1945.01.18.De Hypolite Worms.Note

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Je fus arrêté le 7 septembre 1944 par deux agents de la police judiciaire et conduit au commissariat de police de la rue Amélie. J'y subis deux interrogatoires puis fus libéré le lendemain vers 16 heures.
A 21 h. 30, le même jour, deux autres inspecteurs de la police judiciaire vinrent m'arrêter à nouveau à mon domicile et me reconduisirent rue Amélie, où je demeurai cinq jours.
Le 12 septembre, je fus transféré à Drancy, puis, dans la même journée, à la préfecture de police jusqu'à 16 heures et, de nouveau, à Drancy où je restai deux jours.
Le 14 septembre enfin, je fus amené à Fresnes et placé dans la section des prévenus où je retrouvai Gabriel Le Roy Ladurie, arrêté le même jour que moi et qui avait échoué là après des péripéties diverses.
Le 19 septembre, le commissaire Perez nous fit venir à la préfecture de police et nous notifia que nous étions inculpés « d'atteinte à la sûreté de l'État », conformément à l'article 75, et que Monsieur Thirion, juge d'instruction, avait été commis à cet effet.
Ensuite de quoi, l'on procéda en notre présence à une perquisition à notre bureau, 45, boulevard Haussmann, et à nos domiciles respectifs.
Nous fîmes spontanément remettre au commissaire Perez et à ses adjoints, par nos différents directeurs, tous les dossiers de notre Maison, qui pouvaient avoir un rapport quelconque, même indirect, avec les autorités allemandes, notamment « Constructions navales du Trait » et « relations avec la Commerzbank », sur quoi nous fûmes interrogés par la suite.
Le 23 septembre, Monsieur Thirion nous fit subir l'interrogatoire d'identité et nous mit sous mandat d'arrêt, régularisant ainsi une situation anormale, puisque nous étions en fait arrêtés depuis 16 jours sans avoir été inculpés. Le lendemain matin, nous étions transférés dans le quartier « politique ».
Le 26 septembre, je subis mon premier interrogatoire sur le fond, en présence de mes deux avocats, Maîtres Poignard et Lénard.
A cette occasion, je fis devant le juge d'instruction un historique aussi précis que possible de mon activité personnelle (mission à Londres au début de la guerre) et de celle de la Maison Worms & Cie dans ses quatre départements, tant avant la guerre que pendant les quatre années d'occupation.
Je ne crois pas utile de reprendre ici les différentes phases de l'instruction (les procès-verbaux de nos interrogatoires suffisent).
Dès fin octobre, Monsieur Thirion signait d'office une ordonnance de mise en liberté provisoire, mais, devant l'opposition du Parquet, à la suite de diverses accusations portées contre certaines sociétés dans lesquelles la Maison Worms avait des intérêts, quelquefois minoritaires seulement, l'instruction fut poursuivie. Elle démontra l'inanité de ces accusations.
Le juge entérina alors, le 18 novembre, la demande de mise en liberté que nous formulions, pour la retirer quelques jours plus tard, en raison de nouvelles insinuations plus fragiles encore, dont nous eûmes à cœur de nous justifier.
Convaincu de notre innocence, Monsieur Thirion signa, le 9 janvier 1945, notre mise en liberté provisoire qui fut le jour même déposée au Parquet.
[Le texte se poursuit par la relation des résultats de l'enquête et des remarques personnelles d'Hypolite Worms : anglophilie et liens historiques de la Maison avec l'Angleterre, services rendus à la cause alliée dans le cadre de sa mission à Londres en 1939-1940, attitude lors de l'armistice et retour en France, accusations de la part de la presse relativement au rôle politique de la Maison et de son chef dans le gouvernement de Vichy. Ces arguments sont développés dans une note du 20 janvier 1945.]

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