1973.09.04.De la Compagnie des chargeurs réunis.Au directeur général du service maritime Worms

Le PDF est consultable à la fin du texte.

Paris, le 4 septembre 1973

Monsieur J. Bucquet
Directeur général du service maritime
Worms
50 boulevard Haussmann
75 – Paris 9e

Monsieur le directeur général,
Manutention des containers au Havre
Comme nous vous l’avons exposé au cours de notre entretien d’hier, nous pensons que l’organisation de la manutention des containers au Havre approche d’un tournant décisif. En effet, les USL ont annoncé leur intention de quitter le quai de l’Atlantique pour le quai de l’Europe et la surface que cette compagnie occupe à côté de nos installations va donner lieu à répartition entre les utilisateurs.
Par ailleurs, le Gamac ne sera plus opérateur au quai de l’Europe et par conséquent il n’y aura plus que deux manutentionnaires au quai de l’Atlantique : la CNM et la CMCR.
Le problème de la manutention des containers au Havre a donné lieu depuis de longs mois à de multiples échanges de vue entre vous et nous, et si nous avons toujours réticents pour participer au Gamac, c’est en grande partie à cause de votre hostilité et de la perspective d’une entreprise commune à nos deux sociétés. Il nous était par ailleurs impossible de traiter avec la CNM puisque nous étions en concurrence avec elle et en divergence de vue avec son président en tant que manutentionnaire national.
Les partenaires de la Somaba se sont refusés à investir dans du matériel pour containers qui ne devait servir qu’à la CMCR dans un avenir immédiat, et c’est donc seuls que nous avons entrepris l’achat des transtainers et des remorques nécessaires pour plus de deux millions, avec l’idée que vous joindriez prochainement vos efforts aux nôtres. Or, tout en investissant tant en hommes qu’en matériel, nous avons continué à passer par la Somaba pour le recrutement des équipes de dockers, si bien que nous avons procuré à celle-ci plus de 37.500 shifts pour la manipulation des containers. Ceci est d’ailleurs conforme aux statuts de la Somaba qui précisent que la société a pour objet « toutes opérations de manutention se rapportant aux transports terrestres, fluviaux et maritimes ». D’ailleurs, la Somaba a été créée sans discrimination catégorielle de marchandises ou de conditionnement pour réaliser le maximum de shifts de façon à optimiser les coûts.
Sur ce premier point, nous ne partageons donc absolument pas l’avis que vous avez formulé dans la lettre que vous avez adressée au président de la Somaba en date du 23 juillet.
Vous avez estimé que nous n’étions pas susceptibles de satisfaire la Johnson Line, surtout en raison du manque de place. Cette situation va cesser dans quelques semaines et nous vous affirmons que nous aurions pu répondre aux exigences de la Johnson qui jusqu’à présent n’a embarqué que peu de containers, et nous aurions pu bâtir ensemble un accord de répartition des bénéfices escomptés tout aussi favorable que celui obtenu de monsieur Brasseur et dont vous nous avez fait part.
Vous nous annoncez maintenant que les AEL dont vous êtes l’Agent général en France, quitteraient le Gamac et confieraient leur manutention à la CNM. Nous ne comprenons pas que vous n’ayez pu au moins demander aux AEL de nous consulter.
Par ailleurs, on va aboutir à la situation suivante : des shifts qui auraient dû normalement être procurés par la Somaba, vont lui échapper en plus de ceux de la Johnson. Comment aurait réagi la société Worms si nous avions recruté pour nos containers des dockers en dehors de la Somaba ? La répercussion pécuniaire pour chacun des participants de la Somaba n’aurait pas été négligeable.
Que peut-on faire pour dénouer cette situation ?
Votre directeur du Havre a demandé au port 5.000 m2 pour la Johnson Line. Nous pensons que toute démarche séparée crée la confusion dans l’esprit des dirigeants du port autonome et nous souhaitons par conséquent que nos représentants locaux se mettent d’accord pour réaliser un front commun en ce qui concerne le quai de l’Atlantique. Il nous serait difficile d’admettre que la surface de la Johnson soit accordée au détriment des aires que nous réclamons.
Nous aimerions avoir confirmation que vous êtes toujours décidés à participer à une société ou à un GIE destinés à manipuler les containers au Havre avec emploi d’équipes Somaba.
S’il ne vous est pas possible d’orienter les AEL vers une entité de manutention de containers réalisée entre vous et nous, quelle compensation pensez-vous donner à la Somaba pour votre infraction à son esprit et à ses statuts ?
Nos sociétés ont jusqu’à présent réaliser suffisamment d’affaires en commun pour nous permettre d’espérer que nous parviendrons à trouver un terrain d’entente en ce qui concerne la manipulation des containers au Havre.
Entre le 1er janvier et fin août, nous avons manipulé 9.530 containers. En joignant votre potentiel commercial au nôtre, nous atteignons la taille suffisante pour constituer une force respectable et dépasser le niveau de rentabilité. Traiter par « petits paquets » avec la CNM et séparément de nous, nous semble une voie dangereuse et contraire à l’effort de rassemblement entre les manutentionnaires nationaux poursuivi par le président Labbé.
Nous vous prions d’agréer, monsieur le directeur général, l’expression de nos sentiments les plus distingués.

Signé P. Raoust
 

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