1911.03.13.De Worms et Cie Le Havre.A Chevillotte Frères.Brest

Courrier retranscrit sur une fiche manuscrite 

Le Havre, le 13 mars 1911
Messieurs Chevillotte Frères
Brest

Chers Messieurs,
J'ai bien reçu votre lettre du 10 courant. Je reste convaincu que, lorsque le moment sera venu, nous trouverons facilement un terrain d'entente qui vous donnera satisfaction aussi bien qu'à nous, mais je persiste à penser qu'il serait très dangereux de laisser un seul armement exploiter Bordeaux-Brest d'une part et Dunkerque-Boulogne-Brest d'autre part. Votre port est en effet sur le passage de tous les services de cabotage, il est d'un accès très facile, les frais y sont peu coûteux, c'est donc une escale très tentante pour les armements qui se rendent de la Manche dans l'Océan ou même en Méditerranée. Vous ne devez pas perdre de vue que depuis 1886, c'est-à-dire depuis 25 ans, il y a toujours eu un service en concurrence avec les vôtres. Le jour où vous seriez seuls vous n'y resteriez pas longtemps soit parce que les fondateurs de la Compagnie brestoise feraient appel à une autre ligne, soit parce que cette autre ligne d'elle-même chercherait à reprendre une partie du tonnage de vos anciens concurrents.
Vous considérez être venus à bout de la Compagnie brestoise, je ne suis pas du tout d'accord avec vous : elle vit encore et peut continuer à vivre en se transformant, c'est là une solution, vous le savez, qui a été envisagée déjà par plusieurs gros réceptionnaires de votre port qui ne veulent absolument pas entendre parler de votre monopole.
Si vos intérêts étaient seuls en jeu je me garderais d'être plus royaliste que le roi et après vous avoir exposé très sincèrement ce que je pense, je me rangerais à votre manière de voir mais il ne nous est pas indifférent de voir d'autres lignes s'établir entre les points que nous desservons parce que c'est toujours au détriment de nos propres services et vous vous souviendrez de ce que nous avons eu l'occasion de vous écrire à propos des Transports bretons.
Je compte sur votre obligeance pour me tenir au courant de tout ce que vous apprendrez et je vous prie de croire, chers Messieurs, à l'expression de mes meilleurs sentiments.

[Pièce jointe : Projet de compromis daté du 10 mars 1911.]

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