maroc" à Port-Saïd, sur ordre du Haut-Commissariat, a été décommandé par le général Hamelin, qui a fait charger en lieu et place du matériel destiné au DFPS.
Nous avons trouvé auprès de l'amiral Varney l'accueil le plus sympathique et tous les appuis possibles. Le sous-intendant militaire Copin, secrétaire général de l'administrateur en chef des territoires occupés, nous a énormément facilité notre tâche en nous aiguillant dans les directions voulues et en nous prêtant son actif concours. Il faut dire que c'est un ami personnel de M. Roussel. Ce dernier est resté à bord de l'"Océanien" pendant toute la durée du séjour à Beyrouth et il vous serait reconnaissant de vouloir bien remercier officiellement la Compagnie des Messageries maritimes pour toutes les prévenances et attentions dont le commandant Martineau l'a comblé.
Les Messageries maritimes ont réouvert leur agence à Beyrouth pendant que nous installions notre succursale. L'agent général à Alexandrie, M. Labussière, doit s'y rendre incessamment.
Veuillez agréer, Messieurs, nos bien sincères salutations.
[Signature illisible]
P.S. Nous recevons à l'instant votre dépêche urgente du 13, suivant copie ci-incluse. Nous ne croyons pas qu'il soit possible pour l'instant d'obtenir d'autres terrains que celui qui nous a été alloué. Le meilleur terrain est sans nul doute celui marqué C sur le plan, mais il est réservé aux seules opérations des armées française et britannique, avec la stipulation qu'il doit être tenu constamment dégagé. L'amiral Varney nous a promis que ce terrain nous reviendrait dès que les armées britannique et française n'en auront plus besoin, mais comme Beyrouth est le seul port abrité de la côte ou l'on puisse faire des opérations pendant la mauvaise saison, et que d'autre part on parle d'y envoyer un corps français d'occupation de 20.000 hommes, il se passera certainement des mois avant que ce terrain, qui peut avoir de 5 à 6.000 mètres carrés, nous soit affecté. Quant à acheter d'autres terrains, même non en bordure du port, il n'y faut pas songer pour la bonne raison qu'il n'en existe pas, les maisons se pressant les unes sur les autres depuis le rivage jusqu'au sommet de la colline sur laquelle est bâtie Beyrouth.
Il y a bien quantité de terrains disponibles entre le môle Nord et la Quarantaine, mais là, le rivage est très escarpé (falaises de 12 à 20 mètres) et la houle, constante dans la baie, y rend impossible toute opération de déchargement.
Tout manque d'ailleurs à Beyrouth, où les moyens de transport, chevaux, mulets, voitures, charrettes, etc., ont à peu près disparu. La contrée a été systématiquement déboisée, et le bois y est rare et hors de prix. Il faut donc tout improviser et se contenter pour l'instant des très faibles moyens dont le pays dispose. Pour l'entreposage éventuel de marchandises, nous n'avons pas à nous en préoccuper en ce qui concerne le ravitaillement des troupes, ces marchandises devant être enlevées par camions automobiles au fur et à mesure de leur déchargement à quai, et l'Armée disposera de vastes hangars démontables pour leur entreposage. En ce qui concerne les marchandises privées, elles devront aller en douane et les entrepôts douaniers de Beyrouth sont très vastes, beaucoup plus vastes et mieux compris que ceux de Port-Saïd. Les bombardements aériens en ont très endommagé la toiture en tuiles, mais les réparations pourront être exécutées à bref délai, la tuile abondant dans le pays, où elle est d'ailleurs fabriquée.
D'autre part, pendant la période de transition actuelle, il doit être à peu près impossible d'acheter terrains ou propriétés, vu la difficulté de prouver les titres de propriété, et nous savons que les gouverneurs locaux sont journellement saisis de contestations entre particuliers précisément pour des questions de propriété qui paraissent des plus complexes à résoudre.
Nous vous avons déjà longuement entretenu de la question des mahonnes et barques indigènes. Il nous faut attendre patiemment que celles qui sont réparables soient réparées et que les communications soient établies avec les petits ports de la côte pour pouvoir aller examiner, en vue de leur achat éventuelles barques ou goélettes qui peuvent s'y trouver. Il ne faut pas non plus oublier que le port de Beyrouth est grand comme un mouchoir de poche, que les moyens de remorquage y sont très primitifs, tout se faisant à la nain ou au moyen d'amarres. Il est possible que par la suite nous puissions trouver à acheter en Égypte des dhows qui pourraient servir d'alléges à Beyrouth, lorsque toutes les barques indigènes seront déréquisitionnées. De toutes façons il faudrait attendre la bonne saison pour en envoyer à Beyrouth.
Il est utile que nous vous disions que les Messageries maritimes à Beyrouth ont toujours fait elles-mêmes leurs opérations de déchargement et d'embarquement, qu'elles confiaient à une entreprise indigène, en réalisant de sérieux bénéfices, et nous ne pensons pas qu'elles aient l'intention de se départir de ces méthodes.
L'"Océanien" a été le seul vapeur que nous ayons eu à décharger à Beyrouth. Nos journaliers de Port-Saïd ont déchargé la cargaison et l'ont livrée sous palan. La Marine avait engagé elle-même des équipes de terre, et nous ne pouvions guère intervenir dans les arrangements qui avaient été faits avant notre arrivée. Le reste, étant donné l'insuffisance et la médiocrité de la main d'œuvre de terre, nous n'aurions pas mieux fait que la Marine, tout en assumant sans préparation des responsabilités que nous n'avons pas eu à encourir. Vous nous parlez de l'"Australien", mais autant que nous le sachions, ce vapeur a été coulé il y a environ trois mois. On nous a dit à Beyrouth que la base devait recevoir 3.000 tonnes de ravitaillement (de Marseille) par mois, mais nous ne pensons pas que le premier chargement soit encore arrivé.
Il y aura également à manutentionner le matériel de la base de Ludd qui doit être transféré à Beyrouth, voie Port-Saïd, mais ce matériel (de 3 à 4.000 tonnes) n'est pas encore arrivé à Port-Saïd, et le tonnage pour son transport paraît faire encore défaut. Nos opérations de marchandises à Beyrouth vont donc se borner pendant quelques semaines à décharger de petits lots de 200 à 300 tonnes, arrivant par goélettes ou chalutiers.
M. Golubzow, qui, nous pensons, pourra partir au commencement de la semaine prochaine, avisera sur place aux meilleurs moyens de tirer partie d'une situation qui est pour l'instant aussi obscure que difficile.
En attendant que cette situation s'améliore progressivement, il faut compter que les opérations seront très lentes, ce dont les autorités de Beyrouth se rendent d'ailleurs parfaitement compte.

[Signature illisible]


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