1965.05.18.Des Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime.Rapport

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Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime

Le présent rapport se compose de différentes notes ou études traitant :
- de l'évolution financière des chantiers,
- de remarques sur les équipements industriels,
- des prix de revient et des prix de vente des heures productives,
- de certaines caractéristiques des chantiers,
- et d'une conclusion.

Résultats des exercices antérieurs

Le dernier exercice bénéficiaire des ACSM a été celui de 1961, dont le compte de pertes et profits apparaissait créditeur de 188.220,82.
Les bilans des exercices suivants ont constaté des pertes régulièrement croissantes :

- en 1962

 

3.391.800,16

- en 1963

+ amortissements différés

2.389.810,05

3.184.357,03

5.574.167,08

- en 1964

+ amortissements différés

3.908.132,73

3.752.223,83

7.660.356,56

- soit pour ces trois exercices

 

16.626.323,80

 

Résultats prévisionnels de l'exercice 1965

En fin 1965, la perte réelle qui devra ressortir du bilan de l'exercice sera encore plus lourde en raison notamment de l'imputation au compte d'exploitation des résultats industriels défavorables des bateaux qui seront livrés au cours de l'année aux armateurs. Elle sera pour autant que l'on puisse actuellement l'estimer d'une vingtaine de millions.
Ce montant s'analyse ainsi :

frais divers de gestion

 

2.000.000,-

frais financiers

 

3.000.000,-

pertes sur bateaux livrés en 1965 :

 

13.100.000,-

- méthanier :

5.000.000,-

 

- car-ferries

6.500.000,-

 

4ème Nochap

1.600.000,-

 

- perte sur le bananier livrable en janvier 1966

 

1.200.000,-

Un inventaire sincère devrait également prévoir l'amortissement de certaines participations dont les bilans sont ou seront déficitaires. L'amortissement à pratiquer serait de l'ordre de 3 millions de francs.

Évolution des fonds propres

Par fonds propres, nous entendons la somme algébrique du capital, des primes d'apport, des réserves légale, générale et spéciale de réévaluation, des fonds d'approvisionnements techniques et de renouvellement des stocks, des amortissements différés et des reports à nouveau.

Les fonds propres, ainsi définis, qui s'élevaient au début de l'exercice 1961 à

25 millions

n'atteignent plus, du fait des pertes, au début de 1965, que

11 millions

en dépit d'une augmentation de capital en espèces réalisées en 1964

2.500.000

Ils seront négatifs en fin du présent exercice d'une dizaine de millions si aucune augmentation nouvelle de capital n'est intervenue d'ici là.

Évolution de la trésorerie

La trésorerie s'est régulièrement dégradée depuis le début de l'exercice 1962, les chiffres des bilans en témoignent (en milliers de F) :

 

début 1962

fin 1962

fin 1963

fin 1964

Dettes à long terme

5.775

5.330

13.579

13.118

Dettes à court terme

95.972

107.437

198.370

231.238

 

101.747

112.767

211.949

244.356

Au 31 décembre dernier les dettes à court terme envers les banques s'élevaient à 18.880.000,-
Rappelons que pour 1965 la société a demandé à ses banquiers d'élever les découverts autorisés à 30 millions.

Remarques sur les équipements industriels

Par équipements industriels, il faut entendre les activités terrestres :
- les unes traditionnelles consistant dans la fabrication de toits flottants sous licence Chicago Bridge[1],
- les autres, nouvelles, et concernant la chaudronnerie, la tuyauterie, les constructions industrialisées, les éléments mécano-soudés, les chaudières, des travaux d'entretien et des prestations de service.
Des efforts incontestables ont été déployés pour cette reconversion.
D'une part, un état-major a été constitué (à Paris : un directeur, deux ingénieurs, un attaché de direction, quatre secrétaires, trois collaborateurs à mi-temps) et des investissements ont été effectués.
Ces investissements sont de deux ordres :
- des immobilisations en matériel et outillage qui, au cours des quatre derniers exercices, se sont élevés à plus de 10 millions de francs (il est juste de noter que ces investissements ont bénéficié d'une aide spéciale temporaire de 15% octroyée par les pouvoirs publics),
- des prises de participations qui atteignent ou atteindront plus de 5 millions (Botalam, Constructions mécaniques du Trait, Société technique de préfabrication, société Praia, société Cetral).
Les chiffres d'affaire réalisés par les équipements industriels ont été les suivants[2] :

