1944.07.00.Rapport (sans émetteur).Synarchie

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Date : Juillet 1944
Source : Alon 3.105/3E

Rapport sur la société secrète polytechnicienne dite Mouvement synarchique d'empire - MSE - ou Convention synarchique révolutionnaire
Chapitre 1 - Généralités

- Document fondamental
Cette société secrète relie les individus ayant adhéré à la convention synarchique révolutionnaire (CSE) ou encore, ce qui est entièrement équivalent, au mouvement synarchique d'empire (MSE).
Ses buts apparents sont exposés dans un document ronéotypé de plus de cent pages, format grand in. 8, pourvu d'une reliure de grand luxe, constituée par un brochage fort de papiers dorés.
- Les buts apparents du MSE
Le document fondamental énonce les treize points fondamentaux et les 598 propositions de la SSSE. Le but déclaré du MSE est d'instaurer dans l'empire français un régime synarchique approprié (page 6 du document). La notion de synarchie n'y est cependant pas définie, et de cet étrange document se dégage une impression de complexité et d'obscurité qui semble voulue.
- Date de la création du MSE
Le MSE est né en 1922, "du besoin de définir par la pensée, par l'expérience et par l'action le sens de l'actuelle révolution mondiale". Corrélativement, il y a lieu de noter que le fascisme italien a été fondé à Milan le 13 mars 1919, et que le 27 octobre 1922 les fascistes ont effectué leur marche sur Rome.
- Analyse de quelques propositions fondamentales
La proposition n°80 élève un violent réquisitoire contre le parlementarisme français, ce pot pourri politique issu de la constitution de 1875. Il lui est notamment reproché d'être "un régime de parasitisme et de laisser-aller qui a détendu les ressorts de l'État jusqu'à mettre en péril les destinées françaises, régime d'impéritie gouvernementale et de routine, incapable d'ailleurs de se rénover lui-même, non plus que d'offrir au peuple les ressources politiques et les installations scientifiques nécessaires au redressement révolutionnaire imposé par les bouleversements mondiaux".
Quant à la proposition 83, elle reconnaît que le bolchevisme convient actuellement aux peuples eurasiens "comme le fascisme au peuple italien, le nazisme au peuple germanique, le parlementarisme au peuple britannique, etc."
- Origine historique de la notion de synarchie
La notion de synarchie qui s'oppose à celle d'anarchie a été employée pour la première fois vers 1860, par Saint-Yves d'AIveydre, dans son ouvrage "Mission des Juifs". L'auteur y précise notamment page 443, "ainsi la forme de gouvernement instituée par Moïse, sur le conseil, sur l'ordre que lui donne son initiateur Jethre, au nom de Ievre, est bien la synarchie, c'est-à-dire trois pouvoirs sociaux dont aucun n'est politique". La forme synarchique de gouvernement serait donc d'origine divine et issue de la révélation mosaïque."
- La curieuse personnalité de Saint-Yves d'Alveydre
Saint-Yves fut polytechnicien de la promotion 1842 -vivement épris d'occultisme, il a acquis un certain renom à l'époque. Devenu marquis d'Alveydre par décision pontificale, Saint-Yves fut en outre franc-maçon, puis martiniste. II devint même en 1889, grand maître de l'ordre martiniste, charge dans laquelle Papus (le docteur Encausse) devait lui succéder à son décès.
II épousa la veuve morganatique d'Alexandre II. Sous le nom de Saint-Yves d'Alveydre, il publia en 1860 et 1890, plusieurs importants ouvrages imprégnés de prophétisme, notamment "Mission des Souverains" par l'un d'eux, "Mission des ouvriers", "Mission des Juifs", etc.
Le MSE est-il le réveil du synarchisme de Saint-Yves ?
En aucune façon. Le mouvement synarchique dessiné à la fin du siècle dernier par Saint-Yves d'Alveydre, n'est qu'un vieil habit sorti pour la circonstance d'une garde-robe poussiéreuse en vue de reconstituer, de camoufler un mouvement de pensée entièrement différent et nouveau.

