1938.08.Le réveil du Trait.ACSM

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Le réveil du Trait, organe local du parti communiste

Journal mensuel. Le numéro : 25 centimes.

Août 1938

Les vacances finies
Au moment où paraît notre numéro du Réveil, les camarades du Trait les ouvriers et les techniciens viennent de profiter du congé payé.
Pour la troisième fois, les travailleurs ont connu la joie de se reposer pendant deux semaines et cette période des congés payés - tout comme les 40 heures - est une conquête du Front populaire à laquelle la classe laborieuse ne permettra pas que l'on touche.
Cependant, il faut bien dire la vérité. Aux camarades à qui l'on demandait il y a quelques semaines : « Où vas-tu passer tes vacances ? »
Combien ont répondu « Je ne sais pas... avec l'augmentation des chemins de fer... avec la vie chère ! » Et combien ont dû se priver du plaisir envi­sagé à cause de la situation actuelle ! Le Front populaire ce n'était pourtant pas cela, ce n'était pas les dévaluations successives et la hausse vertigineuse du coût de la vie orchestrée par les trusts laissés libres d'agir ; ce n'était pas cette politique de concessions et de capitulations dont les masses laborieuses sont les seules victimes.
Camarades, vous êtes attachés aux conquêtes de juin ; vous ne voulez pas qu'elles ne soient que des mots et vous attendez d'autres réponses ; vous êtes prêts pour cela à marcher de l'avant. La vie de l'atelier reprend pour une année, il faut que les mois qui suivront vous apportent des réalisations substantielles. Le Front populaire, toujours vivant, parmi vous, doit revivre dans les sphères gouvernementales et c'est à nous tous de donner l'impulsion. Forgeons une unité solide pour les luttes à venir ; renforçons l'unité du Front populai­re, resserrons encore les coudes dans les rangs de notre puissante CGT travaillerons à l'unité des deux grands partis prolétariens ; plus nous serons nombreux et unis pour clamer notre volonté de paix et de liberté et plus nous serons, certains de la victoire.
Louis Douay.

En raison des congés payés, nous nous excusons du retard apporté dans la parution de notre journal.

Fête du 14 juillet
Les manifestations de masses au Trait connaissent toujours un succès qui montre que le Front populaire n’est pas mort, que les ouvriers lui restent fermement attachés, et qu’il est un peu prématuré pour la réaction et le patronat de crier : Victoire !
La matinée du 14 juillet fut consacrée à la manifestation officielle et au défilé dans la ville. Au moment aux morts des gerbes furent déposées au nom des partis et des organisations de gauche. Sitôt après, les camarades ouvriers se rendirent au cimetière pour s’incliner devant la tombe de leur camarade Lemonier, précurseur du mouvement syndical au Trait. Le cortège groupant les travailleurs se dirigea ensuite vers le kiosque où se fit la dislocation, après que le camarade Gibouin, secrétaire de la section syndicale des métaux entouré des représentants des partis et des jeunesses communistes et socialistes, eut renouvelé le serment du 14 juillet 1935. Seule ombre au tableau de cette belle matinée : si la musique présente interpréta la Marseillaise, elle oublia l’Internationale et cela, les organisations de gauche sont en droit de le regretter et de demander qu’à l’avenir leur chant de lutte et d’union ne reste pas dans l’ombre.
L’après-midi fut consacrée aux jeux dans les trois principaux quartiers, ce qui fit la joie, non seulement des enfants de nos ouvriers, mais aussi des anciens qui participèrent à la course des vétérans. Enfin, la journée se termina par de joyeux bals.
Signalons aussi que la cellule communiste avait organisé un banquet fraternel pour ses membres et que ce banquet connut la gaité qu’il méritait.
En cette grande journée, tous les travailleurs se sont retrouvé unis dans la joue, nous souhaitons que cette union continue pour les luttes à venir, que cette union réalisée dans le renouvellement du serment du 14 juillet se continue pour réclamer le retour au programme du Front populaire et son application intégrale.
Le bureau de la cellule.

Pour nos conventions collectives
Depuis de longs jours nos dirigeants syndicaux luttent d’arrache-pied avec la Chambre patronale pour obtenir la révision de notre Convention collective. Devant l'obstruction systématique des patrons rouennais, nos camarades ont dû appuyer leur syndicat par une manifestation. Cette manifestation au Trait s'est passée dans le calme, mais elle était imposante par son ensemble et à sur­pris notre directeur par son ampleur.
Cela démontre que les ouvriers du Trait n'exige que leur droit mais qu'ils sont fermement décidés à l'obtenir.
René Gohon.

