1945.04.27.De Hypolite Worms.A Gabriel Le Roy Ladurie.Original

Original

27.4.45

Mon cher Gabriel
Je n'ai pas eu l'occasion de vous écrire depuis votre accident parce que je n'avais pas votre adresse, mais j'ai eu régulièrement de vos nouvelles et j'espère que cet accident stupide n'aura aucune suite et qu'après quelques semaines de convalescence, vous pourrez reprendre votre vie militaire active.
Je sais qu'on vous a ramené à Paris et Simone T. m'a dit que vous alliez poursuivre incessamment votre rétablissement à la campagne, vraisemblablement chez votre sœur. J'espère en avoir bientôt la confirmation parce que, très franchement, mon cher Gabriel, je suis inquiet de vous savoir à Paris.
Quelles que soient votre prudence et les précautions que vous prenez pour conserver votre incognito, quelle que soit la réserve que vos amis intimes pensent mettre pour la préserver, il n'est pas possible que votre séjour à Paris ne soit pas connu ; il est certain que cette présence fera tiquer tous les esprits malintentionnés et ils sont nombreux - qui nous poursuivent de leur haine, de leur rancune ou simplement de leur jalousie.
Or la mesure de liberté provisoire prise en votre faveur a été destinée à vous permettre de partir au front, et certainement pas de rester en résidence à Paris, même en convalescence.
Raymond pourra vous dire, d'autre part, que le règlement favorable, et même définitivement favorable, de notre affaire, qu'on espérait imminent il y a quelques semaines, semble retardé "sine die" pour toutes sortes de raisons que mon éloignement ne me permet pas de saisir vraisemblablement parce que nos ennemis ne désarment pas.
L'arrivée, enfin, du maréchal à Paris, avec sa suite, va causer des remous dont l'ampleur ne pourra que s'accroître, et cela n'est certainement pas de nature à amener l'apaisement dans les esprits.
C'est pourquoi, si vous êtes encore à Paris, je vous demande instamment d'en partir immédiatement et d'aller aussi loin que possible terminer votre convalescence. Il faut que vous suiviez ce conseil que je vous donne avec toute mon amicale insistance.
Très affectueusement à vous,

H. Worms

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