Chapitre II - Forme de l'Affiliation

L'affiliation martiniste est la plus secrète qui existe. Elle se fait d'homme à homme, selon les rites particuliers, le nouvel initié étant seul, face à face avec son interlocuteur. Chaque nouvel initié reçoit deux numéros, le sien et celui de son initiateur. Ce mode de recrutement s'appelle "l'affiliation par chaîne" et il est spécifiquement martiniste. Il en résulte que chaque membre ne connaît du groupement auquel il appartient que son initiateur et les quelques sujets qu'il lui a été permis d'initier lui-même.
Un tel ordre de recrutement présente notamment un avantage et un inconvénient majeur : d'une part, l'avantage de réaliser un secret à peu près parfait, d'autre part, de permettre des immixtions malheureuses donnant ultérieurement naissance à des chaînes d'esprit dissidentes.
- L'affiliation du MSE est-elle du type martiniste ?
Dans l'affiliation du MSE, l'initiateur remet au nouvel adhérent un exemplaire du document fondamental, que ce dernier revêt de sa signature ; ce document porte deux numéros : celui de l'initiateur et celui de l'initié. Cette affiliation spécifiquement martiniste accrédite la probabilité du lien qui existe entre le MSE et l'ordre dont Saint-Yves d'Alveydre était le grand maître en 1889.
- Rapport entre le MSE et l'ordre des martinistes
La nature des rapports existant entre le MSE et l'ordre des martinistes ne peut donner lieu qu'à trois hypothèses :
- première hypothèse : le MSE est le martinisme vrai,
- deuxième hypothèse : le MSE a imité le martinisme,
- troisième hypothèse : le MSE est une dissidence du martinisme.
Cette dernière hypothèse est la plus vraisemblable.

Chapitre III - Rapports du MSE avec M. Jean Coutrot et avec le CSAR

Monsieur Jean Coutrot fut un des dirigeants du MSE.
Monsieur Jean Coutrot est certainement un membre et un membre dirigeant. Notre affirmation repose sur trois faits :
1/ l'exemplaire du document fondamental de cette secte parvenu entre nos mains émanait d'un familier de Jean Coutrot,
2/ la lecture attentive de ce document permet d'y retrouver à chaque page la terminologie si spéciale de Coutrot, les formes verbales qui caractérisent ses écrits d'une façon si caractéristique. De toute évidence, Coutrot a collaboré à la rédaction du document, s'il ne l'a pas lui-même assurée tout entière,
3/ trois semaines environ après le décès de Coutrot, le journal hebdomadaire "L'Appel", du 5 juin 1941, a publié l'entrefilet suivant : "Mort subite et mystérieuse. Il y a quelques jours est mort subitement à Paris, 51, rue Raynouard, un certain J. Coutrot. Ce M. Coutrot avait joué un rôle important dans la néfaste politique de Pierre Cot et Guy La Chambre et autres saboteurs de notre aviation. Oui, ce Jean Coutrot ayant beaucoup trafiqué dans l'aviation, n'appartenait-il pas à la plus secrète et nocive des loges maçonniques, la Synarchie ? Cela expliquerait peut-être sa mort mystérieuse."
Le rédacteur de cette note, visiblement, ne disposait que de renseignements médiocres et partiellement inexacts. Toute correction faite, d'évidente exactitude, Coutrot, il est bien affirmé, appartenait au mouvement synarchique d'empire.
- M. Jean Coutrot et le CASR
Dans les milieux polytechniciens, des ministres des Finances et de l'Éducation nationale, Coutrot passait pour cagoulard. Le fait nous fut confirmé en 1937 et en 1938, confirmé par P. I. ; le 9 juin 1941, au cour d'un déjeuner, sur l'étrange activité de Coutrot depuis une dizaine d'années.
Depuis environ une dizaine d'années, Coutrot manifestait une activité extraordinaire. Cette activité, par certains de ses aspects, était nettement insolite. Elle prit fin en mai 1941, à son décès survenu dans des conditions mystérieuses.
Cette activité peut être analysée de la façon suivante, en distinguant successivement :
1/ les groupements fondés par Coutrot,
2/ le sabotage du ministère de l'Économie nationale en 1936-37 (Spinasse)
3/ la tendance idéologique générale,
4/ les voyages de Coutrot,
5/ la mort de Coutrot.