1961 :

7.862.000 F dont

2.820.000 F

(pour les toits flottants

1962 :

15.812.000 F dont

4.363.000 F

(pour les toits flottants

1963 :

21.314.000 F dont

9.257.000 F

(pour les toits flottants

1964 :

16.343.000 F dont

7.667.000 F

(pour les toits flottants

Ces chiffres ne comprennent pas les commandes exceptionnelles pour les ensembles destinés aux raffineries en construction (Raffinerie des Philippines en 1962, Raffinerie thaïlandaise en 1964).
Les chantiers, qui ont normalement cherché leur reconversion dans les domaines compatibles avec leur équipement et la qualification de leur personnel, ont trouvé dans ce secteur d'activité une concurrence âpre de firmes spécialisées et anciennes et il ne leur a pas été donné, jusqu'à présent, d'obtenir, en dehors des marchés de toits flottants, des commandes de série de bonne rentabilité.
Pour le dernier exercice les résultats réels des équipements industriels ne sont pas les résultats industriels qui apparaissent au compte de résultat analytique du compte d'exploitation (F 1.848.000). Le bilan des commandes de reconversion est en effet établi à partir d'un prix de l'heure productive sensiblement inférieur au prix de revient réel des heures productives.
Si le bilan des commandes avait été établi à partir du prix moyen réel : 14 F 28 (sans excédent des factures sous-traitants) le bénéfice n'aurait été que de 1.100.000 F environ, résultant en quasi-totalité des commandes de toits flottants.
En fait, il semble que le prix de revient réel de l'heure productive soit plus élevé pour les commandes de reconversion que pour les commandes de navires (note de la direction des chantiers, en date du 15 janvier 1965, concernant la nouvelle comptabilité analytique d'exploitation).
Si cette nouvelle comptabilité avait été appliquée pour établir le bilan des commandes de reconversion 1964, le bénéfice sur les toits flottants, aurait été nettement inférieur à 1.000.000, et les autres commandes de reconversion se seraient soldées en perte.
On ne saurait raisonnablement espérer que les équipements industriels puissent absorber en 1965 beaucoup plus d'heures qu'en 1964. Et en tout état de cause, nous estimons qu'il est hors de question que l'activité des chantiers puisse se borner aux seuls travaux de ce département.
Les résultats des participations prises ces dernières années, notamment celles de Botalam et de Constructions mécaniques du Trait, pour aider la reconversion n'ont pas été non plus ceux qui étaient espérés, et, en bonne gestion, des provisions ou amortissements devraient être envisagés pour minorer leur prise en charge comptable actuelle. Ainsi qu'il a été indiqué précédemment, ces provisions pourraient s'élever aux environs de 3 millions.

