1940.10.17.De Charles Dieudonné - journal La France au Travail.Article

NB : Cet article provient d'un recueil de coupures de presse datées du 17 octobre 1940 au 21 décembre 1941, qui est classé au 17 octobre 1940.

La France au travail
17 octobre 1940

"La bonne foi nécessaire - Il sera bien difficile de recommencer à vivre"

Les mensonges qui nous ont fait tant de mal ne sont pas encore dissipés. Il y a, en France, beaucoup de francs-maçons qui maudissent ouvertement les sociétés secrètes et qui préparent en secret de nouvelles sociétés. Depuis le 15 juin, le juif est presque introuvable. Tel qui fréquentait la synagogue et se soumettait aux règles du sabbat ne rate plus une messe et jeûne tous les vendredis. Avec de bonnes rentes, c'est bien le diable si l'on ne peut pas se dégoter deux grands-mères aryennes et un grand-père déjà converti. Quand il s'appelle le comte de Francfort ou le baron de Cisailles, M. Kohn ou M. Lévy se croit à l'abri des décrets. Le bourgeois déclare d'un ton grave : "La crise est terrible. Chacun devra consentir des sacrifices. Et il pense, à part soi : "Comment vais-je me tirer d'affaire ?" On parle d'une économie révolutionnaire et il n'est personne qui ne se dise prêt à accepter les idées nouvelles. Il faut vivre avec son temps, voyons ! Mais les préjugés sont tenaces. Sur cinq français, il y en a quatre qui ne peuvent concevoir un monde où le profit ne régnerait point en maître. L'immense majorité persiste à croire que la richesse crée le travail, alors que c'est le travail, au contraire, qui crée la richesse. Aucun redressement véritable n'est possible si l'on ne se décide pas à jouer franc-jeu. La partie de cache-cache entre les deux France, durera-t-elle longtemps encore ? Vichy ne met qu'une bonne volonté apparente à faciliter la reprise économique. On apprend avec stupeur que le chef du cabinet de la Production est un ancien fondé de pouvoirs de la Banque Worms. En zone non occupée, les directeurs d'une importante société qui administre tout ensemble de grands magasins et de grands hôtels tiennent des conciliabules avec le manitou d'un établissement de crédit en Suisse, M. Grandjean, qui a toujours servi les intérêts financiers de l'Angleterre. Le département de la Seine manque de carburants. Il avait droit à plus de 8 millions de litres d'essence au mois d'août. Il n'en a reçu que 3.300.000. Tout le reste a été vendu à 20 ou 30 F le litre par les hommes de paille de la Standard Oil, de la Shell ou de l'Anglo-Iranian Cy. Nous sommes dans une impasse ? La combine, la contrebande et la resquille ne nous en feront pas sortir. La bonne foi est plus que jamais nécessaire. À l'Europe de demain, la France peut apporter sa collaboration. Mais il faut que cette collaboration soit loyale.

Charles Dieudonné


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