1944.11.08.Note (sans émetteur ni destinataire)

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8 novembre 1944

Note sur les transports maritimes

Les renseignements un peu confus qui nous étaient parvenus par bribes, et dont beaucoup étaient contradictoires, ont été un peu clarifiés.
Les grandes lignes de l'organisation successive des transports maritimes se dégagent maintenant plus nettement. On peut distinguer trois périodes :
1° - celle de la "France combattante" qui va de juin 1940 au 8 novembre 1942, date du débarquement en Algérie ;
2° - celle qui va du 8 novembre 1942 au 3 juin 1943, date à laquelle s'est créé le Comité français de libération nationale ;
3° - celle qui se termine ensuite au 6 juin 1944, date du débarquement en France,
et pendant lesquelles on peut envisager la situation sous deux aspects :
- celui de l'organisation des Transports maritimes,
- celui de l'utilisation de la flotte.

1° - Première période
a) - Organisation - Celle-ci est réduite à sa plus simple expression et un compte spécial des Transports maritimes enregistre simplement les recettes et les dépenses dont l'état est tenu par les services de la Marine marchande, qui dépendent du Comité national de Londres, lequel régit, au point de vue Marine marchande les territoires ralliés au général de Gaulle avant le 8 novembre 1942 et contrôle les navires de commerce français réquisitionnés et exploités par la Grande-Bretagne.
b) - Utilisation de la flotte - Celle-ci est sous réquisition britannique et comprend aussi bien les bateaux saisis et [avariés] par les Anglais que les bateaux ayant rallié volontairement le gouvernement de Gaulle.
C'est également la situation où se trouvent les unités saisies ou réquisitionnés par les États-Unis et le gouvernement panaméen.

2° - Deuxième période - Débarquement en Afrique du Nord
a) - Organisation - Un nouveau régime s'ajoute au précédent. Il est placé sous le vocable "Afrique du Nord et AOF". Par ailleurs, se distinguant des services de la Marine marchande dépendant du Comité de Londres apparaît l'"Office de la marine marchande en Afrique" (OMMA).
Un nouveau compte des TM enregistre dans des parties distinctes les opérations antérieures au 8 novembre 1942 et les opérations postérieures à cette date.
L'OMMA, sous la double autorité de l'amirauté et du secrétariat aux communications, régit tous les navires français trouvés le 8 novembre 1942 dans les ports de l'Afrique du Nord et de l'AOF, qui représentaient alors 370.000 t. de jauge brut, plus 110.000 t. de navires avariés dont 50.000 t. sont considérées comme inutilisables, la "Ville-du-Havre" faisant partie de cette deuxième catégorie.
b) Utilisation de la flotte - Elle est régie par les accords Darlan/Clarke du 22 avril 1942 et par les accords du 18 décembre 1942 amplifiés par les accords du 13 mars 1943, en vertu desquels :
1) 50 cargos représentant 170.000 t. d'un port en lourd unitaire inférieur à 5.000 tdw plus quelques paquebots ; sont laissés à la disposition des autorités françaises pour être exploités entre les ports de l'Afrique française.
Ils constituent la liste B et relèvent de la charte-partie d'affrètement, du contrat de gérance commercial et du contrat de gérance technique.
2) 21 cargos d'un total de 105.000 t. ; 9 paquebots d'un total de 95.000 t.
affrétés coque nue au général commandant les forces américaines et anglaises et constituant la liste A.
Ces unités, armées d'équipages français et battant pavillon français sont exploitées par le pool interallié.

3°- Troisième période - du 3 juin 1943 au 6 juin 1944
a) - Organisation - Le Comité national de Londres devenant le Comité français de libération nationale et prenant autorité sur tous les territoires français libérés, sans distinction, l'OMMA se transforme parallèlement pour devenir la direction de la Marine marchande et des transports maritirres (ordonnance du 7 juillet 1943).
Le compte spécial prend le nom de compte spécial des Transports maritimes. La fusion des régimes différents d'Alger et de Londres est réalisée et la Marine marchande ne dépend plus de la Marine militaire que pour les questions de convoi et d'AMBC.
Enfin est constituée une représentation de l'armement français sous le nom de Comité des armateurs d'outre-mer qui groupe l'ensemble des armateurs ou de leurs agents dépendant du CFLN, M. Laurent Schiaffino en assure la présidence.
b) Utilisation de la flotte - Les accords du 1er mars 1944 répondent à la préoccupation du CFLN de ramener sous le contrôle français l'ensemble de la flotte de commerce échappant à l'emprise de l'Axe.
Deux catégories nouvelles sont prévues :
A - Location en "Gross Time Charter" - soit au Ministry of War Transport (MOWT) soit au War Shipping Administration (WSA)
1) 94.000 tjb, représentés par 17 navires de la liste A, y compris 4 paquebots (35.000 t.),
2) 43.000 tjb, représentés par 6 navires des Antilles les (15/7/43) "Bahram", "Bourgogne ", "Limousin", "Robad , "Orégon", "Sagittaire",
3) 32.000 tjb, représentés par 6 navires ralliés volontairement à de Gaulle et déréquisitionnés par les Anglais,
4) 42.000 tjb, déréquisitionnés par les gouvernements américain et panaméen.
B - Sous "Management agreement" - qui n'est autre qu'un contrat de gérance technique.
142.500 t. représentées par 34 navires qui restent sous réquisition britannique mais sont gérés par le CFLN pour le compte de la Grande-Bretagne.
Nota. L'exploitation des navires de l'une et l'autre catégorie qui tous portent le pavillon français et ont un équipage français est assurée par le pool interallié.
En ce qui concerne les rapports du CFLN et des armateurs français, la charte-partie d'affrètement du 15 septembre 1940 ou le contrat de gérance technique du 28 novembre 1940 reste en vigueur.
Seul, le contrat de gérance du 15 septembre 1940 ne peut recevoir application puisque l'exploitation des navires est assurée par le pool interallié.
En ce qui concerne les quelques navires français toujours réquisitionnés et restés, par suite de leur utilisation spéciale, sous contrôle intégral des alliés (gérance et exploitation), il est prévu qu'ils pourraient recevoir des équipages français et porter le pavillon français.
En résumé, la situation du tonnage français apparaît de la façon suivante :
1) 110.000 TJB de la liste B, exploités directement par la DMM et TM,
2) 216.000 TJB loués en "Gross Time Charter" au pool interallié,
3) 142.500 TJB exploités par le pool et gérés sous "Management Agreement" par la DMM et TM,
4) 106.000 TJB restant affrétés coque nue au pool.
Resteraient en dehors des accords :
- 60.000 TJB de paquebots et troopers (de l'ancienne liste B),
- 130.000 TJB de troopers, 24.500 TJB de cargos.
soit, en tout, 789.000 TJB dont 574 sous contrôle français.


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