Lettre ouverte à M. le maire du Trait
Monsieur le maire,
Depuis un certain temps, nous recevons un nombre respectable de doléances d’habitants du Trait qui ont à se plaindre de la façon procéder du secrétaire de mairie. Devant le mécontentement grandissant de l’opinion publique, nous ne pouvons plus passer sous silence l’attitude trop longtemps connue de ce fonctionnaire municipal qui s’est attiré l’hostilité de la population dont il se moque sur toute la ligne.
En présence de ce personnage, agissant envers tout le monde avec une révoltante impolitesse, il est pénible pour un travailleur, pour une mère de famille ou pour toute autre personne à la recherche d’un renseignement, d’être empoisonné sans cause apparente. Et nous laissons de côté d’autres défauts non moins graves qui troublent l’esprit du secrétaire de mairie jusque dans l’exercice de ses fonctions.
Vous nous permettrez, monsieur le maire, de vous rappeler en passant comment le secrétaire de mairie s’est tristement illustré dans la tenue des registres de l’Etat-civil. À tel point, que si un enfant du Trait se retrouvait un jour sans acte de naissance régulier, nous n’en serions pas autrement surpris après les aventures que nos camarades Talbot, Delaplanche, Biville & Demerseman ont traversées.
Vous nous permettrez également de vous rappeler brièvement qu’il n’y a jamais eu à la mairie autant de « dossiers perdus » - mauvaise excuse qui ne nous laisse pas dupe – car ce serait nous faire supposer l’existence d’oubliettes à la mairie du Trait !
Pour ces manquements d’importance, monsieur le maire, nous n’avons pas connaissance que vous eussiez pris un seul instant la responsabilité d’une mesure exemplaire contre le coupable. Or, il faut bien le dire, le secrétaire de mairie étale son insolence dans la mesure où il ne trouve pas devant lui une volonté capable de l’arrêter. Votre mansuétude à son égard, monsieur le maire, qu’on peut aussi qualifier de coupable faiblesse, l’encourage à tel point que ce fonctionnaire se prend pour le grand caïd !
Eh bien, c’en est assez ! Il faut que cela change.
Payé, logé, éclairé aux frais des contribuables du Trait, le secrétaire de mairie doit surtout se soucier d’être serviable et dévoué envers la population du Trait qui le fait vivre. Qui pourrait blâmer nos camarades d’exiger du secrétaire la plus grande correction et la plus grande célérité dans la transmission de leurs demandes. Il n’en est malheureusement pas ainsi et c’est pourquoi il faut que cela change.
Vous voudrez bien reconnaître, monsieur le maire, la justesse et l’esprit de mesure de notre argumentation. Il n’entre pas dans nos intentions de monter en piédestal une « affaire Lemaître ». Nous voulons seulement que vous preniez les mesures de justice que réclame la population tout entière.
C’est tout !
R. Legendre.

PS : Nous portons à la connaissance de l’opinion publique le refus opposé par M. le maire du Trait à la venue dans nos murs du Cirque Casali. M. le maire du Trait croit-il que ses administrés sont favorisés outre mesure par les distractions ? Cette regrettable attitude ne peut qu’être jugée sévèrement par les habitants du Trait.
R. L.

Des logements convenables
Un de nos camarades nous signale les conditions dans lesquelles il doit loger toute sa famille. Sa maison ne comprend que 4 petites pièces et la famille compte 8 enfants. On imagine aisément les difficultés éprouvées lorsqu’il s’agit de faire coucher 10 personnes dans un espace aussi restreint. Voici bientôt sept ans que ce camarade réclame une maison un peu plus grande, sa demande justifiée reste sans réponse. La Société immobilière a parfois possibilité de donner satisfaction à de telles revendications, une répartition des maisons basée sur un peu plus de justice ne serait qu’une mesure normalement humaine.
Le bureau de cellule.

Jeunes sans travail
Depuis que nous sommes en République, il a toujours été de coutume à chaque gouvernement de faire beaucoup de promesses aux jeunes. Malheureusement, ce n’était que des paroles, les actes nous les attendons encore mais nous les voulons.
Il ne faut pas oublier que la jeunesse porte en elle l’avenir du pays c’est d’elle, dans santé, en son éducation et son instruction que viendra dans une importante mesure la prospérité de la nation.
Pourtant sous les gouvernements Doumergue et Laval, on a agi envers les jeunes ouvriers et paysans sans songer à l’avenir du pays.
Ces messieurs ne se sont pas privés de diminuer les traitements des jeunes fonctionnaires et ont même favorisé l’abaissement des salaires des jeunes ouvriers et employés, ils ont également diminué les postes d’instituteurs et réduit les crédits aux étudiants pauvres. Ils ont ainsi provoqué l’accentuation du chômage en complet accord avec les financiers et les trusts. Aussi, à l’heure actuelle, malgré les grandes améliorations que nous devons au Front populaire, il y a encore des jeunes qui ne sont pas heureux parce qu’ils n’ont pas de travail.
N’est-il pas honteux de voir des jeunes chômeurs qui ne demandent qu’à travailler être privés de leur droit à la vie ? N’est-il pas honteux de voir sous un gouvernement qui se dit Front populaire des vieux recevoir en fait de retraite une vulgaire aumône ?
Nous croyons, nous jeunes communistes, que donner leur dû à nos Vieux égale, dans une grande mesure, du travail pour les jeunes…
Henri Fravallo.

