1941.03.00.Note (sans émetteur ni destinataire).Statistiques concernant la marine française

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Statistiques concernant la Marine marchande française

I - Situation avant la guerre
1- Tonnage global
Les statistiques générales de l'"Annuaire de la Marine marchande" attribuent à la flotte de commerce de la France depuis plusieurs années un tonnage global d'environ 3.000.000 de tonneaux bruts, toutes catégories de navires comprises (au-dessus de 25 tonneaux).
Si l'on compare ce tonnage avec celui des autres principales puissances maritimes du monde, on constate que la France se classait avant la guerre au 7ème rang des marines marchandes existantes. Au 30 juin 1939, le classement du "Lloyd's Register" des principales flottes de commerce était le suivant :

Pays

Nombre de navires ayant 100 tx br. et plus

Tonnage brut

Grande-Bretagne

7.009

17.981.158

États-Unis (mer)

2.733

9.336.155

Japon

2.337

5.629.845

Norvège

1.990

4.834.902

Allemagne

2.466

4.492.708

Italie

1.335

3.448.453

Hollande

1.532

2.972.871

France

1.282

2.952.975

Les statistiques de l'"Annuaire de la Marine marchande qui comprennent les navires de 25 tonneaux et au-dessus, donnent .les chiffres suivants depuis 1937 :
Marine marchande française


Nombre de navires

Tonnage brut

1er janvier 1937

3.620

3.024.731

1er janvier 1938

3.492

2.957.634

1er janvier 1939

3.457

3.010.986

2- Nombre et tonnage des navires de plus de 500 tonneaux
Si l'on ne tient compte que des navires d'une jauge brute de 500 tonneaux et plus, la marine de commerce française comprenait avant guerre :

598 navires de commerce de

2,718.000 tonneaux bruts

29 navires de commerce auxiliaires de

30.580 tonneaux bruts

46 navires de pêche de

42.935 tonneaux bruts

3- Classement du tonnage par types de navires
Au 1er janvier 1939, le tonnage commercial français se décomposait suivant les principaux types de navires suivants :

Nombre de navires

Type de navires

Tonnage brut correspondant

93

Paquebots

896.078 tonneaux

20

Paquebots mixtes

136.051

43

Cargos mixtes

150.484

66

Pétroliers

300.799

27

Cargos fruitiers

86.081

412

Autres cargos

1.120.163

55

Types divers

14.261

Dans ce total de 716 navires de 2.702.737 tonneaux bruts ne sont pas compris tous les navires de pêche, les remorqueurs, les bateaux-pilotes, câbliers, transbordeurs, porteurs, dragues, etc.
4- Age moyen de la marine marchande française
Au début de l'année 1939, l'âge moyen de la marine marchande française était de 15 ans et demi. Dans les différentes catégories du tonnage, l'âge moyen était de :

