1949.12.28.Des ACSM.Rapport d'expertise n°5 Borde

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Worms & Cie
Ateliers & Chantiers de la Seine-Maritime
Le Trait
Dommages de guerre professionnels
Rapport d’expertise n° 5 de monsieur Borde
Ingénieur général du génie maritime (CR)
Expert agréé du MRU

Paris, le 28 décembre 1949

Ateliers & Chantiers de la Seine-Maritime
Le Trait (Seine Inférieure)
Dommages de guerre professionnels
Rapport d’expertise n° 5 de monsieur Borde
Ingénieur général du génie maritime (CR)
Expert agréé du M.R.U

Sommaire
I. Contenu du présent rapport
II. Frais généraux de 1948
III. Estimation des dommages
A. Gros outillage et installations détruites
1) Grue de cale
2) a. Gros outillage
b. Matériel flottant
c. Matériel roulant
3) Pendules de pointage
4) Matériel et apparaux de lancement
5) Installations générales
a. Eau sous pression
b. Air comprimé
c. Électricité
d. Téléphones
6) Mobilier industriel
7) Plans et archives
8) Modèles de fonderie
9) Réparations abandonnées '
B. Réparation du gros outillage et des installations
C. Petit outillage et stocks
1) Petit outillage
2) Stocks
D) Récapitulation
IV. Dépenses faites et restant à faire
A. Remplacement du gros outillage détruit
A1. Remplacement en identique
1. Grues de cale
2. Bers de lancement
3. Plans et modèles de fonderie
4. Divers
A2. Remplacement en non identique
B. Réparations - Dépenses
C. Petit outillage et stocks - Remplacements
1) Petit outillage
2) Stocks
V. Récapitulation générale
VI. Conclusions

Annexes
Annexe 1 - Liste et évaluation 1939 du matériel suivant : gros outillage, matériel flottant, Matériel roulant
Annexe 2 - Pendules de pointage et contrôleurs de ronde - estimation Annexe 3 - Berceaux de lancement - Constats et estimation
Annexe 4 - Reste du matériel et des apparaux de lancement Constats et estimation
Annexe 5 - Facture de l’exécution des microfilms des plans du chantier
Annexe 6 - Liste des réparations abandonnées et devis d’estimation Annexe 7 - Listes du petit outillage perdu et estimation
Annexe 8 - Liste des stocks perdus et estimation
Annexe 9 - Récapitulation des dommages en valeur 1939
Annexe 10 - Prix de revient des grues de remplacement et compte de remplacement à l’identique des grues détruites
Annexe 1l - État des dépenses de réparations présentées au 31 décembre 1949
Annexe 12 - État des dépenses de réparations retenues
Annexe 13 - État des dépenses conservatoires contenues dans les précédentes
Annexe 14 - Note et dépenses concernant une grosse réparation celle de la grue de cale Applevage, n° G5
Annexe 15 - Devis de deux grosses réparations restant à faire
Annexe 16 - Dépenses de remplacement du petit outillage
Annexe 17 - Dépenses de remplacement des stocks
Annexe 949 - Document récapitulatif du M.R.U.

I – Contenu du présent rapport
Le présent rapport fait suite à mes rapports :
- n° 1 du 19 août 1947
- n° 2 du 8 novembre 1947
- n° 3 du 10 janvier 1948
- n° 4 du 13 novembre 1948
Il comporte une estimation presque complète et très détaillée des dommages et de très importantes vérifications des dépenses.

II – Frais généraux de 1948
Les frais généraux de 1948 n’accusent pas de variation sensible. J’ai donc conservé le coefficient de 172 % pour l’année 1948 et provisoirement pour l’année 1949.

III – Estimation des dommages
A - Gros outillage et Installations détruites
1) Grues de cale détruites
Je me réfère à mon rapport n° 4 et à l’annexe 3 qui y était jointe, qui a traité de cette question en détail.
Le Chantier a eu cinq grues complètement détruites
G1 G2 G3 G4 et G9
Une sixième grue G5 a été presque totalement détruite mais a pu être reconstruite par le constructeur en utilisant quelques éléments récupérés. Cette grue sera cependant traitée au chapitre « Réparations ».
Un compte de remplacement à l’identique sera fait pour les cinq autres grues au chapitre « Dépenses de reconstitution ».
Je me borne pour l’instant à rappeler, pour ordre, la valeur 1939 approximative à laquelle j’étais arrivé dans l’annexe de mon rapport n° 4 :
4.174.000 Fr
Cette valeur ne sera pratiquement pas utilisée. Elle donne l’ordre de grandeur de la perte.

