1966.04.20.Des Chantiers navals de La Ciotat.A la Marine marchande

Le PDF est consultable à la fin du texte.

Chantiers navals de La Ciotat
Société anonyme au capital de 30.000.000 F

12, bd de la Madeleine
Paris 9e

Paris, le 20 avril 1966
Monsieur Jean Morin
Secrétaire général - Marine marchande
3, place de Fontenoy - Paris

Monsieur le secrétaire général,
Je me fais un devoir de venir apaiser les inquiétudes que vous semblez nourrir sur l'état d'esprit de la direction générale des Chantiers navals de La Ciotat et sur la politique industrielle qu'elle entend suivre pour la conversion des activités du Trait. Les explications que vous trouverez plus loin vous aideront, j'en suis sûr, à dissiper une impression fâcheuse et vous donneront les éclaircissements nécessaires sur nos dispositions.
Celles-ci, Monsieur le secrétaire général, sont, croyez le bien, excellentes. Il n'en demeure pas moins qu'au lendemain précisément de la signature du traité de fusion avec les Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime, nous sommes peinés de nous voir l'objet d'une suspicion dont les raisons nous échappent. Au moment où, répondant aux instances des pouvoirs publics, nous entreprenons une tâche difficile et dont l'échec pourrait sonner le glas de notre société, nous avons besoin plus que jamais d'être assurés du soutien et de la compréhension bienveillante d'une administration qui, dans le passé, a su nous donner tant de marques d'active sollicitude. Nous ne concevons pas qu'ils puissent nous faire défaut.
Au cours de l'entrevue que vous avez bien voulu lui accorder le mercredi 6 avril, M. d'Huart vous a exposé dans ses grandes lignes la politique que nous comptons suivre. Cette politique nous est dictée par le souci, que nous partageons avec vous, d'éviter un hiatus entre la construction navale et les activités de reconversion et de résoudre ainsi, de manière positive, le problème social de la localité du Trait.
A un premier stade, et nous le déplorons plus que quiconque, nous sommes dans l'obligation de procéder à un certain nombre de licenciements. Ils doivent être immédiats et sont indispensables pour ramener le taux horaire du Trait à un niveau compétitif en supprimant une masse de frais généraux dont la survivance mettrait rapidement notre société en difficultés. Leur importance est la suivante :

 

Trait

Paris

Total

Cadres

9

5

12

Mensuels

140[1]

12

152

Horaires

44[2]

 

 

Ainsi que vous pouvez le constater, les licenciements envisagés portent essentiellement sur du personnel à solde mensuelle ; cette mesure aurait dû être prise par l'ancienne gestion.
En ce qui concerne l'emploi, nous avons accepté un certain nombre de nouvelles commandes négociées par l'ancienne gestion et qui sont les suivantes :
- 1 cargo malgache ;
- 1 minéralier pour l'Union navale ;
- 2 sous-marins type "Daphné" pour le Pakistan.
Ces commandes s'ajoutant aux travaux en cours assurant la pleine charge des effectifs de construction navale du Trait, - 540 ouvriers productifs - jusqu'au mois de mai 1968. La décroissance du personnel naval est ensuite progressive pour tendre vers zéro à fin 1969 après l'achèvement du deuxième sous-marin pakistanais.
L'effectif reconverti, - actuellement 150 ouvriers productifs environ - devrait augmenter progressivement et se substituer aux disponibilités de l'effectif naval au fur et à mesure de la décroissance de son activité.
Nous pensons que le délai de 2 ans dont nous disposons pour la reconversion est raisonnable pour amener progressivement au Trait de nouvelles activités de chaudronnerie et nous avons commencé sans attendre un effort de prospection pour y parvenir.
Parallèlement nous recherchons toutes les solutions de reconversion externe qui pourront s'offrir en vue de faciliter l'implantation sur les terrains du Trait d'industries nouvelles capables d'utiliser une partie de la main-d'œuvre disponible. Les 23 hectares de terrain raccordés à la SNCF dont nous disposons, le très important patrimoine immobilier et les mesures de faveur récemment décidées par le gouvernement pour la commune du Trait devraient faciliter notre tâche sans qu'il nous soit bien sûr possible actuellement d'indiquer les proportions relatives de reconversion interne et externe auxquelles nous arriverons dans 2 ans.
Nous sommes d'ores et déjà en négociation avec une société qui emploie 500 ouvriers dans la région parisienne et que nous espérons convaincre de s'implanter au Trait.
Il n'en demeure pas moins que l'ensemble de l'opération de sauvetage ainsi entreprise pose des problèmes humains, techniques et financiers considérables et que le succès n'en est pas concevable sans une coopération étroite et une parfaite entente entre vos services et la direction générale de cette société.
Nous avons, plus que jamais, besoin de votre appui. C'est ainsi notamment que, dans le secteur de la reconversion, il est indispensable que les pouvoirs publics, informés par vos soins, rappellent à leurs organismes chargés de la réalisation des marchés de l'État, que le problème des ACSM n'est pas résolu du simple fait de la fusion. En particulier notre société doit conserver toutes les chances d'obtenir ces marchés, sans se voir opposer, dans des domaines d'activités où elle a déjà fait ses preuves, d'autres considérations que celles touchant à la technique et aux prix de revient.
Nous espérons que ces précisions dissiperont vos craintes et vous permettront de couper court à une campagne tendancieuse.
Veuillez agréer, Monsieur le secrétaire général, l'assurance de notre haute considération.

Le président,
L. Deroo

[Voir PDF pages 5 à 10 : annexe n°1 – courrier du ministère de l’Économie et des Finances en date du 24 février 1966 ; annexe n°2 – courrier des Chantiers navals de La Ciotat en date du 2 mars 1966 ; annexe n°3 – courrier du ministère de l’Équipement en date du 2 mars 1966.]


[1] Dont 23 âgés de plus de 60 ans.

[2] Dont 18 âgés de plus de 60 ans.

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