- Les groupements fondés par Coutrot
1/ Le groupement de "X-crise", fondé vers 1932, se proposait l'étude de la crise mondiale qui sévissait alors, dans ses causes et ses remèdes. Son secrétaire était M. Bardet, 145, av. du général Michel Bizot.
2/ Centre polytechnicien d'études économiques (CPEE), résulte de la transformation du groupement précèdent effectuée vers 1934. Siège 12, rue de Poitiers, Paris.
3/ Comité national de l'organisation française, association sans but lucratif, fondée vers 1934. Siège 11bis, rue d'Aguesseau, puis transférée rue Babylone.
4/ École d'organisation scientifique du travail, créée par le décret du 26 novembre 1936, Journal officiel du 27, signé Blum et Spinasse. Siège ministère de l'Éducation nationale, 1, rond-point des Champs-Élysées - comprend un bureau technique permanent dont la présidence était assurée par Coutrot.
5/ Centre d'études des problèmes humains (CEPH), fondé en 1936, siège 9, rue de Lincoln, Paris. Comité exécutif : Faussid, Lon, Coutrot, Dr Carrel, A. Heuxley, G. Guillaume. Membres conseillers : Jean Millaud, Alfred Sauvy, René Gillouin, Dr Martigny, Jacques Brager, Jean Ulmot, etc. Secrétaire administratif : Paul Rivoire.
6/ Journées de l'Abbaye de Pontigny, réunions organisées à l'Abbaye de Pontigny chaque année depuis 1936, une ou deux ou trois fois durant chaque année, pendant trois ou quatre .jours.
7/ Institut de psychologie appliquée, fondée en 1938, siège 9, rue Lincoln, membres conseillers notamment MM. André Arthus, Bardet, Coutrot, le professeur Fossillon, Georges Guillaume, Thijemans, Pierre Lévy, Paul Planus.
8/ Groupement non conformiste, fondé en 1939 - pendant la guerre. Déjeuner hebdomadaire au restaurant Alexandre, 18, rue Ca... Paris (18e). Principaux membres : Mme Fobin, MM. Breband, Branger, Couturaud, Coutrot, Guillaume, Mirlos, Potin, Reybaud, Simon Estève, Heurthaux et Melle Yvonne Michel.
- Buts de ces groupements
Ces groupements divers, multiples, formés toujours des mêmes personnalités dans les comités directeurs, n'avaient qu'un seul but : attirer le plus grand nombre possible d'intellectuels des milieux différents, recrutés parmi eux, par un choix sévère, des membres du MSE.
En résumé, ces groupements constituaient pour Coutrot à la fois un mode de pénétration et de recrutement.
- Le sabotage du ministère de l'Économie nationale
Jean Coutrot, ex-dirigeant de la Maison Caut et Blancan à Paris, où il avait des intérêts par alliance, en 1936, a abandonné son activité industrielle pour l'action administrative. Introduit auprès de M. Spinasse, lorsque celui-ci prit le portefeuille de l'Économie nationale, Coutrot devient rapidement conseiller écouté. L'action de Coutrot fut double :
1/ il introduisit dans l'administration le plus grand nombre possible de ses adhérents du MSE : Granger, Hekking, etc ;
2/ il fit échouer tous les essais d'organisations socialistes de l'Économie française, tentés par Spinasse et lui en a proposé d'irréalisables. En bref, il a torpillé le portefeuille de l'Économie nationale dont le principe ne survécut pas à cette tentative tout au moins sous la forme d'un ministère autonome.
- La tendance idéologique générale de Coutrot
Étalée dans ses écrits, conférences et colloques, la tendance idéologique de Coutrot a été fort singulière. Il se disait socialiste mais anti-marxiste, anti-socialiste. Bref, en opposition avec toute nuance socialiste connue. Son travail était exclusivement orienté vers la désagrégation. La démolition de tout socialisme constructif, quelle que soit son étiquette, désagrégation d'autant plus efficace qu'elle s'exerce au sein de milieux cultivés, accès sur le patronat et l'administration des ministères d'ordre économique, en définitive, travail de sape au bénéfice du grand patronat.