2) - Gros outillage - Matériel flottant - Matériel roulant
L’on trouvera en annexe 1 la liste complète du matériel de l’espèce détruit, et pour chaque matériel, l’année et le prix d’achat, l’estimation à l’état neuf, le calcul de la vétusté et le montant du dommage, vétusté comprise. Pour la plupart des engins, la valeur de leur installation a été laissée de côté pour l’instant, c’est le cas des machines-outils où l’installation représente une part peu importante du dom­mage ; par contre pour le matériel, pont roulant ou four par exemple, où l’installation fait partie intégrante de l’engin, le coût de l’installation a été inclus dans le chiffre estimé du dommage : je reviendrai ultérieurement sur l’estimation de la valeur installation omise pour l’instant. Le total du gros outillage détruit est résumé ci-dessous :

Désignation

Valeur 1939 du matériel neuf

Valeur 1939 vétusté comprise

a) Gros outillage

8.727.574

7.930.969

b) Matériel flottant

250.700

227.184

c) Matériel roulant

348.200

312.910

Total

9.326.479

8.471.063

Ce chapitre appelle les observations suivantes dont certaines s’appliquent à l’ensemble des dommages :
Constats - La constatation des dommages a fait l’objet d’un examen détaillé. Une carte des points de chute des bombes a été jointe à mon rapports n° 1 du 9 août 1947. J’ai parlé dans le même rapport des sabotages systématiques faits par les allemands dans la période du 18 au 30 août 1944. Pour la constata­tion précise des dommages, j’ai recouru, en les discutant, aux constats officiels faits sur l’heure ou peu de temps après les événements, constats d’huissier pour presque tous les dommages, constats de monsieur Adrien, ingénieur des directions de travaux de la Marine pour les bombardements et sabotages à partir du 6 juillet 1941.
J’ai recouru, quand les constats précis n’existaient pas, aux témoignages des chefs de chantier ou d’atelier en con­sultant leurs notes prises à l’époque ; enfin quand les engins détruits ou endommagés existaient encore j’ai procédé moi-même aux constatations nécessaires, pour, déclarer par exemple si l’engin était réparable ou non.
En bref j’ai tout lieu de penser que la description des dommages qui fait l’objet du présent rapport reflète aussi sin­cèrement que possible la réalité.
Estimation
L’estimation de la valeur 1939 a été faite avec une documentation très abondante et tient compte des facteurs suivants :
- Prix d’achat
- Année de construction
- Poids
- Barèmes du M.R.U quand ils existent ou quand ils se rapprochent du matériel détruit. 
- Valeur de remplacement quand le remplacement est fait à l’iden­tique, même au sens large du terme (paragraphe 173 de la circulaire du 10 janvier 1947 modifié par la circulaire du 10 octobre 1947).
- Devis estimatif, par exemple pour les transmissions d’atelier, pour les réparations abandonnées etc.
- Estimation directe des moteurs électriques quand ils ne sont pas incorporés à la machine : tarifs 1939 Alsthom pour les moteurs alternatifs, SW ou EM ou Givors pour les moteurs à courant continu.
Enfin 10 machines parmi les plus grosses avaient été expertisées par Exmo comme détruites, l’une d’entr’elles étant considérée comme difficilement réparable. J’ai repris l’estima­tion et n’ai eu à modifier sur les 9 premières machines que l’estimation d’une seule, de 10 %. Par contre la dixième machine a été considérée comme réparable au lieu de détruite.
Un grand nombre de machines ont fait l’objet de consul­tations du fournisseur. Il en est ainsi naturellement, en par­ticulier, pour certaines machines très spéciales telles que les tabulatrices et trieuses Bull, mais aussi pour beaucoup d’autres engins.
Pour les machines à bois, le catalogue Quilliet que j’ai mis à jour des prix 1939 sur celui du M.R.U a été utilisé.
Enfin pour les véhicules automobiles, l’estimation a été prise auprès des services du M.R.U.

Vétusté
Les A.C.S.M. possèdent un service d’entretien très sé­rieux, qui suit et entretient constamment ses machines et ses installations. C’est la raison pour laquelle j’ai adopté le coefficient de 0,6 % par année pour les machines courantes, coefficient un peu inférieur à celui de 1 % prévu par le paragraphe (196) de la circulaire du 10 janvier 1947. Pour des ponts roulants ou engins de levage qui sont particulièrement entretenus et périodiquement refondus, j’ai adopté 0,4%.
Enfin pour des engins tels que des fours j’ai pris 0,9 % ou 1%.