Prix de revient et prix de vente de l'heure productive

I -
Le prix de revient Chantiers, prévu pour une commande navire ou une commande reconversion, résulte de l'estimation des deux termes suivants :
A - matières premières et divers,
B - nombre d'heures productives utilisées x prix de l'heure.
Le bilan de la commande dépendra de la différence pouvant exister entre les valeurs réelles des termes A et B et les valeurs estimées au moment de l'établissement du devis.
Les plus grandes chances de différence portent sur le terme B :
- le nombre d'heures réelles utilisées pour l'exécution d'une commande peut être différent du nombre d'heures estimées, soit par suite d'une erreur d'appréciation au moment de l'établissement du devis, soit parce que le rendement de la main d'œuvre ne sera pas celui qui avait été prévu,
- d'autre part, le prix moyen réel des heures productives utilisées pour l'exécution de la commande peut être différent du prix adopté pour l'établissement du devis :
- pour obtenir une commande, le prix de l'heure inclus dans le devis peut être nettement différent du prix de l'heure réel prévisionnel,
- le prix de l'heure moyen réel peut être également différent du prix prévu au devis parce que le nombre d'heures productives, sur lesquelles sont répartis les frais généraux, varient au cours de l'exécution de la commande.
Au cours de la présente étude, nous étudierons plus spécialement l'influence sur le bilan des commandes, du prix de l'heure productive.
Il convient d'estimer :
- le nombre d'heures productives qu'il est raisonnable de compter pouvoir utiliser,
- le prix de revient réel de l'heure productive dans l'hypothèse ci-dessus,
- le prix de l'heure productive qui permet d'obtenir soit des commandes navire, soit des commandes de reconversion.

II -
1/ D'après ce que nous a indiqué M. Gendrot, les commandes de navires, actuellement dites "blanches", sont prises avec un coefficient de frais généraux d'environ 131 %, ce qui conduit à un prix voisin de 14,60 F pour l'heure productive.
M. Gendrot a précisé que ce prix doit s'entendre avant déduction de l'aide ; le prix de l'heure correspondant au montant du contrat est donc inférieur à 14,60 F.
2/ D'après des documents qui nous ont été remis pour l'exercice 1964 et qui portent sur un montant de 351.149 heures productives, les commandes de toits flottants auraient absorbé 114.702 heures productives et les autres commandes 236.387.
Le bilan des commandes de toits flottants aurait été établi en partant d'un prix comptable de 10,77 F pour l'heure productive ; ce bilan fait apparaître un bénéfice comptable de 1.465.335 F, ce qui fait ressortir un bénéfice comptable de 12,76 F par heure productive.
On peut donc dire que les commandes de toits flottants auraient pu être prises avec un prix de 23,53 F pour l'heure productive.
Le bilan des autres commandes de reconversion aurait été établi en prenant 12,31 F comme prix comptable de l'heure productive ; elles ont fait apparaître un bénéfice comptable de 382.902 F, soit 1,62 F par heure productive.
Il semble donc que ces autres commandes de reconversion auraient pu être prises sur la base de 14,43 F comme prix de l'heure productive.
3/ Les prix de l'heure suivante apparaîtraient donc comme approximativement compétitifs :

- toits flottants

23,50 F

- autres commandes de reconversion

14,40 F

- commandes navires (avant loi d'aide)

14,50 F

III -
Nombre d'heures productives disponibles et utilisables
1/ D'après le tableau fourni par les ACSM (tableau du 6 avril 1963, intitulé "Taux homogène de charges directes"), le nombre d'heures productives utilisées en 1964 a été de 2.872.711 h dont 624.868 de main-d'œuvre sous-traitée à l'extérieur.
Si l'on admet pour chaque ouvrier productif 46 semaines de plein travail, à raison de 46 h 15 par semaine, le nombre d'heures productives effectuées annuellement, par chaque ouvrier productif, serait de 2.127,5.
Sur ces bases, le nombre d'heures productives effectuées en 1964 par le personnel chantiers correspondraient à 2.247.843 / 2.127,5 = 1.056 ouvriers
En fait, une partie de ces heures productives doivent correspondre à des heures supplémentaires (achèvement du "Jules-Verne" en particulier) et de nombreux ouvriers productifs ont dû dépasser l'horaire hebdomadaire de 46 h 15.
D'ailleurs, le prix moyen de main-d'œuvre directe, d'après le tableau du 6 avril 1964, ressort à 6,45, supérieur au prix normal qui doit être d'environ 6,30.
D'après un tableau d'effectifs remis par les ACSM, le nombre d'ouvriers productifs au 1er mars 1965 serait de 870. Le nombre d'heures productives disponibles serait donc de 1.850.925.
La charge prévisionnelle (d'après un tableau ACSM du 22 mars 1965) serait de :