- Les voyages de Coutrot
Coutrot allait souvent à l'étranger, sous couvert d'organisation scientifique du travail, en 1938 et 1939, il se rendit plusieurs fois en Angleterre et en Suède ; d'après J. J..., 9 juin 1931. II fréquentait en Angleterre A. Heuxley, écrivain de tendance pro-nationale socialiste.
Il était en relations en Suède avec l'Organisation des socialistes suédois, dite SSS, de même tendance.
- D'où venait l'argent ?
Coutrot finançait lui-même tous les groupements dont il était l'animateur et le fondateur. Dans chaque cas, il faisait face aux dépenses de secrétariat, personnel et matériel, de locaux, locations, entretien, chauffage et éclairage, de rétributions de ses collaborateurs directs. II finançait les revues publiées par certains de ces groupements, les journées de l'Abbaye de Pontigny ; les ouvrages qu'il publiait, ses propres voyages à l'étranger. Dans son entretien personnel et familial, une femme et cinq enfants, une puissante automobile, un standard de vie assez dispendieux.
Depuis 1936, il avait cessé toute activité industrielle privée. II n'a jamais accepté de recevoir un centime de traitement ou d'indemnité de l'État pour son activité au COST ou auprès d'une administration quelconque. Ses dépenses annuelles devaient atteindre au bas mot 800.000,- francs par an.
- La mort de Coutrot
Survenue aux environs de mai 1941, elle fut tenue secrète et ne parut pas dans la presse. Ce n'est que le 5 juin 1941 que le journal "L'Appel" lui consacra l'entrefilet paru plus haut. Aux dires de MTV, questionné le 6 juin, Coutrot se serait suicidé par absorption d'une dose de somnifères et aurait été trouvé mort dans son lit un matin, à son domicile, 51, rue Raynouard. Selon une autre version, émanant d'un de ses familiers, et plus sérieuse, il se serait suicidé en se précipitant par la fenêtre. Au surplus, cette mort a suivi à huit jours d'intervalle, celle de son jeune secrétaire et collaborateur, T. Healet.
Ce qu'il y a de certain, c'est que le maréchal Pétain avait reçu, au début de mai 1941, un important dossier contenant des photographies et des documents originaux, concernant l'existence et l'activité du MSE et que ces documents avaient pu lui être remis à raison d'indiscrétions à l'origine desquelles se seraient trouvés Coutrot et son secrétaire. Ces indiscrétions donnèrent lieu au sein du groupement à des dissentiments violents, immédiatement suivis de la mort des responsables, aux environs du 15 mai 1941. La mort de l'économiste Navachine, le 25 janvier 1937, ne serait elle-même pas sans lien avec l'activité du MSE. Conseiller écouté de Spinasse, il contrecarrait les plans du groupement. De plus, franc-maçon et martiniste authentique, il avait découvert l'existence de cette étrange dissidence et en surveillait étroitement le développement et l'action souterraine.

Chapitre IV - Milieux de recrutement et principaux membres du MSE

- Milieux de recrutement
Les éléments dirigeants du MSE paraissent, en ce qui concerne la France, dépendre de deux milieux distincts mais très étroitement liés :
a) certains milieux bancaires, notamment banque Worms et banque Lehideux, etc.
b) certains milieux du haut patronat, notamment appartenant aux comités des houillères, à certains groupements pétroliers, à certaines sociétés de constructions mécaniques et métallurgiques et à certaines sociétés de grands travaux.
Le recrutement de leurs affiliés a été activement poussé dans les milieux suivants :
1/ anciens élèves de l'École polytechnique, c'est la grande majorité appartenant à l'administration, à la banque et à l'industrie,
2/ certains élèves de l'École centrale ; quelques éléments,
3/ anciens élèves de l'École des Sciences politiques (inspection des Finances),
4/ conseillers d'État ; assez nombreux,
5/ anciens élèves de Normale supérieure, quelques éléments,
6/ quelques médecins et personnalités diverses.