3) Contrôleurs de ronde et pendules de pointages
Je renvoie pour cette estimation un peu particulière à l’annexe 2 ci-jointe.
Le dommage se monte en valeur 39 à 61.435 frs, corres­pondant à un coefficient de remplacement de 12,04.

4 – Matériel et apparaux de lancement
a) Bers de lancement
L’on trouvera en annexe 3 une note au sujet de l’estima­tion des pertes en quantité et en valeur.
La valeur 1939 retenue s’élève à 1.378.237 Frs.
Avec vétusté, c’est 1.309.320.
Cette valeur est notablement plus élevée que celle (685.000) de mon rapport précédent, mais le devis juillet 1948 contenait deux grosses erreurs. Le prix de base de la main-d’oeuvre était février 1947 et non juillet 1948. Le bois de rem­placement était du pin d’Orégon et non du pitchpin. Pour ces 2 raisons le coefficient à adopter n’était pas 15 mais un coeffi­cient voisin de 7. Le calcul détaillé en annexe 3 est basé sur le même devis que précédemment. Seule la valeur de 39 change et l’on verra au chapitre Dépenses que je me suis appliqué à faire un remplacement en quelque sorte à l’identique.
b) L’on trouvera en annexe 4 le détail de l’estimation du reste des apparaux de cale ou de lancement qui est résumé ci-après et auquel sont fait les abattements de vétusté quand il y a lieu.
 

 

Val. 39 sans vétusté

Vétusté

Val. Vétusté comprise

Brions et colombiers

69.225

10.384

58.841

Accores

3.222

322

2.900

Etamperches tubulaires

62.000

372

61.628

Etemperches en profilés

107.881

3.239

104.642

Tins en béton

120.258

0

120.258

Echafaudages

26.547

160

26.387

Rampes d’accès

8.355

51

8.304

Madriers d’échafaudage

9.770

977

8.793

Câbles de retenue

32.412

3.242

29.170

 

454.670

18.747

435.923

Report des bers de lancement

1.378.237

68.917

1.309.320

Total

1.832.907

87.664

1.745.243

5 – Installations générales
Ce chapitre comprend les installations d’ateliers concernant l’eau sous pression, l’air comprimé, l’électricité et les téléphones.
Certaines de ces installations endommagées ont été pure­ment et simplement réparées et les dépenses se trouvent dans les comptes Réparations.
D’autres n’ont pu être refaites à l’identique puisque les Ateliers des A.C.S.M. du fait de certaines destructions totales ou partielles, n’ont pas été ou ne seront pas refaits à l’identique. Dans ces conditions la seule méthode d’estimation consiste à faire un devis des destructions de l’espèce en valeur 39 et à rapprocher de ce devis les depenses à l’équivalent de même sorte, en ramenant celles-ci, elles aussi, en valeur 1939.
Ce devis est en cours d’exécution et n’est pas encore terminé. J’indique ci-après les estimations provisoires plus ou moins précises retenues :
a) Eau sous pression
Le devis comprend l’ensemble des dommages de l’espèce ; il ne figure aucun dommage dans les réparations.
Un premier projet non encore vérifié d’une façon pré­cise, mais qui parait correctement établi, conclut au remplacement de 570 m. de tuyau de fonte de 76 x 125 et de 570 m de tuyaux de 150 x 195 et au démontage et remontage de 105 de tuyaux de chacune des deux dimensions.
La seule estimation, sans main-d’oeuvre, du remplacement des tuyaux ci-dessus qui pèsent respectivement 62 et 97 K au mètre, conduit à 106 frs le k° (valeur mars 49) à une somme de près de 10.000.000 qui ramenée en valeur 1939 est supérieure à 500.000 Frs.
J’ai adopté ce chiffre pour le dommage d’eau sous pression, chiffre qui donne par conséquent toute sécurité.
b) Air comprimé
Le devis est ici moins avancé et j’ai conservé pour l’instant la valeur 1939 de 190.000 frs adoptée précédemment.
c) électricité
Je précise que c’est pour l’électricité qu’il y a une partie importante des dommages qui est incluse dans les comptes de réparations. Le devis n’est pas assez avancé pour modifier l’estimation faite précédemment et basée sur l’adoption au titre des dommages de guerre d’une somme de 37.500.000 Frs sur un total de dépenses engagées de 60.000.000 frs en valeur décembre 1947.Cette somme a été ramenée en valeur 1939 avec un coefficient donnant sécurité à 3.000.000 Frs.
Je conserve provisoirement cette estimation.
d) Téléphones
L’estimation des dommages à remplacer à l’équivalent à 324.000 frs est basée sur une consultation d’Ericson pour un rem­placement à l’identique en janvier 1946. Elle est donc précise.