 

1965

1966

Construction navale

1.638.000

700.000

Reconversion

450.000

530.000

 

2.088.000

1.230.000

Cette charge suppose acquises les commandes des chalutiers congélateurs pour la "Havraise de Pêche" et "Guelfi" (d'après le chantier, ces commandes seraient quasi-certaines) ; elles ne tiennent toutefois pas compte du cargo "Transat" dont la commande est actuellement acquise.
D'après le chantier, la répartition des heures productives prévues pour la réalisation du cargo "Transat" (547.000 h) pourrait être la suivante :

1965

47.000 h

1966

350.000 h

1967

150.000 h

Dans cette hypothèse, les charges actuellement prévues pour 1965 et 1966 seraient les suivantes :

 

1965

1966

Construction navale

1.685.000

1.050.000

Reconversion

450.000

530.000

 

2.135.000

1.580.000

La charge 1965 dépasserait les possibilités du chantier s'il n'était pas fait appel à des heures supplémentaires et à la main-d'œuvre extérieure au chantier.
Si l'on effectuait 5 % d'heures supplémentaires (soit 90.000 h au total) et si l'on utilisait 200.000 h de main-d'œuvre extérieure, le total disponible deviendrait 2.140.000 h.
Dans la présente étude, nous tiendrons compte d'un nombre d'heures productives disponibles et utilisées de 2.200.000 h dont 200.000 h de main-d'œuvre extérieure avec un prix moyen d'heures productives de 6,45 F (comme en 1964), ceci pour tenir compte de l'incidence des heures supplémentaires et d'une éventuelle augmentation des salaires.
Dans une étude ACSM du 15 janvier 1965, intitulée "Nouvelle comptabilité analytique", les prix de revient de l'heure productive pour la construction navale et pour la reconversion sont établis dans les hypothèses suivantes d'utilisation d'heures productives :
- 2.200.000 h (dont 200.000 h de main-d'œuvre extérieure) total correspondant approximativement aux effectifs fin 1964
- 2.620.000 h moyenne des heures productives utilisées en 1962, 1963 et 1964
- 3.100.000 h nombre d'heures maximum utilisées (en 1960).

IV -
1/ D'après le tableau ACSM du 6 avril 1965 (intitulé "Taux homogène de charges indirectes"), le prix de revient moyen de l'heure productive aurait été de 14,28 F (sans excédent du prix de la main-d'œuvre extérieure) et de 15,29 (avec excédent).
2/ En admettant que les différents frais généraux en 1965 soient les mêmes qu'en 1964, que les amortissements soient les mêmes en 1965 qu'en 1964 et que le nombre d'heures productives soit de 2.200.000 (dont 200.000 de main-d'œuvre extérieure), le prix de revient de l'heure productive serait de 16,66 F sans excédent sur le prix de la main-d'œuvre extérieure et 17,07 F avec excédent.
Le tableau ci-joint donne le mode d'établissement de ce prix, ce prix s'entend d'ailleurs sans tenir compte des charges financières.
3/ Les prix de revient de l'heure productive, étudiés dans le tableau ci-joint, ne tiennent pas compte des économies de frais généraux résultant des licenciements effectués en mars 1965.
D'après les ACSM, le coût total de ces licenciements en indemnités diverses, complément de salaires, etc. serait de l'ordre de 1.500.000 F et aucune économie n'apparaîtrait en 1965.
L'économie réalisée en année pleine serait de l'ordre de 2.000.000 (j'insiste sur le fait que ce chiffre m'a été donné au Trait sans aucune garantie).
Si ce chiffre de 2.000.000 pouvait être admis, l'économie par heure productive serait de l'ordre de 0,90 F, ce qui ramènerait le prix de l'heure productive à 15,76 contre 16,66, sans excédent de main-d'œuvre extérieure et à 16,17, contre 17,07 avec excédent de main-d'œuvre extérieure.