- Organismes de [dé]noyautage
Certains organismes paraissent avoir été exclusivement même composés de membres du MSE. Ce sont notamment :
- Ie Comité central d'organisation professionnelle, 23, rue Chauchat,
- le Centre d'organisation scientifique du travail,
- le Comité d'études des problèmes humains, déjà nommé, etc.
- Leviers de commande dont dispose actuellement le MSE
II a successivement introduit et recruté des hommes au sein des organismes suivants :
- 1936, ministère de l'Économie nationale, Spinasse,
- 1937, inspection des Finances, puis cabinet du ministre des Finances, et de tous les ministères et secrétaires d'État aux Finances successifs,
- 1938, ministère des Travaux publics,
- 1939, pendant la guerre, ministère de l'Armement (Dautry)
- 1940, avant l'armistice, ministère de l'Air (Laurent Eynac et Meny) puis ministère de la guerre Reynaud.
Depuis juillet 1940, entourage du maréchal Pétain, quelques éléments au sein du cabinet civil. Ministère de l'Économie nationale et des Finances en entier, Finances proprement dites, Économie nationale, Production industrielle, Communications, Travail, PTT, Commerce, Équipement industriel, Relations économiques franco-allemandes.
Au surplus, leviers de commande dans tous les autres départements ministériels sans exception par la présence d'un inspecteur des Finances placé à chaque secrétariat administratif ou à chaque poste de contrôle financier.
- Principaux affiliés
Les affiliés les plus marquants paraissent les suivants :
- Assemat, chef du cabinet du ministère des Finances en 1938, directeur de la Caisse nationale des marchés de l'État en 1940 et 1941,
- Barnaud, administrateur de la Banque Worms, inspecteur des Finances, ancien directeur du cabinet du ministre du Travail (Belin), en juillet 40, puis délégué général pour les relations économiques franco-allemandes depuis le 23 février 1941,
- Baudouin, ancien X, administrateur de la Banque de l'Indochine, Belin, Benoit Méchin, Bichelonne, Berthelot, Bouthillier, Jacques Branger, Bréa de Boisanger, Brunet, Chaux, Coquejeniet, Deloncle, de Faramand, Philippi, de Font Reaulx, Gardenez, Gibrat, Gillouin, Gérard, Guillaume, Hekking, Laffont, Lamirand, Le Borrec, Lehideux, Le Roy Ladurie, Libersar, Martigny, Meny, du Moulin de Labarthète, Olivier, de Peyrimoff, Pietri, Pineteau, Planus, Pucheu, Rebuffel, Rougeau, Rueff, Sancy, Wiedller.
- Principaux leviers de commande aux mains du MSE
En fonction des affiliés qui viennent d'être nommés, les principaux leviers de commande dont dispose actuellement les membres du MSE, en juillet, peuvent se classer ainsi :
1/ Entourage du chef de l'État
Du Moulin de Labarthète, de Font Reaulx, René Gillouin, Lehideux.
2/ Ministres secrétaires d'État
Bouthillier, Pucheu, Berthelot, Barnaud, Benoist Méchin
3/ Secrétaires généraux
Lamirand, Berthelot, Bichelonne (à la Production), Lafond (à l'Énergie)
4/ Directeurs et chefs de services administratifs
de Boissanger (banque), Brunet (trésor), Rueff (finances), Assemat (marchés), Branger (marchés), Philippi (finances), Libersac (finances), Sancy (finances), Coquejeniet (sidérurgie), Fauton d'Andon, Gibrat (électricité), Pinot, Rougeau (travail), de Farnaud (questions juives).
5/ Industries, banques, comités d'organisation et répartition,
Baudouin (Indochine), Gérard, Gardenez (marine marchande), Le Roy Ladurie (sociétés immobilières), Le Gorec et de Wiedller (Pechelbronn), de Périmoff (Houillères et Forges), Olivier (fonderies), Meny (pétroles), Rebuffel (grands travaux).
6/ A l'étranger
Pietri, Hekking, Guillaumin, Ornp, Deloncle, Ed. Chaux, Docteur Martini.