Paquebots

14,6 années

Paquebots mixtes

16,9 années

Cargos mixtes

16,2 années

Pétroliers

10,7 années

Cargos fruitiers

4,1 années

Autres cargos

18,2 années

Types divers

24,7 années

Par rapport aux autres marines marchandes, la marine française a un âge moyen élevé parce qu'elle ne comprend qu'une faible quantité de navires récents, tandis que 60,2% de son tonnage sont constitués par des navires de 15 ans et plus. Pour l'Angleterre, le pourcentage correspondant est de 44%, pour le Japon de 55%, pour la Norvège de 36%, pour l'Allemagne de 51%, pour la Hollande de 43%. Les marines marchandes des États-Unis et de l'Italie ont seules une proportion plus élevée de vieux navires soit 83% et 73% respectivement.
5- Vitesse
La marine marchande française comprend un petit nombre de paquebots ayant une vitesse élevée pour les services entre la métropole et l'Afrique du Nord ou entre le continent et la Grande-Bretagne, et quelques unités transatlantiques rapides pour le service entre l'Europe et New York. Mais le nombre de navires ayant une vitesse supérieure à 17 nœuds ne dépasse pas 59 et parmi ceux-ci figurent 11 cargos fruitiers de construction récente. Quelques fruitiers et paquebots mixtes ont une vitesse de 15 à 17 nœuds. Mais la grande majorité des navires français sont des navires lents filant de 8 à 13 nœuds en service.
6- Équipement
L'équipement des différentes catégories de navires peut être considéré comme normal. Il est soumis à une réglementation et à un contrôle rigoureux.
7- Navires à vapeur et à moteur
La marine marchande française ne compte qu'une faible proportion de navires à moteurs, soit 16% environ de son tonnage total. La proportion du tonnage des navires à moteurs est de 25,6% du tonnage en Angleterre, de 24,8% en Allemagne, de 62,2% en Norvège, de 45% en Hollande, et pour l'ensemble du tonnage mondial existant avant la guerre de 25%.
La répartition des navires à vapeur et navires à moteur en France, avant la guerre, était la suivante :
1.026 navires à vapeur de 2.400.760 tonneaux bruts
386 navires à moteur de 426.968 tonneaux bruts
les navires de pêche étant exclus de cette classification.
8- Propriété de l'État et propriété privée
Au 1er janvier 1939, le tonnage des navires appartenant à des sociétés privées ou à des armateurs, d'une part, et à l'État français, d'autre part, se répartissait comme suit :
Tonnage appartenant à l'armement privé : 2.952.883 tonneaux bruts
Tonnage appartenant à l'État : 58. tonneaux bruts.

II - Situation actuelle (mars 1941)
La Marine marchande française doit posséder actuellement 1.950.000 tonnes environ, car les pertes subies pendant la guerre, les captures, les angaries, doivent approximativement soustraire au contrôle français 1.000.000 de tonnes brutes pour 300 navires environ.
1- Tonnage de la Marine marchande française actuelle
Si l'on retranche le total précédent de navires perdus ou immobilisés ou passés hors du contrôle des armateurs français propriétaires, le tonnage total de la marine française se réduit à :
environ 1.100 navires de 1.950.000 tonneaux bruts non compris les navires de pêche et les voiliers de pêche. Le tonnage des navires de pêche à vapeur, à moteur et à voile s'élève actuellement à 150.600 tonneaux bruts.
On peut dire que ce tonnage représente les navires disponibles. Mais il est certainement supérieur à celui des navires exploités.
En effet, certains de ces navires se trouvent dans les ports étrangers (New York, Rio de Janeiro, Buenos Aires, par exemple), d'où ils ne peuvent revenir en raison de l'action de la flotte britannique. D'autres navires se trouvent disponibles dans les ports de la métropole où de ses territoires proches, mais ils n'ont pas d'utilisation en raison du champ d'action restreint de la navigation commerciale actuelle.
2- Stationnement des navires - 3- Exploitation actuelle - 4- Transports urgents et navires disponibles pour ces transports
Pour obtenir des précisions sur ces questions, il faudrait prendre des renseignements soit auprès de la délégation française à la commission d'armistice de Wiesbaden, soit auprès du secrétariat d'État à la Marine à Vichy.
En effet, depuis le début de la guerre, la totalité des navires de commerce français est exploitée sous la direction de l'État. C'est la direction des Transports maritimes au secrétariat d'État à la Marine qui est chargée de cette mission. C'est elle qui donne les ordres concernant l'utilisation des navires, les ports de chargement et de déchargement, les escales, la composition des chargements. Les entreprises de navigation sont généralement gérantes de leurs navires et prêtent à l'État le concours de leur expérience.
Ce qu'on peut dire c'est que les navires en exploitation sont surtout utilisés pour relier les ports français de La Méditerranée avec ceux des territoires français de l'Afrique du Nord, du Maroc, de l'Afrique occidentale, des Antilles, de Madagascar et de l'Indochine. Encore certains de ces trafics ne sont-ils que difficilement desservis du fait du blocus britannique.
Il résulte de ces indications que les navires français fréquentent surtout les ports français de la Méditerranée et ceux de l'Afrique du Nord, du Maroc et de l'Afrique occidentale. Quelques navires ont été affectée à un trafic sur Bordeaux et Nantes.
En ce qui concerne l'ordre d'urgence des transports effectués par mer, seule la connaissance des programmes établis par le Ravitaillement et exécutés par le département de la Marine pourrait donner les renseignements voulus.
5- Participation de la marine marchande française au commerce extérieur
S'il n'est pas possible de donner des renseignements sur l'importance et la répartition du trafic effectué actuellement par la marine marchande française, il peut être intéressant de donner, pour le passé, quelques renseignements statistiques.
Le tonnage global de la marine marchande française qui avait atteint en 1931 son maximum avec 3.613.000 tonneaux bruts, s'est maintenu de 1936 à 1939 autour du niveau de 3.000.000 de tonneaux bruts. La participation du pavillon national dans le commerce extérieur de la France a, au contraire, relativement peu varié et dans l'ensemble depuis de nombreuses années les navires français ont transporté 40 à 43 pour 100 du poids du commerce extérieur français.
Le tableau suivant résume pour 1937 et 1938 la participation de la marine marchande française dans le commerce extérieur par mer de la France :