V -
Si l'on suppose :
- que les frais généraux des ACSM restent les mêmes qu'en 1964,
- que 2.200.000 h productives sont utilisées annuellement,
- que sur ces 2.200.000 h, 200.000 correspondent à de la main-d'œuvre extérieure,
- que sur ces 2.200.000 h, 430.000 sont utilisées par les commandes reconversion et 1.750.000 par les commandes navires,
- que les 450.0000 h de reconversion comprennent 100.000 h de toits flottants et 350.000 h d'autres commandes,
- que les commandes navires sont prises à 14,50 (heure productive avant loi d'aide),
- que les commandes reconversion sont prises à 14,40 (heure productive) et les commandes de toits flottants à 23,50,
- que les commandes ne font ressortir aucune perte sur les matières premières,
- que les nombres d'heures productives prévues au devis sont strictement respectées,
la perte annuelle ressortirait à :
1.750.000 (17,07 - 14,50) + 350.000 (17,07 - 14,40) - 100.000 (23,50 - 17,07) ou 4.497.500 + 934.500 - 643.000 = 4.789.000, soit 5.000.000.
Il y a lieu de noter que, d'après la note du 15 janvier des ACSM (nouvelle comptabilité analytique d'exploitation), le prix de revient réel de l'heure productive reconversion est au moins égal à celui de l'heure productive navire (dans l'hypothèse où la reconversion utilisait 450.000 h.).
Si l'on admet, en première approximation, que les licenciements effectués en mars 1965 entraînent, en année pleine, une économie de l'ordre de 2.000.000, la perte annuelle serait de l'ordre de 3.000.000.
J'insiste sur le fait que ce chiffre doit s'entendre dans l'hypothèse où le bilan des commandes ne ferait ressortir aucune perte provenant d'une erreur d'estimation des matières premières ou d'une erreur d'estimation du nombre d'heures productives ou d'une évaluation volontairement très serrée de ce nombre d'heures productives.
Cette hypothèse peut être optimiste (exemple des car-ferries norvégiens). Soulignons encore qu'elle ne tient pas compte des charges financières.

VI -
L'étude ci-dessus montre que pour éviter les seules pertes provenant de la différence existant entre le prix réel de l'heure productive et le prix auquel doivent être passées les commandes, il faudrait faire au minimum 300 millions d'économie sur les frais généraux.
Compte tenu du caractère optimiste des hypothèses faites, il paraîtrait prudent de tabler sur 3,5 millions au minimum.

Coût de l'heure productive
(hypothèse 2.200.000 h productives dont 200.000 h de sous-traitants)

 

D'après chiffre réalisé en 1964

 

Montant

Taux

Main d'œuvre directe (à 6,45)
Nombre d'heures directes (dont heures sous-traitants)

14.190.000
2.200.000
(200.000)

 

Frais généraux homogènes
Amortissements
Frais de logement
Frais de siège

16.955.000
3.265.000
150.000
2.100.000

119,5%
23,0%
1,0%
14,8%

Total (s/s excédant factures s/trait)

22.470.000

158,3%

Excédent factures sous-traitants

900.000

6,3%

Total (avec excédent factures sous-traitants)

23.370.000

164,5%

Coût de l'heure (sans excédent des factures sous-traitants)
Coût de l'heure (avec excédent)

16,66

17,07

 