Récapitulation des installations générales
a) Eau sous pression : 500.000 frs
b) Air comprimé : 190.000 frs
c) Électricité : 3.000.000 frs
d) Téléphones : 324.000 frs
Total 4.014.000 frs
Vétusté : J’ai adopté provisoirement une vétusté de 5 % pour l’ensemble de ces installations.
La perte, vétusté comprise, devient : 3.813.300 frs.

6 – Mobilier industriel
L’estimation est terminée à 95 %, en utilisant autant que possible les barèmes du M.R.U. Il ne m’est pas encore possible de joindre au présent rapport le détail des pertes et de l’estimation, mais cela pourra être fait prochainement.
J’ai retenu une valeur 1939 de :
1.642.000 Frs et avec une vétusté moyenne de 10 % assez large, 1.477.800 Frs.
Je précise que ce dommage comprend les pertes de mobi­lier des bureaux 1.050.000 frs et celles des locaux de la Cité mis à la disposition des officiers et équipages des navires de la Marine militaire en achèvement, ainsi que du personnel des sous-traitants venant travailler au Trait pour l’achèvement de ces navires (592.000 frs).
L’estimation sera achevée sous peu, comme déjà indiqué et j’estime que les valeurs ci-dessus donnent toute sécurité au point de vue de l’évaluation. Celle-ci est très notablement inférieure à celle de mon rapport n° 4.

7 – Plans et archives
Le nombre de plans détruits s’est élevé en réalité à environ 28.000 plans représentant une surface de 28.500 mètres carrés.
Comme déjà indiqué dans mon rapport n° 4, un grand nombre de plans du chantier avaient été microfilmés. Le total re­présente, pour 30 bobines, 10.500 mètres carrés. Ces plans re­présentaient les plans les plus précieux du chantier. Or, la proportion de plans microfilmés détruits est d’environ 90 %.
Comme également déjà indiqué, l’existence des microfilms rend la reproduction par agrandissement photographique très peu onéreuse - environ 8 à 10 fois moins onéreuse que la réfection du plan (125 frs le m2 en 1939).
J’estime dans ces conditions que le règlement de la perte des plans du chantier doit être fait dans les conditions suivantes :
a) Remplacement de 90 % de 10.500 m2 = 9.450 m2 à 125 frs le m2 en val. 1939 soit : 1.181.250 frs
b) Remplacement de 200 plans à 800 frs valeur 1939, soit : 160.000 frs
total = 341.250 frs en valeur 1939.
c) Paiement des frais de confection des microfilms - voir copie des factures jointes en annexe 5, soit 346.834 Frs représentant pour ordre, une valeur 1939 de 245.000 frs.
Le total a) + b) + c) fait : 1.586.250 Frs en valeur 39.

8 – Modèle de fonderie
La question est en cours d’examen. Il ne m’est pas encore possible de conclure d’une façon définitive sur la valeur réelle de la perte des modèles de fonderie, laquelle est totale.
Cependant la valeur 1939 que j’ai retenue dans mon rapport n° 4, soit : 1.200.000 francs parait donner entière sécurité.

9 – Réparations abandonnées
Ces réparations abandonnées ont fait l’objet de devis détaillés en valeur juillet 1948 que j’ai discutés sur place.
J’y ai apporté de nombreux et importants abattements et j’ai re­tenu en définitive les chiffres suivants :
Valeur 1939, neuf : 1.650.000 frs
Valeur 39 avec vétusté : 1.400.000 frs

L’on trouvera en annexe 6 la liste des réparations abandonnées et l’estimation de ces dommages en valeur juillet 1948.
Les valeurs précédentes proviennent de cette estimation avec une forte proportion de main-d’oeuvre - rapportée à 1939 par coefficient 13,5.
Les travaux de réparations abandonnés concernent principalement :
- pages 2 à 26 : la station centrale - chaudières et groupes électrogènes - qui n’est pas reconstituée.
- pages 27 à 30 : diverses machines du grand ajustage dont un tour qui a dû être coupé et un marbre de montage dont une partie est inutilisable.
- pages 31 et 32 : un rouleau à cintrer - les tôles de quille de l’atelier des coques dont la réparation a été commencée mais ne sera pas poursuivie. Le rouleau sera vendu avec les approvisionnements faits et je me propose de revoir la question au moment de la vente.
- également pages 40 à 44 un four Hislop pour les profilés qui est très endommagé.
Enfin au petit ajustage, cinq machines et des transmissions.