Chapitre V - Action du MSE en France

Le mouvement synarchique est un mouvement de caractère international créé au lendemain du traité de Versailles, financé et dirigé par certains groupes financiers appartenant à la haute banque internationale.
Il se propose essentiellement de renverser dans tous les pays où ils existent les régimes parlementaires jugés insuffisamment dévoués aux intérêts de ses groupes et, par ailleurs, trop difficiles à manoeuvrer en raison du nombre étendu de personnes dont il s'agit de s'assurer le concours. II se propose, en outre, de leur substituer des régimes autoritaires jugés plus dociles et plus facilement manoeuvrables dans lesquels tous les pouvoirs sont concentrés entre les mains du grand patronat et des représentants dûment mandatés de groupements bancaires spécialement désignés pour chaque pays.
En gros, le moyen envisagé consiste à donner à chaque pays une constitution politique et une économie nationale de structures particulières organisées conjointement en vue :
1/ de placer le pouvoir politique directement entre les mains des mandataires de groupes intéressés, afin d'éliminer tout parasitisme intermédiaire,
2/ de réaliser une concentration maximum dans chaque branche d'industrie afin d'y supprimer toute concurrence ruineuse,
3/ d'être maître des prix pour toutes les marchandises, matières premières, produits semi finis et houilles,
4/ d'enfermer l'ouvrier dans un cadre juridique et social ne permettant plus aucune action extrémiste ou même revendicatrice de sa part.
Les moyens d'action utilisés en France furent multiformes. Les deux principaux sont :
1/ Le CSAR, Comité secret d'action révolutionnaire ou Mouvement social révolutionnaire,
2/ le CSR, Convention synarchique révolutionnaire ou le MSE.
Le CSAR, après avoir échoué dans sa tentative de prise de pouvoir par l'insurrection de 1934 et de 1937, réussit en juillet 1940 par un chantage au désastre, greffé sur une défaite militaire savamment organisée et accélérée.
Quant au MSE, il avait préparé les voies d'accès de la prise de l'exercice éventuel de pouvoir par un noyautage persévérant de la haute administration, de la haute industrie et de la finance depuis 1922.
Le CSAR et le MSE ne sont que les deux aspects d'un seul et même mouvement.
- Camouflage de l'action du MSE en France
La pénétration du MSE dans les milieux dirigeants de l'administration, de l'industrie et de la Banque fut conduite en France d'abord par l'emploi du lien personnel, puis par les organismes multiples créés par Jean Coutrot.
Le prétexte invoqué a été la lutte contre le communisme par la création d'une nouvelle idéologie révolutionnaire rejetant toutes les autres dans l'arsenal des théories surannées et pernicieuses.
Quant au camouflage, il fut trouvé dans la vieille notion de synarchie autrefois définie dans les oeuvres de Saint-Yves d'Alveydre, réhabilitée pour la circonstance au rang d'organisation future du genre humain. Ce choix singulier résulte d'ailleurs de circonstances fortuites ; Saint-Yves d'Alveydre, en 1889, affilia au martinisme vrai, bon nombre de polytechniciens de son entourage, lesquels formèrent par la suite des chaînes polytechniciennes d'affiliés. En 1922, certains de ceux-ci adhérèrent au mouvement qui prenait alors naissance et c'est cette circonstance qui explique à la fois :
1/ comment un aspect du CSAR se camoufle sous cette étrange idéologie de la synarchie,
2/ pourquoi l'affiliation martiniste fut adoptée par eux pour le recrutement propre,
3/ enfin, l'opinion formulée par l'historien maçonnique Wart indiquant qu'en France, à cette époque, le martinisme s'égarait hors des chemins traditionnels.
