1893.10.17.De A. E. Monod - Worms Josse et Cie Marseille

NB : La copie image de ce document de très mauvaise qualité n'a pas été conservée.

17 octobre 1893
(soir)
M. Worms Josse & Cie
Paris

Messieurs,
Excusez-moi si je vous écris très brièvement, mais à la suite d'une nuit extrêmement fatigante, au cours de laquelle je suis rentré à Marseille, voyageant debout dans un couloir de compartiment de chemins de fer, je me trouve un peu débordé par les détails du travail que je veux mettre à jour avant une nouvelle absence.
Je vous confirme ma dépêche d'hier soir, de Toulon, vous informant qu'il n'y avait rien à faire pour la "City of [Cruro]". J'ai été indignement joué par le vice-consul auquel je n'ai pas caché ma manière de penser du moment que, le parti pris, il était résolu à laisser gaspiller les fonds de son gouvernement, pourvu qu'il en tirât quelques profits, le moins qu'il pût faire était de m'avertir immédiatement et de m'économiser du temps et de l'argent. Le matin même où il me donnait rendez-vous pour le soir, il savait qu'il n'aurait pas autre chose à me dire que ce qu'il m'a dit en effet, c'est-à-dire que les fournitures étaient définitivement données, que pour ce qui concerne le charbon, la marine russe aurait sans doute à payer deux ou trois francs de plus par tonne que si elle avait traité avec nous, mais que c'était une bagatelle, qui, du reste, rendait tout plus commode.
J'étais et suis indigné en même temps que navré d'avoir si mal réussi et d'avoir compromis inutilement la dignité, sinon de votre maison qui est au-dessus de cela, du moins de la personnalité de celui qui, dans la circonstance, la représentait.
Avant de quitter Toulon, j'ai vu M. Romano, l'un des trois fournisseurs attitrés, et il m'a promis ses ordres, dont il nous a donné le premier aujourd'hui pour 400 tonnes.
D'après ce que je vous ai dit de la façon dont j'ai été reçu, et que je vous développerai verbalement, vous comprendrez qu'il ne m'ait pas été possible de faire quoi que ce soit en vue du charbonnage à Port-Saïd de celui des bateaux de l'escadre qui doit se rendre dans l'Extrême-Orient. Heureusement que M. [Brown] est d'une autre composition que le vice-consul de Toulon et je suis sûr que la maison de Port-Saïd s'entendra facilement avec lui.
J'ai reçu ici votre lettre personnelle d'hier et je vous prie d'agréer mes remerciements les plus sentis pour ce que vous voulez bien me dire au sujet de votre conviction que, malgré l'insuccès, j'ai fait tout ce qui dépendait de moi pour réussir. Ce témoignage si délicat de votre part a été un adoucissement aux impressions pleines d'amertume que j'ai rapportées de Toulon et je vous en sais un gré infini.
Je vous remercie également très sincèrement de votre gracieuse invitation pour dimanche. Ce sera un grand honneur et un grand plaisir pour moi de me joindre à vous, à Mlles Goudchaux, marraines de la "Thérèse-et-Marie", et à vos amis dans la charmante excursion dont vous me parlez.
Au moment où j'ai reçu votre lettre, j'allais précisément vous écrire que très préoccupé du silence persistant de M. Vautier, je croyais sage de lui faire une première visite au moins, le plus tôt possible, quitte à m'arrêter de nouveau à Lyon, puisque je dois en tout cas y repasser à mon retour de Paris.
Mon plan est donc de partir demain ou après-demain pour Lyon, et de là poursuivre à Paris, où je pourrais vous communiquer les impressions que m'aura produites mon entretien avec M. Vautier.
Si vous avez quelque chose à me communiquer, veuillez adresser chez mon frère, M. L. Monod, 5, rue [Gala], Lyon.
Veuillez agréer, Messieurs, mes salutations très distinguées.

A. Monod

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