Amicale des vieux travailleurs du Trait
Le 9 juillet dernier, salle Leroy, l’Amicale des vieux travailleurs donna son premier bal de solidarité. Une foule nombreuse démontrant son attachement à la juste cause des Vieux répondit à leur appel.
À l’entracte, l’assistance reprit en chœur la chanson des Vieux travailleurs création du camarade Le Cloarec. Puis le président de l’Amicale, le camarade Moyon André, dit quelques mots de bienvenue et de remerciements au nom de tous les vieux qui attendent. Après quoi, notre camarade Gibouin secrétaire de la section locale du syndicat des métaux retraça en quelques mots simples mais précis la position de la CGT et les devoirs du gouvernement actuel envers les vieux travailleurs.
Nul doute que cette soirée dansante mise sur pied par l’Amicale des Vieux travailleurs du Trait au profit de sa caisse aura réconforté moralement ceux qui attendent non pas une aumône, mais l’aboutissement de revendications rendues nécessaires par la hausse vertigineuse du coût de la vie. Elle aura démontré au surplus que la population du Trait fait cause commune avec la si vivante « Amicale des Vieux travailleurs du Trait ».
Le bureau de la cellule.

Les chefs du prolétariat
Lénine
Après avoir étudié l’œuvre de Marx et Engels, les créateurs de la doctrine communiste, il nous faut voir celle de Lénine et de Staline qui ont complété et développé les enseignements des premiers maîtres du socialisme scientifique en les adap­tant à la période actuelle.
Lénine, fondateur du Parti bolchévik s'est attaché à montrer que le marxisme n'est pas un dogme qu’il faut suivre aveuglément, c'est un guide pour l'action. Il a prouvé, malgré ses adversaires, Trotski en tête, que la construction du socialisme était possible dans un seul pays à l'aide de la dictature du proléta­riat constitué en soviets.
Vladimir Hitch Oulianov (Lénine) est né en 1870. Obligé d'interrompre des études brillantes pour avoir participé à un mouvement de révolte d'étudiants, il découvre le marxisme, il s'en assimile la doctrine et crée en 1895 la Ligue de combat pour l’affranchissement de la classe ouvrière. Les années qui suivent, il les passe en Russie et à l'étranger pour préparer l'agitation. Des pei­nes de prison et de déportation en Sibérie s'abattent sur lui. Il continue sa vie militante ; il participe hardiment au mouvement révolutionnaire de 1905, mouvement né de la misère et des désastres de la guerre russe – japonaise. Il dirige les so­viets de députés ouvriers et paysans créés dans les grandes villes et, quand il doit s'enfuir, il prévoit ce que sera le futur état soviétique.
La répression sanglante ne diminue pas l'espoir et la combativité de Lénine. L'agitation ouvrière renaît en 1910, Lénine se rapproche de la frontière pour diriger de plus près la lutte ouvrière et soutenir les journaux nouveaux, particulièrement la Pravda qui paraît dès 1912. Le mouvement révolutionnaire s'amplifie. Puis c'est la guerre contre laquelle Lénine lutte de toutes ses forces en particulier aux conférences internationales de Zimmerwald et Kienthal en Suisse au cours desquelles il est mis en minorité.
Février 1917 marque la fin du pouvoir tsariste. La bourgeoisie libérale est au pouvoir et entreprend des poursuites contre les Bolchévistes en vue. Lénine se réfugie dans une hutte hors de Pétrograd d’où il prépare la grande révolution d’octobre qui va donner tout le pouvoir aux Soviets. La première tâche qui s’impose est celle de la paix nécessaire au maintien du pouvoir soviétique qui ne peut aider les capitalistes d’un côté contre ceux de l’autre ; Lénine même énergiquement cette tâche à bien.
Les difficultés continuent, il faut lutter contre la misère, empêcher l’action contre-révolutionnaire. Lénine est grièvement blessé par une fanatique qui l’attendait à la sortie d’un meeting. Sitôt guéri, il reprend la direction de la lutte sur tous les points, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur où ses avis guident les travaux de l’Internationale communiste.
Usé par une vie de lutte, usé par la misère, Lénine meurt le 21 janvier 1924 à 54 ans. Sa mort est un deuil pour les travailleurs du monde entier, mais son œuvre immortelle guidera des millions de travailleurs vers leur libération et la construction de la société nouvelle.
Louis Douay.