(en tonnes métriques)

Année 1937

Année 1938

Commerce par mer, total

44.315.797 T.

40.861.814 T.

Transports sous pavillon national

18.569.818 T.

17.597.967 T.


ou 41,90%

ou 43,07%

Importations totales par mer

Tous pavillons réunis

37.313.541 T.

33.490.840 T.

Part du pavillon français

14.397.349 T.

13.653.565 T.


ou 38,58%

ou 40,77%

Exportations totales par mer

Tous pavillons réunis

7.002.256 T.

7.370.974 T.

Part du pavillon français

4.178.469 T.

3.944.402 T.


ou 59,99%

ou 53,51%

Échanges avec les colonies

Importations

7.324.219 T.

7.510.810 T.

Part du pavillon français

4.831.067 T.

5.234.760 T.


ou 65,96%

ou 69,70%

Exportations

2.370.788 T.

2.388.701 T.

Part du pavillon français

2.332.809 T.

2.308.702 T.


ou 98,40%

ou 96,65%

6- Problèmes de personnel de la marine marchande
Le personnel de la marine marchande reste soumis aux règles générales qui formaient son statut avant la guerre et qui sont contenues dans le Code du travail maritime et le Code disciplinaire et pénal de la Marine marchande. La seule réforme qui ait été réalisée, d'ailleurs récemment, consiste dans la fixation à 54 heures de la durée du travail normal demandé aux marins par périodes de 6 jours, soit 9 heures par jour, le jour du repos hebdomadaire étant payé en plus quand il n'est pas consacré au repos. Cette réglementation se substitue au régime de 40 heures qui se traduisait, en fait, par le versement de nombreuses heures supplémentaires. Mais en portant le travail des marins de 40 à 54 heures, on a augmenté les salaires dans une proportion correspondante.
Le seul problème nouveau qui se soit présenté pour le personnel de la Marine marchande réside dans la difficulté qu'il y a à assurer les roulements nécessaires dans les équipages du fait de l'existence de la ligne de démarcation. L'activité principale de la marine marchande est, on l'a vu, concentrée dans les ports méditerranéens. Or, les principales régions où habitent les familles des marins sont sur les côtes du Nord et de l'Ouest, et principalement en Bretagne. Il en résulte que pour envoyer des officiers ou des marins en congé, ou pour compléter des équipages en raison des vacances produites par les congés ou la maladie, ou simplement lorsqu'il s'agit d'armer un nouveau bateau et de lui procurer un équipage, il est indispensable de faire passer dans un sens ou dans un autre les officiers et les marins à travers la ligne de démarcation.
Toutes les démarches faites pour obtenir des facilités spéciales pour les laissez-passer des marins ont échoué jusqu'ici, sauf cependant une courte période où il a été possible d'obtenir des laissez-passer collectifs. Mais cette pratique a été supprimée il y a quelques semaines et d'ailleurs depuis près d'un mois aucun laissez-passer concernant le personnel navigant ou sédentaire de la marine marchande n'a pu être obtenu par suite d'une difficulté concernant le visa des demandes de laissez-passer.
Il serait très désirable que cette question soit résolue d'une manière favorable en tenant compte des particularités de ce problème. Du moment que la navigation est autorisée sous certaines conditions par les conventions d'armistice, il est indispensable que les facilités nécessaires soient accordées pour que cette navigation ne subisse pas des retards du fait de l'embarquement du personnel navigant. Les facilités concernant les laissez-passer de ce personnel sont, en quelque sorte, le corollaire de l'autorisation donnée aux navires de naviguer.


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