1945.09.24.De Hypolite Worms.(Sans destinataire).Original

Original 

24.9.45

J'ai bien reçu la note de Bucquet au sujet de Sériac et des conversations qu'il a eues tant au ministère de la Marine marchande qu'avec M. Busson et M. [Dondain]. J'ai également reçu copie de la lettre que vous avez fait transmettre par Burness à Acfield. Toute cette affaire provoque de ma part un certain nombre de réflexions dont je vais vous faire part.
1. D'abord, je ne comprends pas le début de la lettre que vous avez fait transmettre à Acfield et qui débute ainsi : « A group in which we are interested has just been formed under the title of Seriac ».
Qu'est-ce que cela veut dire ?
La maison Worms a-t-elle déjà pris un intérêt dans Seriac et si oui, sous quelle forme ? Si elle n'y a pas pris de participation, ce qui me semble bien ressortir de la note de Bucquet qui ne relate que des conversations, pourquoi avoir dit à Acfield que nous étions dans l'affaire, ce qui va lui donner une idée est tout à fait erronée ?
2. D'autre part, qu'est-ce que c'est en définitif que Seriac ? L'affaire existe-t-elle déjà ou est-elle seulement à l'état de projet ? Dans le premier cas, sait-on la composition du conseil et la répartition du capital ?
3. Ceci dit, en ce qui concerne Seriac, que vient faire M. Busson dans les affaires de création de ligne de navigation iranienne ? Quelle relation peut-il y avoir entre la Banque de Syrie et le gouvernement iranien ? M. Busson est-il mandaté par ce dernier ?
Ceci dit, je vais examiner les deux affaires qui sont complètement distinctes :
a. Seriac et ligne de cabotage Méditerranée - Égypte - Syrie - Palestine - Grèce et Turquie
b. lignes de navigation sous pavillon iranien, tant au long cours qu'au cabotage (en mer Rouge)
a. En ce qui concerne le cabotage en Méditerranée, vous savez que c'est une question à laquelle je pense depuis très longtemps. Elle me semble intéressante mais je ne peux l'envisager que sous la forme d'une exploitation directe Worms, sous pavillon Worms (France) ou Worms (Égypte) afin de nous rendre maîtres absolus des bateaux et du trafic à notre propre profit et au profit (pour les transbordements) des lignes de long cours dont nous sommes les consignataires en Égypte.
Il me semble sans le moindre intérêt de venir en second rang, à la traîne de Comarf, c'est-à-dire de Savon, c'est-à-dire comme simple actionnaire, même actionnaire majoritaire, pour attendre simplement des dividendes et partagé avec Savon l'agence des navires.
b. En ce qui concerne la compagnie de navigation iranienne, cabotage et long cours, c'est une aventure dans laquelle je trouverais dangereux de se lancer. Il faudra de gros capitaux et ce n'est certainement pas la maison Worms qui les y mettra, elle a assez à faire avec la reconstruction de ses flottes sans avoir besoin de mettre des bateaux sous pavillon persan. De plus, ce serait aller à la bagarre avec Striks & Ellermann, qui sont maîtres de la mer Rouge et du golfe Persique et s'il y a à prendre la place de la Hanse sur les ports du Nord, vous pensez bien que les lignes anglaises s'en empareront tout de suite sans attendre le développement d'une ligne persane aidée, exploitée ou financée par les Français. Il est possible que le gouvernement iranien, excité par quelques personnes qui cherchent des profits accessoires ou personnels, essaie de faire preuve d'indépendance mais n'oubliez pas que le gouvernement persan est entièrement entre les mains de l'Angleterre (ne serait-ce que par l'Anglo-Iranian, lui-même lié à Strick) et après nous avoir donné beaucoup de mal à essayer de faire quelque chose, on nous laissera tomber parce que le gouvernement anglais interviendra. Nous nous serons compromis inutilement, et, de plus, nous aurons l'air ridicule.
Dans ces conditions et tout bien réfléchi, je conseille la plus extrême prudence, et même l'abstention complète dans ces deux affaires.
Et, si comme je le pense, nous n'avons aucune participation dans Seriac, je vous demande d'écrire de nouveau tout de suite à Acfield pour corriger l'erreur de votre lettre du 17 septembre.

HW


Back to archives from 1945