- But poursuivi par les membres du MSE depuis leur accession au pouvoir en juillet 1940
Au pouvoir en France, depuis juin 1940, date à laquelle un de leurs chefs, M. Bouthillier se vit confier le portefeuille des Finances par le maréchal Pétain, les buts poursuivis par les membres du MSE ont été les suivants :
1/ faire échec à la politique du nouveau gouvernement en ce qui concerne la Révolution nationale pour tout ce qui serait susceptible d'instaurer un régime jugé trop socialisant au sein du pays,
2/ saper à la base tout effort social pouvant avoir pour résultat d'affaiblir la position de certains groupes financiers internationaux, jusqu'à ce qu'ils détiennent tous les leviers de la production industrielle,
3/ sauvegarder par tous les moyens et dans tous les domaines intéressant l'économie, les intérêts, même juifs, liés avec les groupes financiers liés au mouvement,
4/ faire échec à toute tentative d'organisation économique ou douanière, d'inspiration exclusivement européenne ayant pour conséquence de rendre l'Europe continentale indépendante des importations américaines.
L'exécution de ce vaste programme nécessite la nomination de membres du MSE à tous les postes importants des divers départements ministériels, et notamment des ministères d'ordre économique, Finances, Économie nationale, Travaux publics, Travaux, etc., ce qui fut fait dans les plus brefs délais par la promulgation immédiate de la fameuse loi du 17 juillet 1940 suspendant le statut des fonctionnaires et permettant de les révoquer et de pourvoir à leur remplacement sans autre formalité qu'un simple décret.
Les membres du MSE mis en place, la réalisation des plans concertés commence immédiatement.
- Action sur le plan économique
Le groupe synarchique procéda également très rapidement à l'éviction des conseils du gouvernement de certaines personnalités qui marquèrent une activité jugée trop socialisante ou dangereusement révolutionnaire. Ce furent successivement :
1/ M. Adrien Marquet, à l'Intérieur, suspect de tendresse pour le national socialisme, trop socialiste,
2/ M. Allibert, jugé révolutionnaire sur le plan politique,
3/ M. Pierre Laval, suspect de sympathie pour un régime proprement national socialiste et pour une autarcie économique européenne.
Toutes les opérations politiques pour l'éviction de ces trois suspects ont été dirigées par M. Bouthillier et ses seconds et la victoire finale qui a été obtenue le 13 décembre avec la collaboration de M. Peyrouton, qui fut l'exécuteur ignorant du groupe synarchique. M. Peyrouton a réalisé la performance, qui restera sans doute fameuse dans les annales de l'Intérieur en France, d'avoir été à la fois ministre chargé de faire la chasse aux sociétés secrètes - loi du 13 août 1940 - et le jouet au sein même des conseils gouvernementaux d'une mafia dont il a toujours ignoré l'existence.
- Action sur le plan de la collaboration
Sur le plan de collaboration franco-allemande, le mot d'ordre a été de rechercher avec les firmes allemandes une série d'accords en leur offrant sur le plan financier des avantages réels ou de créer, avec les chefs de l'industrie allemande, une solidarité d'intérêts très étroits, susceptible de s'étendre éventuellement de l'autre côté de l'Atlantique, le tout fortement charpenté et conçu dans le but de se mieux souder aux groupes américains dès la fin de la guerre.
M. Flandin serait le lien et le conseil pour que ces sortes d'entente fassent échec à toute tentative d'extension du socialisme, tant dans le programme hitlérien que dans la législation française, et empêchent l'union douanière européenne contraire aux intérêts américains. Des mots d'ordre ont été donnés pour que l'on réveille par tous les moyens les apathies capitalistes des industriels et chefs d'industries allemandes et pour que l'on conçoive des accords financiers entre les peuples français et allemands, de façon à unir les pétroles et leur ersatz, les textiles artificiels et les groupes cotonniers, les mines et la grosse industrie de façon telle que leurs intérêts les conduisent à faire pression sur leurs mouvements pour que les intérêts judéo-américains soient entièrement sauvegardés.
La réalisation de ce plan se poursuit méthodiquement. Il semble notamment que dans les mines et les textiles les négociants évoluent favorablement, les représentants allemands mettant une certaine complaisance ; M. Gillet, du groupe France-Rhône serait arrivé à des résultats remarquables entre IG Farben, France-Rhône et Dupont de Nemours pour l'Amérique. Les négociations ont été menées en zone non occupée à Lyon, à Bâle, par M. Gillet, les dirigeants de IG et un attaché d'ambassade américain à Vichy.
