1945.01.27.Du journal Action.Article

Coupure de presse

Le PDF est consultable à la fin du texte. 

Action
27 janvier 1945

Un autre truc

C'est celui employé par la maison Worms et Cie dont les participations et les filiales sont innombrables : banque, compagnie de navigation, négoce du charbon, assurance, machines à écrire Japy, Brandt, etc.
On sait que M. Hippolyte Worms est interné pour commerce avec l'ennemi, qu'un autre gérant, M. J. Barnaud, ministre de Vichy des relations économiques franco-allemandes, est actuellement en fuite, que Pucheu était un commis de Worms et que le directeur de la banque Worms était le frère de Le Roy Ladurie.
Tout ce joli monde ne tient pas du tout à ce qu'un comité d'entreprise vienne mettre son nez dans les affaires. Comme les membres éligibles du comité d'entreprise devront être désignés par les syndicats, il faut et il suffit pour la direction d'avoir les syndicats du personnel bien en main.
Aussi, la direction actuelle du trust Worms, parmi laquelle se trouve d'ailleurs un inspecteur des Finances, parent d'Hippolyte, a-t-elle pressenti les employés pour que soit reconstitué le syndicat professionnel maison créé en 1936 sur l'initiative de M. Barnaud, cité plus haut.
Et pour décider tout le monde, le syndicat va constituer un livret de caisse d'épargne aux prisonniers membres du personnel.

Touchante attention

Le syndicat professionnel de la maison Worms s'est empressé d'organiser une manifestation de sympathie, en faveur de son "sieur Hippolyte Worms", injustement incarcéré.
Les délégués des succursales ont été invités à diffuser dans le personnel le texte suivant qu'ils devront réexpédier "par retour du courrier" une fois que les employés y auront "librement" apposé leurs signatures :
« 5 janvier 1945. - Péniblement déçu dans l'attente de vous voir libre avec la nouvelle année, votre personnel vient exprimer ici à son chef vénéré et aimé les sentiments qu'il a contenus pendant quatre longs mois.
Les signatures apposées plus loin sont plus qu'une ardente et unanime protestation de fidélité et de dévouement envers votre personne.
Vous y verrez battre le cœur de votre maison si durement frappée dans des chefs unis dans son affection comme ils sont unis dans l'épreuve.
Nous n'oublions pas qu'en venant, à l'heure des responsabilités, reprendre votre place à notre tête face à l'ennemi, vous avez choisi d'être notre défenseur et notre rempart.
A la reconnaissance de vos employés s'ajoute celle de leurs familles qui, par milliers, vous doivent d'avoir pu conserver une assise matérielle et morale sans laquelle, pendant les longues ténèbres de l'occupation, toute espérance eût été vaine.
Cette espérance, nous la gardons intacte pour croire à la fin très proche de votre épreuve qui, en vous libérant, nous libérera aussi. »


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