1856.09.23.De Ruyssenaers Frères.Alexandrie

Origine : Collection de lettres reçues - liasse 1849-1864

Ruyssenaers Frères
Alexandrie
Alexandrie, le 23 septembre 1856
Monsieur Hypolite Worms
46, rue Laffitte
Paris

Nous n'avons pas répondu plus tôt, Monsieur, aux deux lettres dont vous nous avez favorisés les 15 juillet et 2 août m.d. parce que nous avons cherché depuis lors à pouvoir vous donner quelque avis favorable au sujet des propositions que renfermait votre dernière.
Nous venons aujourd'hui vous donner des avis et vous fixer sur la position des choses en Égypte, en ce qui concerne les charbons.
Le gouvernement égyptien avait jusqu'ici l'habitude de faire des contrats à livrer avec des maisons de commerce pour ses approvisionnements de charbons, mais il s'est aperçu qu'il arrivait toujours que lorsque la marchandise était chère sur les lieux de production, et lorsque les frets y étaient élevés, on trouvait constamment des prétextes pour ne pas livrer et qu'ensuite, lorsque les conditions de prix et de nolis devenaient meilleures pour les contractants, la marchandise lui arrivait alors en masse.
Comme le gouvernement répugne à recourir à l'autorité consulaire, il s'ensuivait qu'il était toujours la victime, et qu'avec des achats importants à livrer et échus, il se trouvait très souvent complètement dépourvu, ne recevant rien du tout et forcé alors de subir la loi des détenteurs de la place.
Le vice-Roi, dégoûté de cette manière de faire, a renoncé pour le moment à ces contrats qui lui devenaient onéreux et comme il s'était prononcé très clairement à ce sujet en présence de notre sieur W. Ruyssenaers, le moment actuel eut été mal choisi pour lui faire des ouvertures au sujet des mêmes opérations contre lesquelles il s'était monté, non sans raisons.
Le gouvernement égyptien a acheté ces temps derniers sur place ce qui lui était nécessaire et à des prix assez élevés ; il veut continuer le même système d'achats suivant ses besoins et comme ses besoins sont constants et qu'ils tendent à progresser, nous pensons que ce serait matière à spéculation convenable d'avoir constamment disponibles quelques chargements de bon Newcastle ou Cardiff adaptés à la consommation des bateaux à vapeur et notre position auprès dudit gouvernement nous donnerait des facilités pour pouvoir écouler promptement la marchandise qui nous serait consignée. En apportant des soins dans la composition de ces chargements, on pourrait être assuré en outre, que lorsque le gouvernement reviendra au système des contrats, on sera admis à traiter des affaires considérables par la suite.
Toutefois, par conséquence des quantités considérables, dit-on, des marchandises attendues et des contrats en cours d'exécution qu'on suppose devoir être bientôt satisfaits par les contractants, ce qui arrêtera les achats de gouvernement sur place, l'article est calme et les prix ont éprouvé de la baisse, puisqu'on pourrait acheter aujourd'hui à 40/- de la bonne marchandise.
Mais dès que les besoins se feront de nouveau vivement sentir, nous pensons que les prix remonteront promptement, car le charbon est un article très élastique en Égypte.
Nous pensons donc que lorsqu'une maison comme la vôtre, Monsieur, qui est si bien placée pour ces marchandises trouvera des conditions convenables de fret et de prix, elle fera bien de nous diriger quelques chargements. Nous ferons tous nos efforts pour vous en tirer bon parti et nous serons très heureux de prouver ainsi à Monsieur Saint Hilaire tout le cas que nous faisons de la recommandation qu'il vous a donnée auprès de nous. Agréer, Monsieur, nos civilités empressées.
Ruyssenaers
Comme d'un moment à l'autre une circonstance peut se présenter de contracter avec le gouvernement, nous vous prions de nous tenir au courant par chaque courrier des variations de vos frets pour Alexandrie et nous saisirons la première occasion pour conclure une fourniture. Si vos offres nous étaient parvenues 6 mois plus tôt nous aurions pu les mettre à profit mais dans ce moment le gouvernement est indisposé contre les fournisseurs.

R.

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