B - Réparations du Gros outillage et des installations
J’anticipe sur l’examen de ces réparations qui figurera au chapitre « dépenses » et j’indique ici, pour ordre, la valeur 1939 des dépenses acceptées pour l’instant et des dépenses restant à faire.
Réparations faites 10.896.120 frs Dépenses conservatdres 422.880 "
Réparations restant à faire 350,000 ” total Tl.668.u00 frs comportant un abattement pour vétusté de 20.000 frs.

C - Petit outillage et stocks
1) Petit outillage.
L’on trouvera en annexe 7 la liste du petit outillage perdu au cours des différents bombardements et l’estimation de ces pertes en valeur 1939.
Les constatations des manquants après les bombardements ont été faites de deux façons, au moins pour les pertes posté­rieures à 1943 qui sont les plus importantes.
1°) Listes de pertes établies par les chefs d’atelier après chaque sinistre. Je me suis fait présenter les minutes établies.
2°) États de pertes faits d’après différences avec un inventaire de 1943 à un moment où on ne pensait pas retrouver les minutes établies par les chefs d’atelier.
J’ai adopté d’une façon générale quand les vieux documents existaient les renseignements donnant les résultats les plus faibles. Il y a quelques différences pour certains ateliers mais pour les autres la concordance est bonne.
La valeur retenue de la perte s’élève à 1.870.867 frs (voir annexe remplacement) à laquelle il n’y a pas lieu de faire d’abattement de vétusté.
2) Stocks
Comme pour le petit outillage et dans les mêmes conditions, l’on trouvera en annexe 8 la liste des pertes par bombardements et l’estimation de celles-ci.
La valeur 39 retenue est : 2.999.390.-
qui ne comporte pas d’abattement pour vétusté.

D - Récapitulation
L’on trouvera en annexe 9 la récapitulation des dommages en valeur 39. Ceux-ci se montent à : 42.034.348 frs
A réduire en fin de réglement pour vétusté à : 39.489.043 frs.

IV – Dépenses faites et restant à faire
A - Remplacements de gros outillage détruit
A 1 - Remplacements en identique
1 - Grue de cale.
L’on trouvera en annexe 9 le compte détaillé de remplacement à l’identique des grues de cale détruites G1-G.2, G.3, G.4, G.9.
Le montant des dépenses totales de remplacement est de :
34.695.842 francs
duquel il y aura lieu de déduire en fin de réglement pour vétusté 962.000 francs.
L’abattement est relativement faible par suite du remplacement de trois des grues détruites par du matériel d’occasion.
En définitive du fait des achats à l’étranger et du fait de ces achats d’occasion, le remplacement a été fait dans des conditions très avantageuses.
2 - Bers de lancement.
Les remplacements suivants ont été réalisés au 31 décembre 1948 et correspondent à des valeurs 39 de :
Coulisses et couettes de 1m.50 : 447,25 m à 1657 Fr le m, soit : 740.000. Fr
Couettes de 0,54 m : 68,85 m à 668 Fr le m. soit : 46.000 Fr
= 816.000 frs
Ces remplacements ont coûté : 5.208.324 frs
Ils ont été exécutés en 46-47-48 et 49 et la somme précédente ramenée en valeur 39 donnerait une somme d’environ : 600.000 frs.
La différence principale entre les 2 chiffres de 816.000 et 600.000 frs vient du fait que le remplacement a été fait avec du pin d’Orégon au lieu de pitchpin. Le sinistré demande que son droit soit réservé pour tenir compte de la durée plus réduite du pin d’Orégon. Je n’en ai pas tenu compte pour l’instant et j’ai adopté pour le présent rapport la valeur de 5.208.324 frs pour la valeur de remplacement à l’identique de la partie des bers de lancement reconstitués, et 816.000 frs pour la valeur 1939 correspondante, ce qui donne une large sécurité.
J’ai utilisé cette valeur pour calculer la somme valeur 39 restant à dépenser (voir plus loin) pour le matériel et les ap­paraux de lancement. Elle se monte à : 1.832.907 - 816.000 = 1.016.907 Fr.
Cette somme sera reportée pour l’instant dans le compte de rem­placement partie en non identique et partie en identique.
3 - plans et modèles de fonderie.
En attendant de pouvoir présenter des comptes précis de remplacement, j’ai admis un remplacement à l’identique des plans et modèles de fonderie à un coefficient moyen de 7, en
ne prenant pour l’instant que la moitié de ce remplacement.
La dépense est dans ces conditions de :
Plans : 1.341.250 x 3,5 = 4.624.375
Modèles: 1.200.000 x 3,5 = 4.200.000
paiement des microfilms = 346.834
total : 9.241.209 correspondant à une date de 1945.
La somme restant à dépenser est : 4.694.375 + 4.200.000 = 8.894.375 frs
4 - Divers
Dans les autres remplacements effectués il y a une dépense concernant les bers de lancement et le reste concerne des dépenses qu’il ne m’est pas possible pour l’instant de distinguer d’une façon précise entre l’identique et le non iden­tique.
Le total fait une somme de 10.000.000 de francs qui a été ajoutée aux sommes des 3 paragraphes précédents dans la rubrique V de la fiche 949 du M.R.U.

