1916.09.27.Du ministre de France à Copenhague.Au ministre des Affaires étrangères

Lettre du ministre de France à Copenhague au ministre des Affaires étrangères

27 septembre 1916

Je remercie V. Exc. d'avoir bien voulu par sa dépêche du 2 de ce mois, me faire connaître les idées de M. le sous-secrétaire d'État pour la marine marchande touchant la représentation à Copenhague de la Compagnie française de navigation qui pourrait assumer après la guerre un service entre la France et les pays scandinaves.
Il me semble qu'une impulsion assez sérieuse a été dans des derniers temps donnée au commerce français pour que, la guerre terminée, il cherche dans les pays du Nord, de nouveaux débouchés à ses produits. Dans le courant de l'hiver, j'ai vu des représentants du commerce français des huiles et des graines oléagineuses arriver ici pour y nouer des relations d'affaires stables pour après la guerre ; en ce moment, un autre Français, agent de grandes maisons s'occupant de la toilette de la femme, est ici cherchant de même à assurer, malgré la concurrence allemande, une forte emprise de cette importante branche du commerce français sur le Danemark. Mais tous ces pionniers sont d'accord pour penser qu'un des principaux éléments de succès est l'existence d'une ligne française de navigation. Être dépendant de la compagnie danoise Forenede qui n'a cessé durant la guerre de se montrer désagréable pour la France, est une perspective qui ne sourit à aucun commerçant français désireux de faire dans les pays scandinaves des affaires sérieuses.
Sans contredit, comme le dit M. le sous-secrétaire d'État à la Marine marchande, il est très souhaitable qu'un Français puisse avoir ici la représentation de la future ligne de navigation, la colonie française actuelle ne paraît pas posséder le sujet bien qualifié pour tenir la place en question, mais quelqu'un de France pourrait venir.
M. le sous-secrétaire d'État met en garde contre la candidature de M. Ingwersen, gérant à Copenhague de l'Adam's Express C° qui a pu obtenir d'être correspondant de nos Messageries maritimes, et je crois aussi de notre Compagnie transatlantique, M. Ingwersen qui est, en effet, en relations constantes avec l'Allemagne ne me paraît, à part cette tare fort grave, n'avoir aucune des qualités requises pour faire un bon agent de compagnie de navigation, c'est un brouillon, qui cherche surtout les occasions de paraître ; il se glisse dans tous les comités où il trouve la porte entrebaillée, et collectionne les titres, de même que les décorations, une représentation de compagnie de navigation serait pour lui matière à gloriole, et non pas à travail. C'est une candidature qui, si elle venait à être posée, devrait être immédiatement écartée.


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