1854.10.10.Au ministre de la Marine et des Colonies.Paris

Origine : Copie de lettres à la presse n°61 - du 5 octobre 1854 au 3 novembre 1854

Paris, le 10 octobre 1854
Monsieur le Directeur du Matériel,
Ministère de la Marine et des Colonies
En Ville

Vous avez bien voulu m'entretenir, Monsieur le Directeur, d'un marché que vous avez l'Intention de faire de 10.000 tonnes charbon anglais à livrer à Béïcos.
J'ai eu l'honneur de vous répondre qu'il vaudrait peut-être mieux dans l'intérêt de votre Administration traiter de gré à gré cette fourniture plutôt que de la mettre en adjudication.
En effet, l'annonce publique d'un besoin de 10.000 tonnes occupe les esprits, non seulement en France, mais aussi en Angleterre. Les armateurs stimulés augmentent leurs prétentions, et le spéculateur commencera par affréter des navires, qu'il comptera bientôt après faire accepter à l'adjudication, avec une bonne prime en leur faveur. Les soumissionnaires sérieux doivent calculer ces chances et augmenter leur prix de demande en proportion.
Si au contraire, l'affaire est menée secrètement, elle peut se faire dans des conditions plus favorables, et dans le cas où vous voudriez traiter avec moi, de gré à gré sans laisser transpirer rien de cette opération, je vous fais dès aujourd'hui les propositions suivantes :
Aux conditions de mon marché du 30 août dernier pour 6.000 tonnes livrables à Gallipoli, je m'engagerais à livrer les à Béïcos les 10.000 tonnes dont vous avez besoin et au même prix soit F 57,50 les 1.000 kilos.
Vous voudrez bien remarquer que Béïcos est notablement plus éloigné que Gallipoli, que le prix du fret est plus élevé de 2 shillings environ par tonne. Néanmoins, j'espérerais arriver encore à livrer la Marine, sans courir de [...] trop dangereuses. Je mènerais de front les deux opérations, Béïcos et le solde de Gallipoli et, n'étant pas [...] par un concurrent aux mêmes frets, je pourrais, je l'espère du moins, maintenir les prix aux cours actuels. Autrement, j'ai la conviction qu'une nouvelle hausse aurait immédiatement lieu. D'autant plus [que] la Marine anglaise doit éprouver les mêmes besoins que la nôtre en ce moment.
Vous voudrez bien remarquer aussi que le prix que je vous demandais le 30 août pour Gallipoli était raisonnable, puisqu'un seul concurrent sérieux, une maison anglaise, demandait 1,50 de plus que moi par tonne et que les autres demandaient des prix absurdes.
Depuis cette époque, les prix du fret n'ont pas varié comme je l'avais espéré dans une limite modérée. Je trouve encore mon bénéfice raisonnable, jusqu'à maintenant du moins, mais j'ai la conviction qu'une demande publique de 10.000 tonnes influencerait de suite en hausse le marché des frets.

Back to archives from 1854