A - 2 - Remplacements en non identique
Remarque préliminaire
Comme indiqué ci-dessus les comptes de remplacement autres que les trois premiers n’ont pu être analysés d’une façon absolument précise du point de vue identique ou non identique.
Compte tenu de la somme de 10.000.000 de frs ajoutée aux rem­placements à l’identique, il a été dépensé à l’équivalent 125.613.559 francs se répartissant par année comme porté à l’annexe modèle 949 du M.R.U.
Je précise que sur ce total il y a :
1°) au 30 juin 1949 :
a) une dépense de 52.772.686 Fr représentant des remplacements de gros outillage pour une valeur 1939 de 5.780.555 Fr
b) une dépense de 46.548.300 frs de dépenses d’installa­tions générales pour une valeur 39 de 3.186.000 Fr
c) une dépense de 1.293.308 frs de mobilier pour une valeur 39 de 117.390 frs.
2°) dans le 2ème semestre 1949 :
une dépense de 25.999.260 frs dépensée sous les trois rubriques précédentes.
Ces remplacements appellent de ma part les observations suivantes >
1°) a) Ces dépenses ont été vérifiées en détail et leur valeur résulte d’une analyse des dépenses et de la traduction de ces dépenses en valeur 1939 à la date des commandes et compte tenu des conditions de vente (ventes suivant hausses homologuées ou sui­vant formule de révision de prix) d’où résultait le prix payé à la livraison.
Ces dépenses sont donc sûres.
1°) b et c) L’on remarquera ici d’une part que le coefficient de remplacement des installations générales est assez élevé - 14,6 - d’autre part que les remplacements de mobilier sont peu nombreux 10 % environ.
Pour ces dépenses il y a lieu de signaler que du fait du bouleversement du chantier et des modifications profondes apportées à l’implantation des ateliers dans la reconstruction qui est encore en cours, les installations générales ont dû être faites relativement plus tard que les précédentes.
Pour le mobilier, la reconstruction des bureaux n’est commencée que depuis six mois et le gros oeuvre de l’immeuble n’est pas encore achevé.
Quand les devis des installations générales seront terminés et vérifiés, je compte apporter une attention particulière à la date des remplacements.
Quoiqu’il en soit, les dépenses présentées sont des dépenses faites, qu’il y a lieu par conséquent d’accepter.
J’ai tenu compte d’une exagération possible dans la présentation de ces dépenses en adoptant pour les dépenses restant à faire au 1° janvier 1950 un coefficient modéré, 16,1.

B - Dépenses de réparations
Les dépenses de réparations autres que électricité-eau-air comprimé-téléphones présentées au 31 décembre 1949 sont en annexe 10, par année. Elles se montent à 54.647.246 frs e t correspondent à environ 400.000 heures.
Il est à remarquer déjà que ces dépenses ne sont pas celles qui résultent de la comptabilité du sinistré mais celles qui résultent de l’application des frais généraux de l’expert. Il y a déjà là une réduction importante sur la main-d’oeuvre.
Comme je l’ai déjà indiqué, la comptabilité du sinistré est très bien tenue et il dispose de machines de mécanographie qui offrent de très nombreuses possibilités de vérification.
Le travail de redressement des erreurs d’imputation d’une machine à une autre est très avancé et un grand nombre de comptes sont dès maintenant vérifiables. Ils sont présentés d’une façon suffisamment détaillée pour permettre une bonne vérification.
J’ai vérifié tous les comptes qui m’ont été présentés et qui représentent un peu moins de 25 % des dépenses de main-d’œuvre.

Observations générales.