De certaines caractéristiques des chantiers

- Le chantier est limité quant au tonnage des navires - ceci en raison de la largeur des grandes cales, incompatible avec les dimensions des pétroliers actuels (et même de certains minéraliers). Le chantier ne peut donc plus prendre de commandes dans toute une catégorie de navires qui, il y a encore une dizaine d'années, contribuaient à alimenter son carnet de commandes.
- Le chantier possède une main-d'œuvre de qualité bien préparée à des constructions soignées et difficiles (exemple : s/m "Morse", méthanier "Jules-Verne". De ce fait le chantier apporte le même soin aux constructions normales, d'où une certaine augmentation du prix de revient.
- L'organisation du chantier est lourde. Les cadres et la maistrance passent trop de temps dans leurs bureaux et pas assez "sur les travaux". Le rendement de la main-d'œuvre s'en ressent.
- La proportion des improductifs par rapport aux productifs est trop forte (voir en particulier des rapports d'octobre 1963 de M. Joseph Brocard après visite d'un chantier belge de même importance).
- Le rendement actuel du chantier est inférieur à ce qu'il pourrait être ; ces dernières années le personnel a été "choqué" en particulier par l'incertitude quant à l'avenir (publication dans les journaux locaux de certaines déclarations concernant la fermeture éventuelle des chantiers comme suite à la "fusion des 4").
- L'agglomération du Trait ne comprend pas d'autres industries que les chantiers et il n'y a pas à proximité d'industries consommatrices de main-d'œuvre ; d'où difficultés pour réduire l'effectif (ou l'augmenter) en fonction de l'évolution du carnet de commande.

Conclusion

Dans le cadre de l'activité que l'on peut raisonnablement espérer atteindre en 1965 et qu'il serait peut-être possible d'atteindre en 1966 (2 millions d'heures productives pour la main-d'œuvre chantier plus 200.000 heures de main-d'œuvre extérieure) le montant des économies a réaliser est, si l'on veut rendre compétitif le prix de l'heure productive, au minimum de 3 millions et demi de francs (sans d'ailleurs tenir compte des charges financières, soit 3 millions en 1964) et ceci, à condition évidemment, que les devis soient dorénavant établis avec toute la rigueur nécessaire en la matière.
La mise en œuvre des mesures classiques :
- arrêt des investissements,
- non remplacement des collaborateurs de toutes catégories démissionnaires,
- compression des frais généraux de toutes natures,
- économies sur les approvisionnements,
- amélioration du rendement des ouvriers,
- accroissement d'un chiffre d'affaires rentable, notamment celui des équipements industriels,
ne saurait être suffisante pour rétablir rapidement l'équilibre des ACSM.
Il n'en demeure pas moins que ces mesures doivent être prises.
Nous estimons que, pour éviter une fermeture du chantier, certainement génératrice de graves conséquences sociales, et de pertes considérables matérielles et morales, il n'existe qu'un ordre de solution :
- le rattachement à un ou plusieurs autres chantiers par voie de fusion totale ou partielle,
- ou par tout autre moyen, par exemple accords de coopération commerciale, technique et industrielle.
Ceci bien entendu sous réserve qu'une telle fusion soit effectuée sur des bases industrielles assurant, sinon la rentabilité, du moins l'équilibre de l'ensemble fusionné (ou collaborant).
En tout état de cause, si la situation mondiale de la construction navale ne permet pas de ramener le prix de revient de l'heure productive à un niveau compétitif par l'augmentation des effectifs productifs, nous avons vu qu'une réduction importante des effectifs improductifs devait assurer la survie des chantiers.
Il apparaît que cette réduction, extrêmement difficile dans le climat social actuel, devrait être possible si, en contrepartie, un changement de structure assurait l'avenir des chantiers.
II faut ajouter que, dans ce nouveau cadre, des regroupements de services (services commerciaux, bureaux d'études, services d'achat), d'une part, entraîneraient des économies non négligeables, et d'autre part, augmenteraient certainement l'efficacité des chantiers fusionnés (ou collaborant) et, partant, les rendraient plus compétitifs.

 

[1] II semble que cette licence doit venir prochainement à échéance. D'après le directeur chargé de la reconversion, son renouvellement serait assuré.

[2] Chiffres tirés pour les années 1961-1962-1963 du document ACSM - direction générale "Évolution des activités reconversion" et pour l'année 1964 du document périodique "Travaux d'équipements industriels" du 8 mars 1965.

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