1918.02.19.De Worms et Cie Le Havre.Au ministre de la Marine

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Le Havre, le 19 février 1918
Service central de l'intendance maritime
Monsieur le ministre de la Marine - Paris

Bureau des approvisionnements de la flotte des transports généraux et des affrètements
Retards dans l'exécution du contrat des transports de charbon anglais sur Brest.

Monsieur le ministre,
Nous avons bien reçu en son temps votre lettre du 11 courant adressée à notre siège social et par laquelle, après avoir rappelé qu'aux termes du contrat passé avec votre département le 26 septembre 1916 et modifié par acte additionnel du 6 novembre 1917, nous devions assurer entre le Pays de Galles et le port de Brest un transport mensuel de 6.000 tonnes de charbon, vous nous faites remarquer que les apports réalisés pendant les mois de novembre, décembre, et janvier accusent un déficit de 7.469 tonnes. Vous nous demandez en outre de vous faire connaître les mesures que nous avons prises ou que nous comptons prendre pour combler ce déficit.
Sans nous arrêter à ces chiffres qui ne correspondent pas exactement à ceux que de notre côté nous avons enregistrés, nous nous bornerons à constater que cet état de choses vient de circonstances de guerre et que par suite on ne peut, en équité, nous faire grief de retards dont la cause nous est étrangère.
Dans le cours du mois de novembre, nous avons fait un voyage par "Barsac" de 2.300 tonnes.
2 voyages par "Séphora-Worms" à 1.800 T chacun, soit 3.600 T
Total : 5.900 tonnes, soit à très peu près, le chiffre prévu par le contrat.
En décembre, notre vapeur "Séphora-Worms" par suite de défectuosités dans l'arrimage de la cargaison, défectuosités imputables aux services de M. le mécanicien principal chargé des combustibles à Cardiff, a subi en cours de voyage, des avaries graves qui ont nécessité son immobilisation à Brest pendant 21 jours. Les dommages matériels ont été réparés par les soins de la direction des Constructions navales mais en formulant nos réserves à M. le major général à Brest, nous avions eu soin de faire ressortir que le préjudice en résultant serait supporté intégralement par la Marine puisque nous ne pouvions disposer d'aucun autre navire pour assurer, en remplacement de "Séphora-Worms" les voyages de charbon prévus en exécution de notre contrat. Pour cette raison l'apport du mois de décembre n'a été que de 1.800 tonnes.
En janvier, "Séphora-Worms" libéré a fait un voyage de 1.800 tonnes
"Pontet-Canet" et "Haut-Brion" ont apporté chacun 1.200 tonnes soit 2.400 tonnes.
D'après nos prévisions, les voyages de ces deux derniers navires auraient dû être exécutés en décembre mais par suite des retards dus à la navigation en convoi, ils n'ont pu être libérés momentanément de leur service de cabotage qu'une quinzaine de jours environ après la date fixée.
Dans le courant de ce même mois de janvier, nous avons perdu par torpillage, à quelques heures d'intervalle deux vapeurs : "Barsac" et "Château-Lafite". Le premier avait jusqu'alors assuré conjointement avec "Séphora-Worms" une navigation régulière entre le canal de Bristol et Brest.
La situation de notre armement au point de vue de la diminution du tonnage est devenue telle que nous ne pouvons plus assurer l'exécution du contrat pour lequel nous nous étions engagés le 26 septembre 1916 et nous devons vous demander une réduction sensible de nos charges. La justification de cette demande se trouve démontrée d'une façon particulièrement frappante par l'examen du tableau que nous mettons sous vos yeux et qui dénombre le chiffre de nos pertes.
Nous ne croyons pas qu'un autre armement français ait été aussi durement frappé que nous l'avons été.
C'est donc à votre équité que nous faisons appel pour être libérés d'obligations que nous ne sommes plus à même d'assurer.
Veuillez agréer, Monsieur le ministre, l'assurance de notre haute considération.


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