La vérification a porté sur les dépenses de matières et de main-d’oeuvre.
Les dépenses de matières ne donnent en général pas lieu à observations et sont normales, sauf que l’on constate fréquemment des oublis de matières. Le cas est très apparent pour des moteurs ou des appareillages électriques remplacés par du matériel de rechange pris dans l’atelier et qui ne donne pas lieu à la délivrance d’un bon de matières.
Mon attention s’est naturellement portée sur les dé­penses de main-d’oeuvre. Il n’est bien entendu pas possible de chiffrer ces dépenses d’une façon mathématique, comme pour les travaux immobiliers par exemple. J’ai tenu compte d’ailleurs, comme la suggestion m’en a été faite par une délégation départementale, d’une certaine majoration admissible des temps pas­sés, au moins jusqu’en juin 1945, pour tenir compte de la per­turbation apportée dans les travaux de réparations par les alertes, ainsi que par le freinage du travail avant la Libération ou par la désorganisation relative des ateliers après la Libé­ration.
J’estime que cette majoration, d’ailleurs variable avec le genre de travaux, ne dépasse pas 5 à 10 % et qu’elle est compensée dans une mesure non négligeable par des oublis de report de dépenses de main-d’oeuvre.
En résumé, je n’ai pas la prétention d’avoir vérifié tous les travaux à moins de 5 à 10 % près, mais il m’apparait en particulier pour les raisons ci-dessus, que les dépenses sur lesquelles je n’ai pas fait porter de réduction sont rai­sonnables et correctes.
Les dépenses qui, par contre, n’ont pas paru exagérées ont subi des abattements. Ces réductions sont variables.
Elles sont de l’ordre de 8% environ en moyenne et seront indiquées ci-après. Les réductions ont porté d’ailleurs également sur des dépenses qui auraient dû être imputées à des travaux d’entretien, mais celles-ci sont faibles, car dans la majorité des cas on peut retrouver des dépenses d’entretien normales faites sur un compte d’entretien en même temps que les réparations de dommages de guerre.
Les vérifications ont porté sur les cinq groupes de réparations suivants :
a) postes de coupage 3.846 heures - matières 88.304 Fr
Ce poste comprenait un grand nombre de travaux provisoires que je n’ai pas acceptés. J’ai réduit les heures à 443 et la dépense matières à 7.226 frs.
b) Grosse réparation de la grue G.5 Applevage ou quasiment détruite. On trouvera en annexe 13 le détail de cette réparation qui est pour ainsi dire une reconstruction, d’ailleurs faite car le constructeur de la grue : Applevage, avec le concours du chantier.
c) Réparation de toutes les grues qui ont subi après chaque bombardement des avaries qui ont dû être réparées avant ou elles ne soient sabotées au départ des allemands.
La réduction sur ces réparations qui sont de l’ordre de 650.000 francs est d’environ 5,2 %. Elle porte principalement sur la main-d’oeuvre.
d) Travaux conservatoires représentant 1.110.760 francs tout en main-d’oeuvre. J’ai accepté ces dépenses qui ont été faites en général dans des circonstances difficiles. Je renvoie pour le détail des dépenses par année, à l ’annexe 12.
e) Réparations de machines-outils ou de gros outillage représentant 14% de ces réparations.
Sur un total de 50.024 heures, j’ai fait une réduction de 4.300 heures soit 8,6 %. Je n’ai pas fait en géné­ral de réduction sur les matières dont les prix étaient souvent inférieurs aux cours et pour lesquels il a d’ailleurs été nécessaire de faire une réévaluation. Je renvoie à ce sujet à mon rapport n° 4. En outre, comme déjà indiqué, j’ai pu constater de fréquents oublis d’imputation, principalement de matières.

Conclusions : En pratique, j’ai apporté à tout le reste des réparations non examinées une réduction de 8,6% sur les dépen­ses de main-d’oeuvre déjà réduites, je le rappelle par le jeu des frais généraux réduits adoptés par l’expert.
L’on trouvera en annexe 11 l’état correspondant à l’annexe 10 des dépenses de réparations retenues.
Les chiffres à rapprocher sont les suivants :
Dépense présentée au 31 décembre 1949 = 54.647.246 frs
Dépense retenue au 31 décembre 1949 = 50.855.984 frs
qui se partage en :
Dépense de réparations proprement dite = 49.744.224 frs
Dépense de mesures conservatoires = 1.110.760 frs
Deux grosses raboteuses horizontale et verticale du grand ajustage A2 et A3 pesant 45.000 K° chacune, ont subi des dommages divers qui nuisent grandement à leur utilisation.
L’une d’elles a été considérée par Exmo comme « difficilement réparable ».
J’ai estimé les parties qui devaient être obligatoirement remplacées et celles qui pouvaient rester sans réparations malgré les avaries subies (éclats dans les glissières par exemple). L’on trouvera en annexe 14 le devis de ces réparations qui se monte d’une façon très modérée à 4.650.000 francs en valeur actuelle. 
En définitive avec le reliquat des autres réparations il faut compter au 31 décentre 1949 sur un chiffre d’environ 6 millions de francs de dépenses restant à faire. C’est le chiffre que j’ai inscrit dans la fiche récapitulative 949 du M.R.U.
Valeur 1939 des réparations. Je renvoie au chapitre 11 para­graphe B du présent rapport qui a donné les valeurs 1939.