Assurances accidents du travail
De nouveau, l’assureur des Ateliers et Chantiers de la Seine Maritime recommence à faire des siennes.
Dernièrement, notre syndicat a dû intervenir auprès du préposé de cet assureur pour l’obliger à payer son dû à un de nos camarades.
Ce camarade formellement reconnu comme accidenté du travail par le docteur des Chantiers se voyait refuser par l’assureur ses indemnités en jouant sur une expertise du Dr Lacroix expertise qui pourtant confirmait celle du Dr Bourlange. Le but de l’assureur est de se décharger sur les assurances sociales de ses responsabilités.
Nous ne permettrons pas ces manœuvres qui frisent l’indélicatesse.
René Gohon.

Encore les immondices
Au moment où le Journal du Trait publie dans l’un de ses derniers numéros un article paru dans La journée industrielle sur l’œuvre des Ateliers et Chantiers de la Seine-Maritime en constructions navales, la place « La Cadence » sert à nouveau de déversoir aux immondices les plus diverses sans souci de l’hygiène des habitants du Trait. Chaque jour, les ordures s’entassent à nouveau en plein centre de notre cité pour la plus grande joie des rats qui ont établi là leur quartier général.
Le réveil du Trait avait déjà eu à signaler ce regrettable état de choses. Nous pensons à nouveau que si la Société immobilière tient à voir niveler à bon compte le terrain lui appartenant ce n’est en aucun cas au détriment de la santé et de l’hygiène publique.
À quand l’arrêté de monsieur le maire du Trait contre le dépôt d’immondices ?
Quel est celui d’entre nos édiles qui prendra la responsabilité d’interpeller monsieur le maire et ses collègues du conseil municipal à seule fin de mettre un terme définitif à ces dégoûtantes pratiques qui mettent en jeu la santé de nombreuses familles du Trait ?
René Talbot.

Suite d’incidents
En 1916, avant la construction des chantiers navals, il existait au Trait, commune de 300 habitants, six passages pour traverser la ligne du chemin de fer. Aujourd’hui, en 1938, dans notre commune du Trait de plus de 3.000 habitants dont la moitié habite entre ligne et forêt, il existe toujours en tout et pour tout six passages très distants les uns des autres.
Nous ne sommes pas pour ceux qui détériorent le matériel des chemins de fer, ni pour ceux qui mettent en cause des cantonniers de la voie en service commandé. Mais nous comprenons, par contre, nos camarades ouvriers qui cherchent à économiser quelques centaines de mètres à chaque trajet entre leur habitation et le chantier. Les chemins de fer n’ont pu et ne pourront empêcher cela.
En tenant compte du développement grandissant des constructions au-delà de la voie, deux ou trois passages supplémentaires pour piétons sont à réaliser d’urgence, sans frais pour la commune. Ces améliorations seraient du temps de gagné et de la fatigue en moins pour les ouvriers.
Une démarche a d’ailleurs été faite dans ce sens auprès de la direction des chantiers et nous pensons que notre municipalité a également son mot à dire à ce sujet.
R. Legendre.

Section socialiste
La section socialiste de Malaunay-Le Houlme, réunie salle de la mairie de Malaunay :
Demande instamment la réouverture de la frontière espagnole ;
Proteste énergiquement contre les mises en liberté des cagoulards ;
Demande une action plus énergique contre tous les fauteurs de guerre civile, ennemis de la République et de la liberté et réclame la réalisation rapide de la retraite des Vieux travailleurs trop longtemps attendue et le réajustement des traitements des employés publics.

Quartier du « champ des oiseaux »
En cette époque de l’année, nous allons rapidement vers les jours plus courts et vers le mauvais temps qui transformera le quartier déshérité du « champ des oiseaux » en un affreux cloaque. L’éclairage des rues brille par son absence et c’est presque à tâtons que chaque ouvrier devra regagner son logis les mauvais jours d’hiver.
Ce regrettable état de choses a déjà été cependant maintes fois signalé, mais il semble que si la Société immobilière se pose un peu là pour encaisser rubis sur l’ongle ses loyers, elle est toutefois moins pressée pour accorder aux ouvriers le confort qui leur est légitimement dû.
Tout dernièrement, chacun pouvait lire dans Le journal du Trait un article ronflant sur la cité du Trait. Avant de reproduire une telle prose, nos employeurs feraient mieux de se pencher un peu plus sur leurs œuvres sociales pour le plus grand bien des habitants de leur cité.
Louis Debord.

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