Pour les pétroles et les carburants de remplacement, l'animateur et le juif Meny, agissant sous la direction de M. de Peyerimoff, par le truchement de certains dirigeants de Pechelbronn. Des efforts ont été faits pour amener le président du conseil d'administration de cette société à démissionner et à le remplacer par M. Langeron en vue d'intégrer cette firme dans une compagnie française d'obédience américaine et groupant toutes les sociétés pétrolières françaises.

Conclusion

Le mouvement synarchique d'empire, créé en France en 1922, parallèlement au CSAR et très étroitement lié à lui, comme nous l'avons vu, n'est que l'aspect français d'un mouvement international de grande envergure organisé et financé dans tous les pays par certains éléments du grand patronat et de la haute banque.
Sur le plan international, son but essentiel a été le renversement de tous les régimes démocratiques du monde en vue de leur substituer des gouvernements plus forts et aussi plus dociles dont les leviers de commande au sein de chaque nation [soient] puissamment centralisés entre les mains de quelques affiliés appartenant au grand patronat et groupés sur le plan international sous l'obédience d'une haute banque qui coordonne l'articulation générale entre les divers pays.
II représente donc essentiellement, à la fois, un épisode de la lutte du capitalisme international contre le socialisme et une tentative puissante d'impérialisme financier visant à assujettir toutes les économies des différents pays à un contrôle unique exercé par certains groupements de haute banque, lesquels s'assureraient ainsi sous couvert de la lutte contre le communisme, un monopole de fait sur toute activité industrielle commerciale et bancaire.
Sur le plan français, le noyautage par le MSE, de la banque, de la haute industrie et des administrations de l'État s'est poursuivi méthodiquement depuis 1922, cependant que, parallèlement à ce mouvement, le recrutement du CSAR au sein des autres cadres de l'armée se développait en leur faveur.
En 1937, les affiliés du MSE étaient fort nombreux déjà en place, au sein et à la tête des grands organismes d'État, mais le CSAR échoua dans sa tentative insurrectionnelle de prise de pouvoir. La révolution ayant ainsi avorté, un accouchement aux fers devenait nécessaire. II fut pratiqué par l'armée allemande lors de sa promenade militaire du 10 mai au 25 juin 1940, nombre de chefs militaires français facilitant l'opération grâce à une conception prévoyante du patriotisme, qui devenait officielle et nationale deux mois plus tard.
Le 15 juillet 1940, presque tous les conjurés du MSE étaient en place, il n'y eut donc rien à changer dans le haut personnel de l'État. Il ne resta plus qu'à renvoyer les membres du Parlement dans leurs foyers et à récompenser le zèle de quelques officiers généraux ayant su, avec habileté, faciliter une révolution par un désastre, l'exploitation du pouvoir suivit, avec une remarquable rapidité qui traduit et met d'ailleurs en évidence, l'existence d'un plan préalablement établi et mûrement concerté.
Un mois à peine après la prise du pouvoir, une loi organise la formidable pyramide d'organisations et de répartition qui réalise la concentration de toute l'industrie française entre les mains de tous les affiliés. Quatre mois plus tard, une loi sur la réforme bancaire coiffe solidement le sommet de cette pyramide en plaçant l'organisation et le contrôle de toute l'activité bancaire entre les mains de quelques financiers, exploitation combien facile avec la nouvelle structure de l'État. Les grandes administrations du pays sont devenues les services extérieurs de la banque Worms et le Journal officiel sert de véhicule à son conseil d'administration, dont les hauts fonctionnaires ne sont plus que les agents d'exécution.
Une année aura donc suffi pour que la signification profonde de la "drôle de guerre de 1939/1940" apparaisse enfin en sa pleine lumière : une révolution camouflée, dissimulée dans un désastre militaire, obtenu par une bataille truquée, en vue de concentrer l'économie du pays dans les mains d'une mafia au service de puissants intérêts financiers internationaux et ceci réalisé sous le haut patronage de l'Église, complice du drame immense de par le fanatisme de certains membres de son clergé ou simplement victime de l'aveuglement de certains autres, en tout cas, étroitement associée au bénéfice de l'opération.

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