C - Petit outillage et stocks
1) Petit outillage
Je renvoie à l’annexe 16 où le calcul de la valeur de trois mois de consommation est fait ainsi que celui de la va­leur de remplacement du petit outillage.
Cette valeur est en tenant compte des différents sinistres successifs survenus :
5.333.390 frs
Dans le cas où la perte totale pourrait être reconstituée, la somme précédente deviendrait :  7.746.545 frs
Il n’a été tenu compte dans le présent rapport que de la première somme.
2) Stocks.
Je renvoie à l’annexe 17 analogue à la précédente.
La valeur de remplacement des stocks est au minimum de :
5.498.336 frs
Dans le cas où la perte totale pourrait être recons­tituée la somme précédente deviendrait :
8.909.303 frs.
Il n’a été tenu compte dans le présent rapport que de la première somme.

V – Récapitulation générale
L’on trouvera cette récapitulation dans le document 949 du modèle du M.R.U qui a été adressé au M.R.U le 15 décem­bre 1949.

VI – Conclusions
1° - La valeur 1939 du dommage est d’environ
42.064.450. fr
2° - Les dépenses antérieures à 47 s’élèvent à : 
Outillage : 39.500.094 frs
Stocks : 10.831.726 frs
Total : 50.331.820 frs
3° - Les dépenses de 1947 s’élèvent à :
Outillage : 26.076.313 frs
4° - Les dépenses de 1948 s’élèvent à :
Outillage : 87.834.140 frs
5° - Les dépenses de 1949 s ’élèvent à :
Outillage : 82.205.776 frs
6° - Les dépenses totales s’élèvent à :
246.448.049 frs
7° - Les dépenses restant à faire s’élèvent à environ :
116.200.000 francs

Paris le 28 décembre 1949.
Signé Borde

Ci-après une note complémentaire au sujet des honoraires.

Note complémentaire concernant les honoraires pour l’expertise des dommages de guerre professionnels des Ateliers et Chantiers de la Seine Maritime

Sauf en 1947 je n’ai jamais parlé dans mes rapports des honoraires de l’expert, pensant qu’il appartenait au MRU de les fixer. Je viens d’apprendre qu’il est nécessaire que je fasse une demande à ce sujet.
Les dépenses qui font l’objet du présent rapport s’élèvent à un total au 31 décembre 1949 de 246.448.049 frs se répartissant dans le temps de la façon suivante :

 

 

Coefficient

 

Avant 1946

50.331.820

12/3

205.000.000

En 1947

26.076.313

12/7,5

41.500.000

En 1948

87.834.140

1

87.800.000

En 1949

82.205.776

1

82.200.000

Total

246.448.049

 

416.500.000

La date moyenne de l’expertise commencée en mars 1947 peut être prise d’une façon modérée à fin 1947 début 1948 conduisant au coefficient 12 pour toutes les dépenses antérieures à cette date moyenne. Le calcul de la revalorisation des dépenses est fait ci-dessus et conduit à une somme de 416.500.000 francs.
Toutes les estimations ont été faites pour ainsi dire. Les dépenses n’ont été vérifiées que dans une proportion de 60 %. J’applique un coefficient moyen de 75 % aux dépenses ci-dessus, ce qui donne environ 310 millions.
Le calcul des honoraires maxima donne :
Pour 100 millions : 2.765.000
Pour 210 millions : 2.100.000
Total : 4.865.000 frs
Dont les 70 % pour le bureau d’études du sinistré sont : 3.405.000 frs
Le sinistré ne m’a pas encore fourni de relevé détaillé des dépenses de son bureau d’études, mais il devrait pouvoir être possible de lui verser dès maintenant les 75 % de la somme ci-dessus doit : 2.500.000 frs. Les 30 % : 1.460.000 frs.
L’expertise des dommages du chantier du Trait est le type de l’expertise qui doit conduire au paiement des honoraires maxima/
L’expertise dure depuis 34 mois pendant lesquels l’expert s’est régulièrement déplacé deux fois par mois de Paris au Trait, ce qui correspond à des absences de 1 à 2 jours.
Je propose dans ces conditions de fixer pour l’instant les honoraires de l’expert à la somme ci-dessus arrondie à :
1.400.000 francs
J’ai déjà reçu des Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime au 31 décembre 1949 une somme de : 659.000 frs.

Paris, le 28 décembre 1949.


 

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