1932.05.24.De O. Depret-Bixid.Riga.Au ministre du commerce.Paris

Copie de lettre

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Riga, le 24 mai 1932

L'attaché commercial de France
aux Pays Baltes
N°1607 - Valise - Copie
Mouvement commercial maritime entre la France et la Lettonie

O. Depret-Bixid
Attaché commercial près les légations de France
en Estonie, Lettonie et Lithuanie
à Monsieur le ministre du Commerce, de l'Industrie et des PTT
Direction de l'expansion commerciale (3ème bureau)

Les communications maritimes entre les ports français et Riga sont, malheureusement, peu pratiques alors que la proximité du port de Hambourg, qui expédie en été chaque semaine à Riga 2 ou 3 navires et en hiver au moins un navire provoque un vif mouvement commercial entre Riga et Hambourg. La possibilité de recevoir à Riga en 5 ou 6 jours les marchandises expédiées du port allemand incite les importateurs lettons à faire charger leurs navires à Hambourg, surtout s'il s'agit de matières premières. J'ai l'honneur de vous exposer ci-dessous les quelques remarques que j'ai pu faire à ce sujet.
Certaines fournitures effectuées par des maisons françaises arrivaient avec des retards considérables, que bien souvent elles étaient la cause de rupture de contrat. C'est le cas de maisons françaises exportant en Lettonie des fèves de cacao déchargées au Havre, à l'arrivée de leurs pays d'origine, ces marchandises ne peuvent repartir directement du Havre pour Riga, les communications entre ces deux ports étant trop incertaines et trop lentes, si bien que les chargements repartent des ports d'Amsterdam et Londres.
Encore plus mauvaises sont les communications maritimes entre Marseille ou Bordeaux et Riga. Cependant, de Marseille partent le savon de Marseille, l'huile de térébenthine, l'huile d'olive. Les navires quittant ces ports à destination directe de Riga sont très rares et on est obligé de transborder les marchandises à Copenhague ou à Hambourg, ce qui cause non seulement des frais inutiles de transbordement mais exige aussi beaucoup de temps.
Il serait avantageux pour le développement des relations commerciales entre la France et la Lettonie que les ports de Marseille et Bordeaux soient reliés plus étroitement à Riga par des lignes régulières rapides.
Le fait que les marchandises d'Hambourg arrivent à Riga en un court délai est la cause pour laquelle les importateurs lettons achètent fréquemment les marchandises françaises à Hambourg et non pas en France. C'est ainsi que de nombreux commerçants achètent à Hambourg de la térébenthine vendue comme d'origine française et du savon de Marseille de provenance douteuse pour le moins, car on soupçonne certains fabricants allemands de fabriquer du savon de Marseille et de la térébenthine en Allemagne, puis d'entreposer ces produits à Hambourg aux fins d'exportation.
Cette fraude aurait moins de succès si Riga avait avec les ports français des relations maritimes plus développées et le commerçant letton pourrait prendre rapidement l'habitude de recevoir de France des marchandises dont l'origine ne fait aucun doute.
Il y a également des maisons françaises exportatrices de cafés dont la qualité et les prix peuvent combattre victorieusement la concurrence des cafés arrivant par Hambourg.
Certes, Hambourg est considéré comme un des plus grands marchés mondiaux pour ce produit, mais il ne faut pas oublier que l'importateur letton est obligé par suite de la hausse des droits de douane lettons, d'acheter de préférence le café qui provient des pays avec lesquels la Lettonie a passé un traité de commerce et dont les marchandises ne sont l'objet que d'un tarif minimum de douane.
Le Havre est donc bien placé pour fournir à la Lettonie le café provenant seulement des colonies anglaises, hollandaises et françaises. Ce choix, malheureusement, n'est pas considérable mais la concurrence des produits de l'Abyssinie, du Brésil et du Guatemala (gros producteurs de café) est peu dangereuse du fait que la Lettonie n'a passé aucun traité de commerce avec ces pays dont les produits doivent acquitter un droit d'entrée calculé d'après le tarif maximum.
Il est assez curieux de remarquer qu'Hambourg expédie toutes les espèces de cafés demandées en fournissant toujours un certificat d'origine émanant d'un pays avec lequel la Lettonie a passé un traité de commerce, alors que le Havre éprouve de grandes difficultés à se procurer les mêmes certificats.
Il y a donc lieu de souhaiter qu'une prochaine reprise d'activité économique entre la France et la Lettonie permette de renouer des relations commerciales maritimes entre ces deux pays pour concurrencer l'Allemagne qui a vu avec un certain plaisir ces relations diminuer et, pour ainsi dire, disparaître malgré l'importance atteinte à un certain moment, puisqu'il y eut une époque, en ces dernières années, où une seule maison française faisait annuellement par voie maritime, avec la Lettonie, un chiffre d'affaires de 250.000 livres sterling or.

Pour l'attaché commercial en congé
p.o. le secrétaire général

[Signature]


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