1945.01.23.De Jacques Barnaud.A Hypolite Worms.Original

Original

 

Mardi, 23 janvier 1945

Mon cher Hypo,
Mon vœu le plus cher est accompli maintenant et j'ai eu hier soir dans ma cellule le premier mouvement de vraie joie depuis trois mois en apprenant la bonne nouvelle. Un grand poids m'est ôté et je vous embrasse très tendrement ainsi que Dolly.
Je suis heureux qu'Air France m'ait au moins donné la possibilité de vous apercevoir de temps à autre pendant quelques semaines ; il me semble que je vous ai quitté depuis moins longtemps et j'ai été si apaisé de sentir là-bas que vous étiez toujours le même à tous points de vue, celui auquel je me suis attaché avec tant d'affection depuis vingt ans, une affection qu'aucune des circonstances ou des épreuves que nous avons encore à traverser ne pourra atteindre.
Je suis aussi plus en repos en songeant au sort de votre, de notre vieille maison où nous avons vécu si longtemps fraternellement côte à côte ; vous allez pouvoir en reprendre peu à peu et sans heurs la tête et je sais que chacun du haut en bas de l'échelle sera si heureux et si fier de savoir que vous êtes à nouveau là. Sans doute n'allez-vous pas avoir au début toutes vos possibilités d'action, mais qu'importe puisque l'avenir est à nouveau grand ouvert.
Je pense aussi à votre fille et à vos petits-enfants ; votre plus grand désir, à Dolly et à vous, va être maintenant de les voir et je pense, à la tournure des événements, que cette joie pourra vous être réservée bientôt et ce sera la véritable fin de toutes vos épreuves.
Bernadette vous embrassera tous deux pour moi ; sa présence au milieu de vous pendant ces beaux jours vous apportera la mienne, si réelle et si heureuse.

[Jacques Barnaud]


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