1944.10.18.De B. Pathé.Au juge Georges Thirion.Témoignage

Copie

Réf. Affaire Le Roy Ladurie

Paris, le 18 octobre

Monsieur,
Je crois de mon devoir de porter à votre connaissance les faits suivants concernant Monsieur Le Roy Ladurie. Ils me paraissent mériter d'être joints au dossier de l'inculpé et à sa décharge.
Comme conséquence de mon activité résistante dans un groupe clandestin de renseignements, j'ai été arrêtée par les autorités allemandes le 25 septembre 1942 et incarcérée à la Santé puis à Fresnes. Tous les membres de ce groupe qui furent pris à cette même époque, furent exécutés ou déportés sauf moi.
Mademoiselle Le Roy Ladurie et ma fille étaient amies de pension. Sur la simple intervention de ces enfants, (la famille Le Roy Ladurie et la mienne ne se connaissant pas du tout et n'ayant même aucune relation commune) Monsieur Le Roy Ladurie recommanda de prendre Maître Kraeling pour me défendre et offrit spontanément de s'adresser à quelque autorité que conseillerait l'avocat pour intervenir en ma faveur, bien qu'il n'ignorât pas la gravité de l'accusation que la Gestapo faisait peser sur moi.
Sans que je puisse l'affirmer, il est possible que des démarches de Monsieur Le Roy Ladurie aient pu influer sur la décision du juge d'instruction allemand de me remettre en liberté, sans jugement, le 13 novembre suivant, usant à mon égard d'une bienveillance évidente dès mon troisième interrogatoire.
Je tiens à préciser que mon témoignage se limite strictement aux faits ci-dessus relatés dont je garantis l'authenticité.
Je pense que l'empressement que Monsieur Le Roy Ladurie mit à user de son influence pour défendre la cause d'une inconnue qu'il savait être farouchement résistante, laisse supposer que je ne suis pas la seule à avoir bénéficié de son intervention et je crois que ceci doit être connu de ses juges.
Par ailleurs, j'ignore totalement qu'elle a pu être l'attitude ou l'activité de Monsieur Le Roy Ladurie et ne saurai faire aucune déclaration à ce sujet.
Veuillez croire, Monsieur, à l'expression de ma considération très distinguée.

B. Pathé


Back to archives from 1944