1967.01.00.Des documents politiques, diplomatiques et financiers.Article-2

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V
Worms (le groupe)

Nous avons annoncé dans notre n° de juin qu’un accord était intervenu entre la Banque de Paris et des Pays-Bas et le groupe Worms en vue d’instaurer entre eux une coopération et d’aboutir à un développement harmonieux de leurs activités de banques d’affaires.
Cet accord devait se concrétiser par un apport commun à une holding d’une partie de leur participation dans la Compagnie bancaire dont ils ont été tous deux fondateurs et actionnaires importants.
Dans une seconde étape, il devait être procédé entre la BPPB et la Banque Worms à un échange d’administrateurs et à une prise de participation réciproque.
Il ne semble pas que ces opérations aient été déjà réalisées.
Par contre, au milieu de décembre dernier un accord intervenait entre la Banque Worms (ne pas confondre avec la société-mère Worms et Cie) et le Crédit du Nord dans le but de promouvoir et de réaliser en commun « les opérations pour lesquelles leur coopération apparaîtrait possible et souhaitable ».
D’après les informations publiées à ce sujet, aucune prise de participation, ni d’échange d’administrateurs n’est prévue, les deux banques entendant « conserver leur complète indépendance et leur entière liberté de décision en quelque matière que ce soit ».
Ce qui est particulièrement curieux en la circonstance, c’est que le président directeur général du Crédit du Nord est M. Louis de Fouchier, par ailleurs, administrateur de la Compagnie bancaire.

La Banque Worms et Cie est une société en nom collectif, fondée en octobre 1964, sous le titre de Société financière Worms et Cie, par les associés de Worms et Cie, au capital officiel de 25 millions de francs, mais au capital réel de 50 millions ; la moitié de la valeur des apports, tant en nature qu’en espèces, ayant été considérée comme « prime de réserve », et qui, deux mois après par suite de l’apport qui lui fut fait du fonds de commerce de banque de Worms et Cie, modifia, à la fois son objet social (devenant une banque d’affaires) et son titre en celui de « Société Banque Worms et Cie » pendant que le capital était, de ce fait, porté à 28 millions, là encore la moitié de la valeur de l’apport ayant été versé au fonds de réserve des primes[1].
Par acte du 9 décembre dernier, la société Worms et Cie faisait de nouveaux apports à la Banque Worms et Cie, d’une part, du droit de jouissance de locaux situés du 43 au 49 boulevard Haussmann et 30 rue des Mathurins à Paris ; à Aubergenville (Yvelines) et à Lyon, évalué à 3.318.000 F, et, d’autre part, d’une somme en espèces de 10.682.000 F, la valeur totale de ces apports étant donc de 14 millions de francs. Mais, une fois de plus, cela ne fut capitalisé qu’à moitié et l’augmentation du capital n’étant que de 7 millions portait le dit capital à 35 millions.

L’Agence économique et financière a publié, dans ses feuilles du 30 décembre dernier, la curieuse information suivante :
« Worms et Cie
Entré à la Maison Worms et Cie en janvier 1960 comme associé gérant M. Pierre Herrenschmidt estime y avoir accompli une mission qui est parvenue à son terme, tant à la tête des Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime, fusionnés en mai dernier avec les Chantiers navals de La Ciotat, qu’à la présidence de la Société française des transports pétroliers dont l’adaptation aux conditions nouvelles du trafic pétrolier s’est affirmée et ouvre des perspectives favorables.
M. Herrenschmidt a décidé en conséquence de se retirer de la Société Worms et Cie et de la Banque Worms et Cie. »
Information curieuse, avons-nous dit, parce que c’est la première fois que – quoique un peu « biographe » de Worms et Cie – nous entendons parler de M. Herrenschmidt soit entré chez Worms et Cie pour y remplir une « mission », à moins que le fait de parler, dans sa « mission », d’affaires de navigation n’ait, à cet égard, une signification spéciale.
Peut-être en trouvera-t-on une « idée » dans une certaine fraction de son « curriculum vitae » une « présomption » de cette « mission ».
M. Pierre Herrenschmidt est né le 15 février 1906 à Paris. Il était fils de M. Alfred Henri Herrenschmidt, médecin et de Madame, née Vanbergue.
Après des études au Lycée Janson-de-Sailly, à la Faculté de Paris, et à l’École libre des sciences politique, il devient inspecteur financier en 1935, sous-directeur au ministère des Finances 1938, où, d’après une notice biographique émanant de ses « souvenirs », il a progressé jusqu’à être directeur en 1946. Il est nommé, par la suite, directeur au Crédit national, puis, au moment où il quitte l’administration pour entrer chez Worms et Cie, inspecteur général honoraire des finances en janvier 1960. À tort ou à raison, nous considérons qu’à aucun moment de sa carrière jusqu’alors, il n’a été spécialisé dans les affaires de navigation. Nous avons dit « à tort ou à raison » parce que nous ne pensons pas que, comme directeur du Crédit national, ce soient les affaires maritimes qui aient retenu son attention particulière.
Et pourtant, à partir du moment où il est entré chez Worms et Cie, c’est dans ce cadre particulier que son rôle va se manifester d’après même son témoignage.
Il devient, en effet, comme associé-gérant de Worms et Cie (compte non tenu de la succession) : président de la Société française des transports pétroliers, de la Société des Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime, de Worms Compagnie maritime et charbonnière, de la Nouvelle Compagnie havraise et péninsulaire de navigation, filiales directes de Worms et Cie ; gérant de la Compagnie européenne des moteurs (Euro-Moteurs), administrateur de Péchelbronn, Antar-Pétroles de l’Atlantique, de Socantar[2].
Doit-on comprendre, dès lors, que sa « mission » visait le département « maritime » de Worms et Cie et, puisque ses antécédents professionnels antérieurs ne lui donnaient aucune compétence en la manière, à quel titre ?
Si bien que, on doit se demander qui à l’époque a chargé M. Herrenschmidt d’une « mission » quelconque chez Worms et Cie ; quelle était cette mission, et, en fin de compte, quelles sont les raisons réelles qui ont entraîné le départ de M. Herrenschmidt.
Nous avons l’impression que certains « faits » prochains donneront, au moins en partie, la réponse à ces questions.

Monsieur Robert Cousin (Robert Jacques Félix Camille)
- qu’il ne fallait pas confondre avec le préfet Marius Cousin – qui était un des « hommes » de Worms et Cie (voir notre n° de décembre 1950) était, les années dernières, à ce titre : président-directeur général du groupe d’assurances Préservatrice, où il avait remplacé M. Jacques Guérard (voir le même n° de décembre 1950) ; il était en outre, et toujours en la même, président du Lloyds de France-Vie et administrateur de la Nation-Capitalisation, de la société du Portefeuille-Investissements, de la société d’Investissements CGTA Socagim et, à titre personnel, de l’Établissement thermal de Bagnoles de l’Orne.
Décédé, dans les derniers mois de 1966, il a été remplacé dans le groupe Préservatrice par M. Raymond Meynial associé-gérant de Worms et Cie et, au Lloyd France-Vie par M. Marcel Henry, pendant que M. Raymond Meynial était coopté comme administrateur.
M. Marcel Henry étant, bien entendu, un « homme » de Worms et Cie, comme directeur-général de la Préservatrice.
AIII.
 

 

[1] Voir les détails dans notre n° de février 1965.

[2] M. Pierre Herrenschmidt était encore administrateur de la Cie franco-malgache d’entreprises, de la société des Usines chimiques de Pierrelatte, etc. qui sortent du cadre « navigation ».

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